vendredi 19 avril 2024

Manic Street Preachers - 2004


 

En couple les oiseaux, ça sautille sec sur la parcelle fraîchement fauchée.

J'ai toujours eu horreur des couples qui vont faire leurs courses ensembles..papa conduit la charrette et manman la charge pour toute la famille. Des fois y'a les gosses avec, cette corvée immonde d’auto tamponneuse au milieu des rayons surchargés m’affligent. Papa coche sur la liste tout en gueulant sur ses rejetons qui réclament. Manman énervée elle aussi, prends les produits rayés de la liste et les entassent dans la charrette avant de passer à l'autre rayon. Y'a pas un code de la route comme sur leur parking dans ces hangars hagards... « lost in the supermaket » disait l'autre. Les mêmes produits, aux mêmes endroits avec des codes partout.


Là c'est pas pareil. Les oisillons attendent au creux du nid frais, de douces brindilles et de la mousse encore verte. Il ne faut pas perdre de temps, œufs à découvert ou petits sans plumes affamés à la merci d'une rafale de vent ou d'un prédateur belliqueux. Tous les deux sautilles et s'échangent qq brins d'herbe, un petit lombric arraché d'un coup sec à la terre molle, entre deux rosettes de pâquerette. Je ne fauche qu'à quelques endroits, une parcelle pour se poser et quelques acheminements pour accéder. Le reste est mon laboratoire, je laisse, guette et observe.. tout y renaît, tout grouille, un monde jaillit calmement. Ces deux là sautillent, petite becquée, partage du butin, bisous de bec avant un retour vif d'entre mes cyprès sombres.

Sur ma droite, contre le mur en pierre, un névé de pétales blanches s'est formé depuis qu'il ne pleut plus et que le vent fait des siennes. Mon cerisier semble se foutre de la gueule de l'hiver, la guigne a eu ses flocons. Un filé d'eau arrive jusqu'à mes pieds, la dernière averse n'a pas était tendre avec les pollens.

Le ciel se couvre encore, il va falloir rentrer et laisser ces couples à plumes faire le plein avant la nuit. Moi mon frigo m'attend et mes livres à une brassée de ma couette.


Dans mon huis clos, j'ai une petite caisse en bois qui me serre de charrette à courses pour ma musique. Tout est aligné à l'étage et mes enceintes sont en bas. Je ballote mes disques dans cette boite en balsa, légère et belle. C'est un coffre joyeux d'abondance qui peut se la péter de véhiculer de belles choses. Elle peut contenir une vingtaine de CD, ça se bouscule souvent, le choix pour une journée. Elle est belle ma boite en balsa qui chante, elle est un rêve et dedans tous ces artistes qui se bousculent, ma boite à musique manivelle, mon limonaire portatif. Aucune règle, pas la peine de faire la queue, il y en a même qui ne passeront pas, ceux que j'ai pu écouter en boucle il y à quelques saisons. J'ai dans l'idée d'aller faire mes courses là-haut et d'aller prendre ce Manic qui vient d'être réédité. Je me souviens de cet opus introuvable dans l'hexagone, disponible à Londres et qu'un pote m'avait ramené, il avait fait les courses pour moi. « Know your enemy » avait pourtant fait ses preuves sur la planète en 2001. Le deuxième CD est hallucinant de bonus, pareil à « Know your enemy » Deluxe paru en 2022.

Coïncidence, je suis sur le doc Simple Minds. Glasgow ou Cardiff, Jim ou James Dean. Pourquoi les écossais me laissent de marbre, pourquoi les gallois m'enflamment ? « Lifeblodd » très classe avec un son puissant, moins saturé que son précédent.


