mercredi 29 avril 2020

Sylvain Chauveau 2020



L'air du matin est musqué, le grain Canabaceae du charme-houblon n'est pas encore dans l'air, pourtant j'ai la bouche amère, et déjà la douce meringue éphémère fond sur cet or qui crépite. Allongé je guette à nouveau les avions par hasard, y'en a pas, qu'est ce qu'il se passe en bas ?

Étendu par pur hasard, je vois les petites feuilles pourpres de mon cotinus balayer le pur azur. J'apprends à doser mes gestes, millimétrer mes mouvements en écoutant le bruit sourd de cette page que je tourne, de cette brise perdue dans le feuillage. Je murmure ma lecture pour toucher les mots sous le son loin du concert des oiseaux, et la fragrance de lilas en raffut dans mon cerveau. Je suis au plus creux de mon isolement, je prends des mélopées sous une canopée, la petite mienne. Mon jardin, c'est pas la Patagonie, il en fait des caisses, pourtant je lui dit que le monde tente une agonie, que j'y suis pour rien, je laisse décanter et qu'il a raison de s'en battre les branches.
Je vais de temps en temps voir ma bicyclette, elle sait elle qu'une vie sans machine n'est pas envisagée. Des rayons comme des notes, des boucles comme la jante qui tourne, lancinant moteur des pensées qui s’effondrent dans le doute.
J'ai touché le silence en écoutant la couleur de ma page, les notes blanches de Sylvain Chauveau, une fois de plus. L'apesanteur des âmes, réalité voilée.

Sylvain Chauveau 2020 « Life Without Machine » label : Flau

lundi 27 avril 2020

Bertrand Betsch 2020



C'est la fin des haricots qu'ils nous disent. J'ai beau tout couper, laisser allumer la veille sur les JT, on entend quand même le brouhaha des résignés.
Ce soir je m'en fout, « ventre affamé n'a pas d'oreille »..ça sent la dalle, j'ouvre une boite de fayots et je me dis qu'elle va pas faire long feu. Pour sûr s'en est fini pour eux.
Toute la journée j'ai écouté Bertrand Betsch, son nouvel album plus virtuel que jamais. C'est la première fois qu'il m'est impossible d'avoir accès à une nouveauté d'un artiste récurent, de ceux qui m'attirent encore vers les bacs et le physique de la chose. Je m'approche de ma box, wifi, bluetooth, spoti .. c'est parti.
L'impression aérienne pour l'avoir écouté de cette façon, de l'avoir rêvé, il flotte je le garde pour moi, existe t-il vraiment ? Plus des masses d’insouciance, ni de connivence.. Des monticules d'échappées dans le confiné, « La Traversée » plane. Tellement cet album me rappelle « Colère », celle disparue des résignés angoissés. La mélancolie, c'est comme un doux petit chant dans le ventre.
Y'avait « Remué » et comment certains vivent, ces jours-ci il y a « La vie remue ».

Dérobées, embardées, échappées à la nage, des relèves, du bonheur, Bertrand Betsch sans cesse remue, ouvre des miroirs.
C'est une grande soupe à la grimace cette traversée, le hamac a tangué sur la mélancolie des boules de neiges qui me tombent sur la gueule, et la pochette blanche et noire du nouveau Betsch.
Chaque jour est une relève, à chaque aurore sa fatigue, aujourd'hui le soleil au zénith, la peau salée d'une encordée au dessous d'une canicule printanière intemporelle, accords mineurs ou désaccords majeurs, même si l'on pleure on aura eu du bonheur.

On voudrait vivre ce qu'on a déjà vécu. Revivre. Le béton des métropoles, le fade du néon en se bouffant les armes à grosse gorgée. Revivre ce que l'on a mal vécu, y'aura toujours des haricots, tant que c'est pas la fin.

Son plus bel album depuis sa colère. . 

Bertrand Betsch 2020  "La traversée" label :


jeudi 23 avril 2020

Brigitte Fontaine 1968



Stagner n'a rien pour me déplaire, laisser les ronces s'entortiller et griffer l'âme. « Il y a des années on l'on a envie de ne rien faire », un peu celle-là. L'anesthésie des dispositifs n'est pas chose facile, faut les voir se ruer, vouloir s'abîmer dans le jus vers le n'importe quoi, le vital en aquaplaning, le principal est d'en être persuadé. Végéter pour mieux laisser pousser sous le son Vannier. Enfin ils nous disent de contempler, même si faut pas s'leurrer, cher on va le payer.

« Brigitte est folle », pas tant que ça, elle a quelque chose de beau dans le genre humain, pur et important, c'est un phénomène de la vie. Elle est unique, il était une fois mais pas deux. Les textes sont puissants, espiègles et géniaux, de la belle poésie, ce n'est pas un album de variété, elle est dans un autre registre de liberté comme Barbara. 1968, elle s'est branle un peu, c'est au studio Davout avec Jean Claude Vannier qui flirte alors avec « Que je t'aime », « Madame », « Tous les bateaux, tous les oiseaux » et surtout « L'histoire de Melody Nelson ». La rencontre avec Serge n'a pas eu lieux sûrement impressionné par les mots de Brigitte, seul le son Vannier de Melody est là, sur le premier Lp de Brigitte.

