jeudi 31 mai 2018

Bertrand Betsch 2018



De bien belles chansons.
Bertrand Betsch m'a toujours fasciné à garder une petite fraîcheur vocale pleine de sourire sourd en coin pour chanter des choses les plus sombres, tristes à tomber. Il faut dire avant tout que mon obédience générale n'est pas à la gaudriole.

Je revenais à Superflu 1997 en parlant de Fontaine Wallace, aussi, à chaque nouvel album du poète mélancolique BB, je fais toujours "la soupe à la grimace" dans un bonheur désespéré. 1997 aussi pour ce premier album, épique, culte, cellulaire et bouleversant. Ce n'était pas le label Village vert, mais Lithium, ça « Remué ».

C'est un sacré compagnon de route, sa discographie ne lâche en rien, ni personne, surtout pas moi. Ses productions s'accélèrent, depuis 2011 il est là tous les ans. Boite à rythme et petit clavier sont ici, fidèles, sa politique chansonnière bien vissée sur sa voix familière et tremblante. « Tout doux », mon cul, rien ne décélère, tout reste collé à la moiteur cendrée avec la même force, comptines pop, berceuses sombres, c'est le 12 ième album de Bertrand Betsh.

Bertrand Betsch 2018 « Tout Doux » label : microculture

lundi 28 mai 2018

Yvan Marc 2018



Vite un album printanier, l'été arrive vite.
Yvan Marc est un artiste de par ici dans la plus douce des discrétions malgré ses cinq albums. Sur mes étagères, il est rangé parmi les auteurs importants de par chez nous. Ce disque plus encore est extrêmement lumineux, « Nos Dimanches » est de très haute tenue. Ciselées les mélodies, attachantes les paroles, la grande maturité du chanteur qui aime les bois et la forêt se pose bien haut sur les grands opus hexagonaux de cette année. Quelle est importante cette forêt.

Adossé au creux d'un houppier de hêtre, je laisse les mots d'Yvan Marc me conter les secondes du paisible printemps, comme appuyé au mur d'un château en ruine à siffloter l'onde fraîche des marronniers des douves fleuries.

Vite, que le printemps chante avant la première pluie d'été. Vincent Baguian pas loin, Thierry Stremler, Frank Monnet, Alexandre Varlet, Bastien Lallemant.... Yvan Marc est de ceux là.

Yvan Marc 2018 "Nos Dimanches" label : label diff43


vendredi 25 mai 2018

Jean-Michel BLAIS



Nous n'avons aucune mémoire des paysages naturels originels, de l'horizon sans nous. Il suffit de pénétrer dans une parcelle de réserve forestière intégrale pour que notre cerveau soit plaqué d'une vision inédite. Troublant dépaysement. Huit cent ans sans aucune intervention humaine et par terre des restes de troncs d'arbres morts se consument lentement, se dégradent sous le lent travail des lichens, mousses, moisissures et insectes. Se passer de nous.
Elle est belle, majestueuse et suffocante cette étendue vierge tout près de Barbizon, là où les peintres sortaient leur chevalets en plein air, les artistes amoureux de la nature.

Il fut un temps où s''aventurer dans une forêt n'était pas sans danger, on ne foulait pas les fougères sans but ni obligation, sans risquer sa vie. Elles sont devenue absolument accessibles, avec pour seul risque les tiques. Le domaniale contrôlé est devenu squelettique, l'humus forestier s’appauvrit, va falloir qu'on s'affale un peu plus sur nos crâneries vaines pour que nos consciences réalisent et sentent un de ces jours.

Tout est dans nos paumes, il suffit de le vouloir, paumés nous avons tout entre nos mains. Et le son d'un piano résonne au beau milieu d'une forêt sans age.


Jean-Michel Blais 2018 « Dans ma Main » label : arts & crafts

mardi 22 mai 2018

Fontaine Wallace



« Et puis après on verra bien ».. un disque pour voir, des potes étudiants, un ingénieur et un prof qui montent un groupe à Lille, après on verra bien. Sauf que cet album là, c'est le premier de Superflu en 1997, il y a plus de 20 ans, c'était sur le label Le Village Vert, et qu'il est parmi la belle poignée poignante des très beaux albums de par ici, et au beau milieu de ma collection des disques qui me touchent particulièrement. C'est pas n'importe quel disque celui-là.