Le couple d'oiseaux est rentré, je vais aller seul à l'étage, avec mon caddy en bois léger et sans roue. Outre le fait de ne pas piffer les couples en supermarché qui poirotent devant la caisse au tapis roulant en caoutchouc noir dégueulasse avec chacun sa charrette toute chargée de boites et de broc, je suis le seul à savoir où les ingrédients sont rangés pour une recette galloise hyper sonique aux mélodies british tranchées d'une haute voix pop, basse qui tape et guitares volumineuses. J'adore les Manic, post chef d’œuvre cet album est majeur. 

 



Manic Street Preacher 2004 « Lifeblood » / 2024 Deluxe 3CD sur Sony


vendredi 5 avril 2024

Matt Low 2021


 

J'ai pris un Thoreau par les cornes et j'ai vu le kayak qui comme un avion s'enlise dans cette grande partance toute chargée d'aventures au long court.

Moi-même je voulais sortir ce tantôt, puis au dessus de ma tète ce grand ciel triste à sec, comme une âme fatiguée d'avoir trop pleuré. Ce chagrin fou depuis des lunes invisibles et même l'année dernière à essorer les paupières de ce bougre plafond enlisé dans sa déprime.

Il fallait s'y attendre, au bout d'un moment les larmes sont à sec. Et pourtant la complainte est toujours au fond des glandes. La voûte tente de se régénérer, rétention des eaux, elle a une sale gueule quand même et je vais rester dans mes pénates. Je fuis la menace asséchée.


Du coup l'eau vient d'en bas et nos sols sont un giscle. Le pas mou, je ne sais plus où aller, alors comme d'autres matent l'eau, je décide de me suspendre ente deux eaux. Canapé, télécommande et bouquin. Au sec. Quoique. Je pagaie et rame, où vais-je ?

Juste avant de me décider entre plonger dans les « Sept jours sur un fleuve » de Henry David Thoreau, ou me remettre une énième fois « Comme un avion » de Bruno Podalydès, j 'écoute ma découverte du moment Matt Low. J'ai dû me perdre dans les méandres des artistes de par ici pour ne jamais avoir entendu parler de ce Matthieu là. D'autant plus qu'il a côtoyé à l 'époque le Murat de Babel (paroles de « Vert pomme »). « Caillou » dans ses chansons lui aussi.


La télécommande figée, une nouvelle fois j'écoute « La rueé vers l'or » et je me dis que c'est exactement tout ce que j'aime. Comment est-il possible que ces disques là n'apparaissent que lorsqu'on fouille éperdument ? Le groin aux aguets, tellement de fois bredouille.. je vais lire un peu, le deuxième jour du Thoreau, avant d'aller flotter vers Vimala et Agnès. Quand Matt se sera tu.


Le ciel n'arrive plus à pleurer tellement depuis des jours il a chialer sa race. J'ai de la peine pour lui.

À venir le 26 avril.. son nouvel album, en attendant...


Matt Low 2021 « La ruée vers l'or » sur Microcultures.

mardi 26 mars 2024

Clogs 2003

 


Près du Butin ensablé, la Seine s’emmanche. Du laiteux mou s’engouffre dans l’albâtre. La Manche n‘a que faire de l’océan, ici le bras l'agrippe. Plus haut sur la côte de Grâce, à coup cassé, les 24 cloches retentissent.

Le plissé de l'arrière pays en dit long sur l’humeur des nacres et du crachin. Le carillon comme un phare s’époumone. Sous le pont les navires n'entendent pas. Ils pataugent lourds et longent le grondement sourd des dockers juste en face. Dessus, les bahuts y vont et en reviennent. Je regarde cette huile beige épaisse et me demande bien ce qu’il peut y avoir comme poisson dedans, le taux de sel est la frontière. Quelles épaves aussi, englouties dans ce café crème. Plus en aval, le va-et-vient des remous comme une hésitation. Le sel ou le doux. Il doit bien avoir un endroit précis où l’équilibre est tenu.

