Ni plus ni moins, il me fallait ça
pour me rendre là où je devais aller sans me prendre la tète. Un
air qui me fait regarder un platane des villes avec une certaine
béatitude même si je me demande comment ils font ces arbres pour
pousser majestueusement au beau milieu du macadam sur lequel la pluie
ruisselle.
« Set to Attack » en
tète me colle aux pas. Des remugles des Strokes dont on ne pense plus, et un
petit savoir faire qui se bonifie au fil des années, un air Beatles
Harrisson histoire d'arpenter léger les alignements des boulevards
pleins de bagnoles et de klaxons qu'on entend plus.
Mais au fait, c'est qui ce Francis ?
Albert Hammond Jr 2018 « Francis
Trouble » label : red bull
Une petite virée dans le passé pour
chanter cette petite chaleur qui nous dilate les poumons.
Du BJH des débuts, du Gene Clark, du
Mickey Newbury, y'en a dedans, comme cette chanson merveilleuse de
Waters « Grandchester Meadows ».
1971 ah les beaux jours, premier album
d'Alex Bevan, inconnu pour moi avant cette écoute, rare, poésie
folk pour étendue champêtre ondulant sous la chaleur des moissons
qui entame leur bal poussiéreux.
Alex Bevan 1971 « No Truth to
Sell » label : big tree records
J'ai une relation bizarre avec les
Manic Street Preachers. Ils me collent au casque tout en véhiculant
leurs ondes désagréables de power pop bruyante de stade. Coldplay,
U2, Simple Minds (que des belles voix..hein Tonio ..:D)... rien n'y
fait, je suis accroc aux chansons des gallois. La voix de James Dean
Bradfield y est sûrement pour quelque chose, avec la façon de
bétonner des mélodies en acier pour des stades dignes de ce nom.
« Know your enemy » en 2001
fut le sublime déclencheur. J'ai même demandé à un pote de
passage à Londres de me ramener le puissant « Lifeblood »
en 2004, certains albums à l'époque tardaient à sortir sur notre
territoire. (Merci Nico).
Les critiques ne sont pas tendres, leur
histoire chaotique, c'est bourré de clichés pop d'envergure, mais
voilà, moi j'entends « Vivian » et je craque,
« International blue » et j'ai la pèche. Je suis addict aux Manics.
Manic Street Preachers 2018
« Resistance is Futile » label : columnia
J'ai le doux souvenir de mon grand-père
amenant au lit le plateau du petit déjeuner pour ma grand-mère qui
aimait traîner ses rêves sur le traversin. Peut-être restait-elle
un peu plus longtemps au lit juste pour avoir le plaisir de cette
attention là. Elle a bien trimé dans sa vie la Micheline amoureuse
d'un cheminot.
Sur le plateau, toujours le même bol
de café chaud avec les deux tartines de pain grillées et beurrées.
Pas de la baguette, mais du pain, tronçonné toujours de la même
épaisseur.
Je reviens souvent au cour ordinaire
des choses qui comme le chante Murat, peut incendier le quotidien. A
la fureur des ambitions qui accélère les vies pour pas grand chose,
je préfère cette infinie tendresse comme on fleurirait le temps qui
passe à sa vitesse normale.
Solennelle, l'heure est la même,
l'attention inébranlable, l'amour je la devine encrée.
A quelle vitesse vivre
C'est un titre de magazine que j'ai entraperçu au coin d'un kiosque
pendant mes virées errantes du midi. Sont forts ses journalistes,
ils te balancent des principes ravageurs et modernes pour te remettre
en question ou te faire flipper ton casse-dalle de midi. A quelle
vitesse ?? le comportement vital et nos actes vont bientôt
être flashés sur la voie publique. Des points sur notre carte
d'identité ?? le débit des vies, le dépôt des veines, les
échelles biologiques sont violées.
La douceur d'une seconde dégustée, du
même pas que mon grand-père qui, un plateau à la main entre les
trains qui passent en bas de son jardin à la même heure et les
voitures toujours les mêmes qui défilent de l'autre côté vers la
rue, s'en allait dire sa tendresse quotidienne.
George Moustaki 1969 « George
Mostaki » label : polydor
C'est une rechute, impossible de faire
cure des chansons de par ici. J'ai replongé de la plus belle des
façons avec le retour de Wladimir Anselme qui se débarrasse ici du
syndrome du deuxième album.
« Les Heures Courtes »
en 2011 est un souvenir artistique merveilleux, de la chanson comme
j'aime avec de grands textes. Je bois ses mélodies riches et
mélancoliques. Son écriture me laisse bienheureux, comme un passage
nuageux qui embellit la grisaille.
« L'esclandre »
vient de paraître, c'est un petit régal, pas sûr une fois de plus
qu'il en face une sur notre territoire et ailleurs. Je le pose bien
au chaud sur ma platine dérisoire, il est court, il tourne en
boucle, mes idées rondes sont réconfortées par les chansons
amicales douces et ardentes de Wladimir Anselme.
Wladimir Anselme 2018 « L'esclandre »
label : le furieux
Des étoiles sont tombées dans mon
café. Des étoiles du matin, délavé, cramé par une nuit sans
lucidité. Ma raison congénitale s'est faite la malle le temps d'un
laps d'exotisme. Je fut ailleurs pour quelques moments. Ces chansons
me rappellent tellement ma docilité hachurée.
Sur mon grand café sans sucre,
« Minus » est venu saupoudrer de la poussière d'étoile.
On dirait la mer qui scintille.