Balayer d'un album quelques heures de lourdeurs, chasser une possible morosité, jouissive « Blanche Neige », adorable « Eternelle », belle « ..inadaptée », taquine « Comme Rimbaud ».. sublime apothéose avec son comparse Higelin « Cet enfant que je t'avais fait ». Érotiques Birkin/Gainsbourg, poétiques Fontaine/Higelin.

Brigitte Fontaine 1968 « Brigitte Fontaine est Folle » label : Saravah

mercredi 22 avril 2020

Gérard Palaprat 1971



Bientôt la fin du monde .. alors on prend sa valise et on va tous là haut sur la montagne.. on laisse tout d'inutile sur la commode, dans les placards et le pantalon à rayures aussi .. devenir un fool on the hill..avant la fin, on va tous là haut sur la montagne ...mais pas à plus de 1km.

Gérard Palaprat 1971 « Fais-moi un Signe » 
« Pour la fin du monde.. » 45T label : disc'AZ


lundi 20 avril 2020

Arlt & Thomas Bonvalet



Tiens donc, une journée qui flotte, quelques centaines de pas, des cliques, du grignotage, un petit ancas au cas où.. d'une fenêtre à l'autre. J'ai bien deux bières au frigo, mais faut rationner, un film, puis deux, un clique, le fond du jardin, retour sur le canapé, de la fenêtre à la porte-fenêtre une dizaine de fois.. tiens, la musique, je vais fouiller.....
Arlt, Thomas Bonvalet.. je connais , j'aime bien, c'est parti.......
Orso Jesenska, Belin, et des voix de filles comme j'aime, Julie Doiron, Laura Veirs, Armelle Pioline, un petit air acide pas pour me déplaire, une onde Saravah qui me va. Je me pose, je laisse partir, je me relève, j'attaque en binouze la première.. mon rocking-chair démarre doucement, le pil rythme weird boisé et bricolé qu'il me faut. La douceur psychédélique hyper poétique me berce.
Toute une journée pour rien débouche sur ce petit bijou qui du coup la rattrape en plein vol, la réchappe de justesse. Je le remets ce disque, j'en ai une deuxième au frais.

Je me pose, j'écoute ce trio fou sous le ciel chaud sans le soleil enculé, les prunus finissent de neiger, les lilas parfument toute la campagne, le gazon me chatouille les doigts de mes bras qui pendent du hamac au ... au loin, à quelques pas d'ici, au creux de la marre des oseraies de mon village, les rainettes et les crapauds chantent et oscillent.. Thomas Bonvalet c'est L'Ocelle Marre, ARLT c'est Eloïse Decazes et Sing Sing.. J'ai trouvé mon disque pour la journée.

Arlt 2014 « Arlt & Thomas Bonvalet » label : almost music

mercredi 15 avril 2020

Birds On A Wire



Sur la place du bourg une petite marelle sans personne.
À travers les persiennes on voit la craie blanche et bleue sur l'asphalte esseulée sans semelle, du ciel par terre.
Sur la place du centre en plein soleil tout est tranquille, tout le monde assoupi. Le violon calcaire, des langues folles volatiles, les chants du monde qui planent, la bonté du brave homme, un disque merveilleux et tant d'absences.
…..Brel, Cohen, Fauré, Buarque, Gilberto Gil..et même Pink Floyd.

Dom La Nena, Rosemary Standley.. petite merveille intemporelle.

Birds On A Wire 2020 « Ramages » label : PIAS


dimanche 12 avril 2020

Nino Ferrer 1975




Cohue de Bobos pour le footing de 19h pétantes, gros porc écarlate au perchoir imposant le premier tour des municipales, medef hurlant à la mort arbeït « yes sir » comment faire bosser les zombies, hôtels parisiens pour la quarantaine, exubérances rue Lobau, désobéissances à la pelle à Courchevel, désordre total chez les dirigeants, amateurisme, onanisme du puceau... la médecine et les morgues s'affolent.
Le système a du mal à s’arrêter, le capitalisme va achever d'exterminer les bipèdes. L'impatience des dispositifs, à peine commencé, déjà déconfiné. « Restez chez vous », c'est quand même pas une phrase compliquée. Ce pays me débecte et l'idée de retourner un jour dans cette capitale nauséeuse me fout déjà le bourdon.L e "Blues des chiens".

Je ne suis pas allé en course spécialement pour acheter des œufs en chocolat. Pas de vacances, la fête pascale attendra. J'ai fait comme Pax, je me suis arranger avec la musique pour faire l’œuf. J'ai fouillé mes bacs, et regardez ce que les cloches m'ont apportées ce matin.
C'est un bien bizarre album, une drôle de pochette, et dedans, il y a ma chanson préférée de lui, « Alcina de Jésus ». Mélodieuse, harmonieuse, guitare sèche, piano cinématographique, mélancolie planante, elle monte et monte encore comme se lève un orage symphonique à gorge déployée.