La marée fait son lit, les berges attendent. Face au large, la vase du Butin respire une fois sur deux. Les bras de mer me fascinent. Celui-là crayeux et visqueux engloutit mes pensées. Toujours les mêmes tentatives de pénétration, puis cette même démission. L'afflux se gonfle et se dégonfle comme une molle respiration. Si le bras vient purger toute l’eau de l’homme, l'eau de mer pleure et prend tout. Lent débit des veines. Elle en déveine sans cesse tente de repousser et recrache.


Émeraude, Opale, Albâtre .. la côte Padma Newsome, Bryce Dessner, Rachael Elliott and Thomas Kozumplik, les Clogs révolus, des petites symphonies de poche en tableaux sonores. Ils composent cet accouplement des eaux, alangui et perpétuel. J'ai l'iode et l'humus sur mon museau.


Clogs 2003 « Lullaby for Sue » sur Brassland.

jeudi 21 mars 2024

Oisin Leech 2024


 

Pas de Camélia maquillant le granit, ni d'ajonc salé dorant les corniches, ici les candélabres jaunes jaillissent un à un du sol vert bouteille dégorgé.

Chaque année l'opéra des crucifères des plaines me mettent en contemplation. La moutarde monte au nez des champs, le jaune colza donne le coup d'envoi du grand débourrage. Tout sourde et tremble, l'impatience des cellules a pris fin. Hors l'humain dit-on, tout tend à se reproduire. Et des tableaux s'étalent des pieds à l'horizon, tout jute. La pochette de cet album est un nouveau réconfort pour mon cerveau.


Les cordes sont sorties, les ciels changent à chaque seconde, tout se charge d'ambition et un voile de délicatesse voltige sur le chant d'Oisin Leech. Drake et Jurado convoqués. Si les couleurs primaires prennent doucement le pouvoir, « Cold Sea » en songe folk acoustique embellit chaque lueur respirée. Oisin n'est pas tout seul pour faire fleurir ses mélodies. Steve Gunn et M.Ward accompagnent.


De grands verts tendres traversent la lumière, des nuances de rouge dansent avec le cadmium, le bleu est partout. Dehors rutilant, des nids se bedonnent, et le bal des insectes est ouvert. « Cold Sea » des contrées irlandaises est venu dans une merveilleuse coïncidence chanter les premiers colza et la fin de mes pages des fées de Tesson.


Oisin Leech 2024 « Cold Sea » sur Outside Music

jeudi 14 mars 2024

Windsor for the Derby 2002


 

Des jours entiers que le ciel nous tombe sur la tète. Je suis imbibé, le cerveau moisi et les articulations en mouillettes. Tempéré !! mes plaines en terre d’Écosse, le désertique après demain.

Ceci dit, après des brouettes d'heures à voir dégringoler des cordes raides, la fin d'après midi se dégage, éclairant du coup les heures les plus belles d'un printemps hypothétique. L'envie de me mettre bien du coup, et de me fondre dans cette pâle lumière féconde, peut-être la nuit sera un autre déluge.

J'ai sous le coude, un album sorti pour l'occasion. Et je pense à mon ami éclairé Le Toine tapi dans ses guet-apens fous et passionnés et qui dégaine son Magic ! à la moindre occase. Cette pop moderne en lecture que moi j'ai lâché depuis qu'ils ont quitté les promontoires.

Sans rien connaître de Dan Matz à l'époque, j'ai embarqué cet album sans réfléchir. Quelques longs temps après, il s'est incrusté. Pas emballé aux premières écoutes donc, je l'ai mis de côté à plusieurs reprises, sans pour autant boycotter son CV artistique. Birtdwathcher, puis son incursion chez Young Gods Records, ses albums solo et le sublime «Carry me over », celui-là j'ai ramé pour l'avoir. J'ai fouillé, biné, pris du recul, tout mangé, j'ai gravité autour de ce lancinant et doux disque que je ressors depuis comme un trésor, une retrouvaille. Il me reste certes la madeleine d'une certaine bouderie, mais la peau burinée des ages accumulés, je le trouve indispensable et fascinant. « The Same » et son injection vénale d'une percée molle ensoleillée entre deux masses de gris intense menaçant.