Dix après, 2007, c'est le troisième album de Superflu qui met fin au groupe, impossible de ne pas parler de ce passé là, à l'écoute de la voix de Fontaine Wallace, tout me revient et m'enchante à nouveau.
Nicolas Falez, c'est la voix, la guitare, les textes, le seul qui reste ici de la chaleur ultra intime des chansons, du timbre et des adorables petites histoire montées autour d'un minimalisme pop à la française du Superflu. Il y a eu « Tchin Tchin » entre les deux, belle confirmation avec dans les bonus, la merveilleuse reprise de Sheller, « Les miroirs dans la boue ».
Pop, ça l'est un peu plus ici sur son nouveau groupe, comme une touche british sur des chansons parisiennes. Mister Wallace est l'anglais qui offrit les fontaines à Paris.

La magie de superflu était aussi le duo de voix, Sonia Bricourt à l'époque. La magie opère toujours, mais c'est Cécile Beguery qui en plus de la basse vient accompagner le chant de Falez. Le batteur Ludovic Morillon a joué pour Luke, Prohibition et Nlf3. Fabrice De Battista tient les claviers.

La voix de Falez me rappelle à tout ça. On ne va pas se priver d'écouter des vieux albums incontournables. Ceci dit, Fontaine Wallace est comme un grand retour, et une excellente nouveauté.

Fontaine Wallace 2018 « Fontaine Wallace » label : microculture




samedi 19 mai 2018

Higelin 2007



Pardon, milles pardons, comment est-il possible d'être aussi con. Pardon T, excuses-moi Tman la toorsch tu l'avais dit, je me souviens, tu me l'as redit et j'ai laissé mes pensées téfals glisser sur ce disque fatal à tel point que je me demande si un jour je l'ai écouté. J'en chiale à passer ce disque en boucle. Même « Crocodail », le truc qui m'aurait un poil rebuté il y a quelques temps, quelques mois encore, m'enchante... tout dégringole magnifiquement vers « J'aime ».

Je garde le crocodile d'ail et je fonds littéralement sur tout l'album... « Ici, c'est l'enfer ». Je repasse ça indéfiniment, je ressasse et prend, je retourne à « Halloween », je descends à « Amor Doloroso », je me perds et je prends tout.
Particulièrement sublimes, les mélodies m'ont chopées, le son, les arrangements, le Jako quel salaud, hein mon T ?? il savait que les résistants ne résisteraient pas bien longtemps lorsqu'il allait se diluer, pied de nez malin d'un poète fou.. venu de l'au-delà d'un seul coup. J'ai des étoiles lumineuses au plafond, ma prison mentale s'ébranle … T, tu me l'avais dit... et toutes ces atolls qui nous attendent, des vahinés pour après.

Pas grave, quand on est con on est con.. et si le temps n'arrange rien à l'affaire, je me dis que dorénavant j'ai ce disque dans mon cœur, un truc qui resurgit, se révèle et se grave.
Il était là, à portée de rêve, à deux doigts d'oiseau de s'envoler vers toujours cet « Amor Doloroso ». Higelin est venu souffler sa rigolade avec son œil « 75 » que je connais par cœur et sa voix qui résonne.... « merde bonhomme t'as loupé ça quand même, t'es un peu con mon gars, vas-y écoute je te vois et je sais ce que tu aimes, et je t'assure ici c'était l'enfer ».

ça y est Jacques, je t'aime tel.


Jaques Higelin 2007 « Amor Doloroso » label : odeon


mercredi 16 mai 2018

Chilly Gonzales 2018



De passage à Chilly Mazarin, une fraîche connaissance le temps de prendre quelques affaires prévues, me sert un café dans son antre du deuxième étage d'un immeuble blanc et envoie sur son enceinte connectée à son téléphone, le dernier Chilly Gonzales.