Lui, on dirait Father John Misty qui
chiale, ou Jason Molina avec une voix fluette.
Je n'ai pas cherché à savoir qui
était ce Daniel Blumberg, curriculum ou pedigree je m'en fout, il a
plongé dans mon aube. Il est venu adoucir les forceps de mon cageot,
les bras métalliques irréels grâce auxquels là je suis à demi
debout.
C'est un album céleste et vénéneux,
ça couine et pigne dans le larsen osseux, plein de cordes, c'est pas
de la douleur, c'est la énième courbature à vouloir y retourner,
chaque jour.
Les soirs me rendent dingue. J'aime pas
le matin, pourvu qu'il y ait un gars dans ma tasse à me faire lever
le naseau pour choper la dernière étoile qui lutte.
Allez ouste poussez vous, ce petit truc
est pour moi. Aux aguets près à jouer d'la béquille dans les
roustons, je me suis chipé en bousculant, un petit coffret pas
dégueux. Telle la langue du caméléon chopant à la vitesse de la
lumière le petit volatile fébrile et léger passant par là au
flash furtif d'une éclaircie éphémère, j'ai attrapé Sr Chinarro
series 3CD.
Pas un pas deux, mais trois albums pour
même pas le prix d'un. Une période un peu délaissée pour moi,
puisque je suis grand fan de Sr Chinarro depuis le dramatique et
bouleversant « La Primera Opera Envasada al Vacio »
en 2001 (et tout ce qu'il y a avant), aussi profond et puissant qu'un
slow core de Low ou Arab Strap, et que je me suis légèrement arrêté
à « El Ventricuolo de si Mismo » en 2003.
Il y a eu pourtant un beau retour avec « Enhorabuena a
los Cuatro » en 2013 et puis plus rien.
Depuis, quand je vois ce nom là, je
vote sans hésitation aucune, Sr Chinarro, là bas, en Espagne, c'est
toujours LE président. Un peu comme pourrait l'être Pedro Abrunhosa
au Portugal.
Une fois de plus, le grand label
madrilène acuarela discos m'a présenté ce groupe mythique, comme
l'a été Migala dans un autre domaine, ou Nacho Vegas … cette
maison de disques là est une aubaine, une corne d'abondance.
Sr Chinarro, c'est un collectif
tournant autour d'une voix Callahan/Stapples... Antonio Luque.
Ballades rocks, les frontières sont toujours aussi imperméables.
Pas une pas deux, pas trois, mais quatre, puisqu'en plus de ces
productions 2006/2008/2011 très peu répandues, Sr Chinarro viennent
de sortir un 16 ième album « Asuncion ».
El presidente est toujours là Sr
Chinarro.
Sr Chinarro 2018 « Asuncion »
2006 « El Mundo Segun » /
2008 « Ronroneando » / 2011 « Presidente »
Promis j’arrête, l'hexagone va finir
par s’essouffler, en plus qu'il a fallu que je cause à un
corporate fnac parce que je ne trouvais pas Married Monk sur les
promontoires. Normal il n'y était pas. C'est quand même une sortie
assez bandante pour ne pas communiquer l'érection avec un gars
engagé pour gonfler normalement ses tissus spongieux des oreilles
d'un tel objet. Bon, il a fallu que je le dévie de Shaka Ponk alors
qu'il rechargeait les vitrines de Marc Lavoine.
Je n'ai absolument rien contre Lavoine
ni Ponk, mais moi, là je veux Monk des Married qui ont quand même
balancé MOCKY, Belgian Kick, The JIM SIDE...... eh c 'est pas de la
petite bière ces trucs quand même.
J'ai donc fouillé dans les intervalles
bien organisés à la lettre M de l'épicier culturel du coin. Y'en a
qui font pas leur job ici bas ?? ah là là, le monde est moche,
mon banquier non plus il connaît pas The Married Monk, ou alors je
veux bien un don pour sauver l'ISF.
J'ai trouvé, je l'ai chopé, bien
caché dans ses pantoufles à pompons roses de barbapapa pop à la
voix sucrée et aux mélodies pop.
Promis j’arrête l'hexagone. Ils
chantent en anglais, du coup la transition outre manche &
Atlantique est toute proposée ici... embarquons et laissons ces
artistes flottant flotter à qui mieux mieux. Vaille que vaille, moi
je prends un kiff sérieux à écouter ce tarabiscoté
« Headgearalienpoo ».
Ah, en passant, je sais c'est con, mais
j'en ai mis un des deux disques proposés en bas, sur le promontoire de
l'épicier artistique du coin, bien visible. Ça avait de la gueule ce rose bonbon
au milieu des toutes ces tronches grisâtres. Me souviens même plus de l'autre que j'ai caché...
The Married Monk 2018
« Headgearalienpoo » label : ici d'ailleurs
Les fossés dansent et les friches
chevelues tanguent, toutes ces herbes embellissent nos paysages d'un
duvet de fétuques, bromes, bosses et ravines de poacées.
Marie Modiano aussi, embellit notre
paysage artistiques depuis pas mal de saisons, livres, disques, c'est
une chance d'écouter ses belles chansons de par ici. Sa voix est
Gréco/Balibar, « Pauvre Chanson » un
trompe l’œil, riches et fraîches elles le sont toutes, pop, jazz,
cuivrées, orchestrées, littéraires et chaleureuses.
Il serait fâcheux de passer à côté
d'une telle œuvre, absolument discrète, comme c'est coutume par
chez nous, cette triste manie de camoufler sans cesse les beaux
disques.