Du flou dans mes idées alors que dehors la myopie semble se dissiper. La brume se lève, la pochette familière respire.

Pas de refrain, une peinture, « Now I know the sea ».. « Emotional Rescue » pierreux pour les moteurs de recherche et un rythme qui s'accélère. Et que dire de « Fall of 68 »...

Des ondes asiatiques que je m'explique pas, des boucles, 2002..la grande époque de plein de choses, revival ou pas. J'avais du Low, Notwist et Arab Strap en découverte plein la tète. Celui-là je me le suis laissé de côté pour mieux l’apprécier plus tard, ou plutôt le chérir enfin, maintenant.


La pluie a cessé, j'écoute un vieux Windsor en feuilletant le numéro 62 du Magic ! de juin 2002. Focus sur Piano Magic, Faultline, Sonic Youth ou Avril.. le disque du mois : « The Emotional Rescue LP »


Windsor for the Derby 2002 « The Emotional Rescue LP» sur Aesthetics

jeudi 7 mars 2024

Yann Tiersen 1999

 


Des flots de café au lait ont envahi tous les cours d'eau. Les sous-bois sans-soif prennent leur part. Plus haut, là où ça capte, la horde d’hypnotisés rêvent d'un autre monde, les crétins digitaux déambulent dans le tintamarre.

Sur le cobalt, de grosses meringues flottent au dessus des arbres sans feuilles. L'horizon s'assombrit.

Clapotis laiteux, mes pas dans la terre grasse, ici tout est calme.


Sublime petit album rempli de monde.


Yann Tiersen 1999 « (Tout est calme) » sur Label


dimanche 3 mars 2024

Melanie De Biasio - 2023

 


Au fil des couleurs, une obsession, une en conducteur.

Ça a commencé avec la maison de Bill, crépi fraise avec une idée de chair à vif cuite par le soleil. L’inconscient tapé de teinte, une idée comme ça surgit, c'est pas la première fois ce déclic. Et tout s’enchaîne. L'intérieur pochette de Marion Rampal était rouge lumière nuancé, l'inconscient faisait son chemin. My Bloddy Valenine, mes tubes de couleurs, j'ai dû en rêver.

Au détour des berges du canal Louis XIV juste en bas de chez moi j'ai vu avec intensité des cognassiers du Japon, rives empourprées. Rien pour arranger mon obsession du moment. Rétine impactée.


Juste avant d'entamer ce week-end de printemps biologique, j'ai embarqué sans réfléchir le dernier opus de Mélanie De Biassio. Je la connais, « No Deal » et « Lilies », ses ensorcellements. Souvent passé devant cet opus pourtant, et ce geste précis sans réfléchir, je le prends sans regarder, cette pochette bourguignonne.

L'émotion fut la même. Ce rouge laiteux enferme la lumière, la retient, la dévoile en pâle nuage comme un souffle de lèvres fiévreuses.

Mélanie ? Elle dépose à travers ce double album improbable, le chemin migratoire et ses origines, de l'Italie ses racines vers la Belgique son identité civile. C'est troublant, introspectif, expérimental, une épopée que l'on suit, l'histoire des siens susurrée. C'est un paysage sonore planant avec sa sensualité, son émotion. Des clichés murmurés, des étendues à peine chantées, « Il Viaggio » embarque, tout sauf commercial, on pourrait lire son histoire, l'écouter et se laisser happer. Enivrant comme un post-rock de bruyère, une belle Hellébore de chair pourpre Mazzy Star .

C'est un beau voyage.




Melanie De Biasio 2023 « Il Viaggio »

jeudi 29 février 2024

Marion Rampal 2024


 

Elle tombera amoureuse de moi un jour, c'est pas possible autrement. Ou alors l'amour gerbé sert à que dalle.