« Y'a des gens dans la rue qui chantent la liberté »....Les cloches sont passée, « Suite en œuf ».

Nino Ferrer 1975 « Suite en oeuf » label : barclay

mercredi 8 avril 2020

Nils Frahm 2020



Pas seul avion dans le ciel. Abyssale le bleu étourdissant. Le cou cassé j'ai les yeux collés au cobalt profond sans voile aucun.
Les artères dévidées, les villes libérées des surcharges cardio-vasculaires, les photographes sortiront de jolis bouquins sur les rues vides. Un silence de plomb au réveil, des soirées blanches.
L'homme est bizarre, impossible de profiter de cet art de vivre, de cette douceur de laisser glisser. Ralentir à tout prix.
Savourer cette apesanteur, c'est comme écouter du Nils Frahm. « Empty », sont nouveau bel opus est de ce silence là, plus que jamais il distille la saveur des espaces apaisants.

Nils Frahm 2020 « Empty » label : erased tapes

mardi 7 avril 2020

Takeleave 2020



Un peu d'ambiant, du lumineux malgré un léger voile d'humidité qui s'envole vers le ciel bleu pâle. Douce chaleur moite cette musique, vent léger, jazz électro pop de fond, étourdir vaguement les idées et laisser le jeu léger du DJ berlinois.
Je pense à Fourtet en plus jazz, ou à quelques opus du label Thrill Jockey coutumiers de ce papier peint là. Cinématographique, downtempo, Troublemakers, Tortoise.. on se laisse glisser.

Takeleave 2020 « Belonging » label : project : mooncircle

dimanche 5 avril 2020

Cocorosie 2020



Un hymne au printanier envahit tout mon crâne dilaté par la chaleur comme une soudaine rafale de vent frais. Le nouveau Cocorosie est un petit chef d’œuvre et « Restless » fait danser mon transat qui ne touche plus terre. Elles infusent à travers ma carcasse qui bout au soleil. Le casque vissé, les yeux s'ouvrent au chant du duo, il neige à gros flocons.. mon cerisier tombe sur moi et toutes les branches dansent sous le ciel bleu vif.

La fibre est revenue, je me reconnecte aux nouveautés, j'ai pris mon panier tout chargé d'opus 2020, cette drôle d'année qui restera dans l'histoire. Les bacs sont plongés dans le noir, les sorties voltigent dans l'air, comme les pétales blanches du cerisier qui neige sur moi.

Cocorosie 2020 « Put the Shine on » label : marathon artists

samedi 4 avril 2020

Nathaniel Rateliff 2020



Les arbres rendent heureux, c'est chose certaine. Y'a qu'à voir le sourire radieux de Nathaniel. La chlorophylle se laisse transpercer par les rayons. Un kilomètre à la ronde, le compas sur la carte 1/ 25 000 ème, aller trouver les ligneux les plus proches avec dans le crâne des airs acoustiques, les chansons cellulaires de Rateliff. Country lumineux, Leon Redbone dans l'air, chez Stax s'il vous plait.
On est jamais seul dans une forêt, de haut en bas, de part et d'autre, des racines à la canopée, on est habité de par en par. Rencontrer des solitudes passé l’orée du bois. Rateliff au milieu des troncs.

Nathaniel Rateliff 2020 « And it's Still Alright » label : stax


jeudi 2 avril 2020

Hallyday 80



Les galettes défilent, Johnny en pleine période de confinement, Wock'n'Woll c'est fini mon pote. La Harley sur la béquille, les tiagues in the garage, la clôture pour seule liberté.
Des studios pour enregistrer, un moment de solitude pour les amplis les enceintes et les consoles.. 1980, « A partir de maintenant »..
Certes, Balavoine et Polnareff... une grande nouveauté pour lui (bof).. mais aussi et toujours Bob Seger.. et puis Mallory « Un diable entouré d'ange ».. hyper chanson, « A double tour ».....

Un album très à part, pochette de beau gosse romantique improbable de jean à la chlorophylle... qui s'écoute bien malgré tout. Période sombre pour lui, le divorce approche, anniversaire solo, Johnny confiné ?? célibataire ?? ça va pas durer longtemps. Perso, je vais bientôt lâcher prise avec lui, encore quelques disques encore et puis..... Des albums comme celui-là découvert à sa sortie, rappellent de forts souvenirs de contexte d'alors. Des idées nostalgiques apparaissent, je sais que c'était le printemps, une écoute avec un temps très clair, et qu'on était libre:D
On ne le voit pas partout cet opus là, secondaire ou pas, un Jojo ça reste un Jojo.

Johnny Hallyday 1980 « A Partir de Maintenant » label : Phillips

Thomas Köner 1993

  La croûte gelée se ramollit, ventre flasque et tiède respiration. Le ciel se charge de l’halènes des Steppes, le silence gronde. Notre ...