Je le sais, c'est chanté, quitte à qu'on me l'avoue sur mon lit de mort, l'aveu pour mettre un terme à ses douteuses respirations. Les chœurs au fond, le chant à s'y perdre, toutes ces mélodies qui planent, les douces notes de piano comme des baisers discrets en rafales de petits oiseaux volages... c'est de la petite bière peut-être ?

Je n'ai pas couvert ma toile de lin avec du orange vif et du rouge lumière pour rien quand même. Le Prunus lui aussi s'est fardé du même rouge juste par delà de notre chambranle.

Cette touche de cramoisie n'a rien à voir avec mes doutes, c'est juste ma mélancolie empierrée, celle que tu connais pourtant. Tu peignais tes ongles ainsi, tes paupières pas loin, moi j'étais cramoisi. Tu le sais pourtant, que je ne suis pas My Bloody Valentine plus que ça, c'est une coïncidence. Le Shoegaze me fout dans le gaze, moi je voulais juste peindre le bout de tes mains. Te dire que je te longe malgré toi, mais tu ne vois rien.


Personne ne capte que dalle, c'est pas faute de hurler à la mort, d'où elle sort la Marion qui me trouble les artères depuis quelques jours ? Ça tangue au bord, je veux bien danser tous les dimanches, un de ces dimanche de tendre jazz folk chanté avec des mots d'ici, des canards, des zoiseaux, des constellations.. « Tangobor » me tue.

Je rumine tout bas plein de petites choses, entre les taies j'ai mêlé en boule nos pyjamas si jamais on se faisait cambrioler, il y aura flagrant des lits. Il y aura des traces absolument partout, comme cette musique que je badigeonne dans l'air. 


J'écoute en boucle Marion et je peins comme on change de vie, de palette. Matthis Pascaud à la guitare dans la plus lumineuse des délicatesse, aux manettes aussi. C'est une recette merveilleuse.

Je regarde son parcours, je visite, j'écoute avec intensité et insistance, peut-être vais-je rendre jaloux. Il y a quelques joyaux qui sortent en ce moment, je le garde près de moi adossé à la Cabane brûlée. Les rivières souterraines pour ne rien arranger. 

 



Marion Rampal 2024 « Oizel » sur Les Rivières Souterraines.

vendredi 16 février 2024

Nick Wheeldon 2024


 

Nick à pleurer, et tout commence dans un chant de douleur.

Le premier pas dans ce jour nouveau à peine allumé est tout chargé de pas grand chose. Il fallait bien cette grâce sidérante au bord du désespoir pour en mettre un de plus. Comment c'est possible de telles sublimes aurores, de douces ténèbres à peine essuyées soutenant les lourdes premières gorgées d'air. Moi qui voulais jouer les traînes-savates, c'est gagné, je vais rester ainsi à danser sans toucher le sol, éviter les tuiles essentielles.

Chaque chanson est une nouvelle louchée de larmes, « Waiting for the Piano to Fall » me tient par les baloches. Aucune trêve, jusqu'au bout ce disque me fige et « Gift » sonne encore dans mon crane.

Hymne des matins miraculeux, le fantastique dehors des paysages qui se dévoilent, je vous assure qu'il est possible de ne faire qu'écouter et contempler. Emballement des émotions, trémolo dans la voix, mélodies lacrymales, je vois des douleurs, des blessures et milles rayons de soleil. Le pou effiloché, prisonnier des routines je dévore la fragilité.


Les nacres ont disparus, quelques ombres font de timides apparitions, seul un merle semble jouer avec. J'entends un nuage de passereaux sans les voir, à quelques pâté de fossés d'ici la nuée cherche un lopin de champs pour affronter le vent toujours pas levé. Deux nuages rosis sortent de la brume, va pas faire un temps radieux aujourd'hui. Peut-être que le ciel aussi écoute cette musique qui enchante mon matin.


Nick Wheeldon 2024 « Waiting for the Piano to Fall » sur Modular ecords

mardi 13 février 2024

Bill Rider-Jones 2024


 

Sûrement l’histoire d'une pochette. L’œil s'est posé et tout s'est enchaîné. Un moment précis, en biais sur cette rue pavée, juste en face de ces murs chaleureux.

Je connais la chorale, Bill aussi, ici, du Sparklehorse dans ses veines, du moelleux de Granddady, des frères Nourrallah, un maquillage Elliott Smith... et cette petite fumée blanche pour montrer au soleil d'hiver que les murs luttent.

C'est un moment de plénitude cette balade dans ce village perdu vanille fraise aux ombres épaisses. Je vais faire le même tour en sens inverse, remettre l'album. L'oblique aura changé, les pavés vont suer la journée et il faudra rentrer avant que le vent mauvais nous grignote le naseau.

La trouée cobalt a ravivé les façades, et le chambranle ciel accueille.

Demain, ce sera pareil une nouvelle fois, comme d'habitude. Je repasserai comme tous les soirs par cette rue pavée avec en face les mitoyennes vanille fraise avant de redescendre vers la maison cachée de "Christinha" que j'aime retrouver quand elle le veut bien, quand elle m'invite pour prendre un café chaud et parler de rien à perte de vue. Elle a le visage anglais, on a dû valser sur « How beautiful I am », pas sûr. Déjà pas mal d'albums solo, toujours aussi envoûtants.Cette fois-ci, je reste de longs moments devant la pochette.


Bill Ryder-Jones 2024 « Iechyd Da » sur Domino

dimanche 11 février 2024

Felicia Atkinson 2019

 


Des axes, juste un point de fuite, la tronche qui batifole, une belle idée de mettre le quotidien en son.

Les cycles infinis et le rouge au flan des cimes empourpre la joue des montagnes. Tout tourne, demain soir l'accord aura pris du carmin sur la corde, une onde de cramoisie en plus, et toujours les reliefs se fardent.

La voûte cosmique de mon plafond bave de résonance, la réverbération sur tous les matériaux, cellules et minéraux me renvoie des voix fantomatiques, des soupirs agrippés à l’ellipse. Je tourne en rond, le son me balade, je suis avalé et j'écoute sans bouger.


Je me souviens du « Point de côté » de Dominique Petitgand, des bouts de phrases chapardées sur une marée de silence. Félicia aussi. Prononcer, psalmodier, murmurer à peine, juste histoire de guider le son, les effets et les nappes de notes lymphatiques comme des plaquettes tectoniques. L’œuvre de Félicia Atkinson est un monde parallèle, strictement réservé à l'écoute qu'on peut lui offrir à un instant précis. Abstraction du corps, lucidité des battements, contrôle des respirations, la veine en lombric et l'artère palpite.


C'est une amie qui s'invite dans vos rêves les plus endolories. Une ambiance, une couleur, « Un ovale vert » « L'après-midi », fermement ce coucher de soleil sur quelques chose qui perce l'horizon.

Les roches chantent, je me souviens aussi de la « Musique pour Statues et Menhirs » d'Arbouse Recordings en 2009. Les ciels aussi causent, les horizons bavassent, le jour qui tombe chuchote. Stephen O'Malley est venu avec Félicia parler « Des pierres ». Tous ces conteurs par le son.


Pax vient de se fendre d'un billet fantastique sur l'artiste. Elle est de par chez nous, plongeons, immisçons-nous dans l'univers de Félicia Atkinson. « The flower and the vessel » tourne en rond sans cesse dans mon acôlve et sur ces mots.


Felicia Atkinson 2019 « The flower and the vessel »

vendredi 9 février 2024

The Smile - Wall Of Eyes 2023


 

Mes touches de clavier tremblent, un flot de paroles dégoulinent depuis des jours sur la toile, tout est dit, débattu, dégluti et vomi, quoi écrire devant ce mur d'yeux perplexes prêts à bondir. A qui le tour.

Le travail sur le premier The Smile avait duré un moment avant que j'en devienne accroc. Cette fois-ci tout me brûle instantanément, toutes ces belles ondes qu'on lui connaît, qu'on leur sait, et même les guitares King Crimson de « Read the room » ou de « Under our pillows » m'attaquent le bulbe. Petit jazz en remugles Radiohead jamais autant mélodieux, je me suis assis subjugué. Pour écouter, puis déguster, subir et encaisser, adorer puis suffoquer quand « Bending hectic » a vrombi. Éjecté de mon siège, quand elle s'est arrêtée, je crois bien que je hurlais.

Recouvrer mes esprits sur « You know me ! ».


Quoi qu'il arrive, quoi qu'on en dise, ne boudons pas, ne négligeons pas la boucle, fine ou vulgaire.. tout ses yeux en abondance perpétuelle dans mes oreilles. Déjà tant de débats, des flots dans l'eau. Cet album restera.


The Smile 2024 « Wall of Eyes »

samedi 3 février 2024

Cabane 2024


 

Je me farde au pollen blanc du cyclamen. Un larsen grignote ma salive et le jour qui tombe embarque avec lui l'odeur de ma vitesse. Les pâleurs s'installent avec les ombres appuyées, j'ai dans l'idée la Soldanelle des hauteurs qui fait pleurer la neige de ses chaudes cellules. Et si un disque pouvait ainsi mettre minable une lamentable sauterie d'aigreurs. La décrépitude des milliers de visages déglace les accotements gris détrempés. À peine deux sourires tortueux et mon pas s'allonge. Grand écart sur les gens, je me faufile robotique et imperméable. Déjà la brûlure m'embrasse et la « Brûlée » me chiale la respiration. Mon crane est un édicule de Cabane, tout m'étrangle et plus je respire.

Plus aucune verdure, le noir a mangé les épines et la chlorophylle des murs. Seules les giclures d'électrons font briller des bouts de murs.

Tellement de promesses posées sur ces pièces noires de monde, des artistes à tire-larigot, elles sont tenues. « Brûlée » va me tenir des marées et des lunes, et plus encore. Thomas Jean Henri commet son deuxième chef d’œuvre. L'hyper beauté en rareté, un bijou à se procurer urgemment.

https://cabanemusic.bandcamp.com/album/br-l-e

Cabane 2024 « Brûlée » sur Cabane Records

mardi 30 janvier 2024

Pierre-Yves Macé - Sylvain Chauveau 2023

 


Des lumières de toutes sortes font briller l'aluminium et le platine. Des températures de part et d'autre éloignées du point zéro, le mercure en balançoire. On ne sait même plus si tout se dilate, si tout est polaire. Une petite chose semble sautiller, sable ou neige, moineau magnétique sous l’œil figé de la grande chouette.

La résonance trouble des acoustiques imprègne toute les émotions. La pointe d'une plume écrit l'histoire des âmes sur le minéral. Un monde ancien pervers et paradoxal fait écho sur quelques machines ondulantes. Le son est extraordinaire. Les éléments chimiques se renvoient les atomes, tout finit par fusionner.

Deux grands noms se percutent dans une danse organique, Iridium et Silicium, Chauveau et Macé, architecte et paysagiste sonores, l'échange s'étire à l'infini dans une matrice de silence argenté. Cuivres et cordes se dandinent sur de frêles ondes cybernétiques.


Sylvain Chauveau & Pierre-Yves Macé 2023 « L 'Effet rebond » sur Sub Rosa

mardi 23 janvier 2024

Nits - 1998


 

 Des éclats de rire au creux des dunes, les enfants dansent dans le sépia. Certains disques sont rangés comme des amulettes, juste adossés à de vieilles diapos.

L'oyat est foulée et le sable du temps dégouline. J'écume les souvenirs dans un doux coma, tout se recompose et Nits résonne en Alankomaat.

Le coucher de soleil est figé, des joues rosées me sourient, le sablier est un con. Des images sont punaisées sur la voûte, une vie en collage et des remugles à déguster. Les enfants ont quittés nos murs. Plus que la boite à chaussures en rétroviseur, ou le paquet de madeleines en douces dunes dodues, quelques beaux albums d'alors envahissent mon huis clos et du sable fin me coule sur les tempes.

Le blé d'hiver en petite houle de janvier, je rebrousse en dansant sur le flamenco fou de « Sister Rosa » avant de m'écrouler rassi et bercé par la mélancolique basse des « Three Sisters ».

1998 en plein sente, des idées de belles chansons toutes chargées d'amour et de manques me tournent la tète. Sablier interminable en hélice folle, je vais rester encore un peu suspendu avant d'atterrir.


Est-ce pour cela, que « Alankomaat » est ma préférence des Nits ? Y'a de ça, c'est sûr.


The Nits 1998 « Alankomaat »


samedi 20 janvier 2024

Roger Eno, 2023


 

Sur le cobalt pétrifié, un bouton sec d'hibiscus s'est hérissé d'une délicate chevelure de gel. Le gris détrempé a disparu, dehors la chambre froide ensoleillée parle de patience. Rien ne bouge, pas même la plus hautes des fines branches du bouleau. Les avions ne dessinent plus rien. Le glacis bleu se dilue et tombe sur la ligne horizontale. Quelles autres nappes Eno pour orchestrer cet instant.


Ces frangins là planent à 15 000, flottent et insufflent, Roger pas moins que Brian. Deutsche Grammophon s'est attendri depuis que les néoclassiques viennent changer la palette et ajouter quelques machines délicates. Max Richter et même Moby. Sous ces tuiles là, ils se sont à leur tour fardés de grandiose, de son extraordinaire. « The skies, they shift like chords » est un petit miracle matinal suspendu. La terre est raide, les buissons pleurent la montée du soleil, l’orchestre resplendit, c'est une grande et belle journée de janvier.


Roger Eno 2023 « The skies, they shift like chords » sur Deutsche Grammophon

mardi 16 janvier 2024

Astrïd - 2023



Derrière chez moi s'étend un arrière pays infesté par le vide. De longues plaines dévastées dominent quelques vallons courbes peu profonds, ils sont doux et silencieux. Une orgueilleuse ceinture d'arbres les démasque. À quelques buissons de chez moi l’étendue happe, il est possible à certaines heures creuses de la journée de n'y croiser personne. Ce moment précis où tout se met à chanter, sans voix aucune. Le paysage sonore qu'il faut aller chercher.

C'est la phénologie qui guide la mélodie, le Celsius la tonalité, le vent peut être cuivré ou argenté, qu'il glisse ou s'engouffre, les plumes d'or ou de plaintes...la lumière mixe.


Ce matin la respiration est pastel, le froid immobile a nacré les sons. Je suis allé fouler mon arrière pays. Le drone ankylosé, le son des champs engourdi, je me suis régalé de ce concert de cordes planantes et de nappes mélancoliques, braves et pénétrantes. Je ne suis pas loin de mon trou creusé quelques décennies déjà, à quelques charmilles craquantes de là, que le gel fait chanter. Je sais que derrière moi à bout de toits, Cyril Secq m'attend et qu'il a peint tout ça.


Astrïd chante mes paysages depuis que le Ruthénois Arbouse Recordings a laissé s'évader.


https://musicforastrid.bandcamp.com/album/always-digging-the-same-hole

https://www.facebook.com/astridmusique/


Astrïd 2023 « Always Digging the Same Hole » sur False Walls

Manic Street Preachers - 2004

  En couple les oiseaux, ça sautille sec sur la parcelle fraîchement fauchée. J'ai toujours eu horreur des couples qui vont faire leu...