De prime abord j'ai pensé à une vanne, un gros truc gras « eh oh, t'as vu j'chuis un ouf moi », puis je me suis dit que peut-être il se foutait de ma gueule, comme ça, pour me tester vu qu'il s'agissait là d'une deuxième succincte rencontre et que la première fois, les débats musicaux ont fusé à gorge déployée en groupe, avec lui au devant de la scène.
Bon, se gausser de moi n'a rien pour me froisser, au contraire, mais c'est mieux de gérer le soufflet histoire d’appréhender pour décontracter, détendre, fighter gentiment, voire transformer la suspicion en gausserie générale. Je suis resté un moment dubitatif, partagé tout en gardant une oreille sur le pianiste que j'ai déjà négligé maintes fois.
C'est pas trop ma came Gonzales, ou plutôt très partagé, je suis pas réceptif à son côté technique et sportif du piano avec bandeau de tennisman visé sur le front, même quand il joue délicatement comme Tiersen. Manque d'âme contrairement à Tiersen.

« Merci c'est gentil, je veux bien ». Il me ressert un café, le Chilly bien accroché à son suppo blue tooth. Si le mec fait des private jokes à passer des petites BO du moment pour faire genre et étaler la mise en ambiance adéquat associative, j'aurai préféré « Couleur Café ». J'ai même senti la bouffe comme un cabot qui bave à l'heure où le coup de chaud est général dans les rades, une arrière odeur de viande rouge pimentée et de haricots rouges mijotés, « aribaribariba.. ». Merde, Gonzales à Mazarin, le deuxième café est dégueulasse, il me prend pour un coyote ou bien... je suis peut être dans un cauchemar, muselé, sans pouvoir trancher.

Pis c'est chiant aussi ces musiques enfermées dans un téléphone, impossible de zyeuter les étagères pour voir en voyeur l'état de la discothèque de l'hospitalier. C'est un truc que j'adorais faire ça, avant, scruter les disques alignés chez n'importe qui. Là, rien.
J'adore le label No Format !, à tel point que je m'interroge sur la présence du pianiste sous ce toit là. Un passage chez Deutsch Grammophon, puis Gentle Threat que je ne connais pas.
Le mec revient, me donne la clé USB avec les démos promises, un groupe à lui qu'il a monté et qu'il veut déployer avec l'avis de tout l'alentour suite au débat musicale de l'autre soir...... Son visage n'a aucune malice, rien ne transparaît, ne transpire, je pense que je vais me réveiller, le Gonzales sonne pas mal bizarrement, je connais cet air, comme une reprise... des reprises.. il va me gonfler une nouvelle fois ce disque.. si je le réécoute. Peut-être est-il dans la clé USB.. le salaud... Je desserre les mandibules, « Merci c'est cool, je suis un privilégié d'écouter tes démos, on se voit très vite, je te dit si j'aime. A plus.. et ça sent super bon chez toi.. tu prépares un Chili Con Carne ?? »


Chilly Gonzales 2018 « Other People's Pieces » label : gentle threat

samedi 12 mai 2018

Angelo Branduardi 1976



Des jours entiers à me promener, dans mon hameau de jeunesse, je n'ai fait que errer, tout seul la plupart du temps. Je passais les cinq croisements de cette rue principale chevauchant mon petit vélo bricolé passe partout. La rue des cinq croix de par chez moi, je ne me suis jamais demandé s'il s'agissait d'une autre histoire que cet alignement de carrefours. Peut-être un vieux mythe religieux a laissé ce nom à ma grande rue interminable quand j'avais 10 ans. Au bout du monde j'allais quand il s'agissait de s'enfouir au creux du bois des cinq croix, après avoir passé la belle marre sauvage et le grand verger qui jouxtait la voie ferrée Lucé/Illiers-Combray, avec ses belles petites michelines qui fendaient la Beauce de son rouge coccinelle.
Toutes des journées habitées de promenades, jusqu'au grand château au pied duquel j'allais poser ma bécane pour une pause fraîche sous les tilleuls. Ce château était celui de l'eau, nos beaux phares des grands horizons beaucerons, ceux qui attirent les tracteurs à la grande marée et la nuée de corbeaux derrière à bouffer les lombrics. Le château d'eau de mon hameau sans altitude était à l'opposé géographique du bois, le point culminant des haltes de mes grandes aventures de minot.

Quand je rentrais, de ma chambre à l'étage de la maison, j'ouvrais ma fenêtre sur ce beau village Fontenay-sur-Eure à quelques encablures, qui plongeait sur la rivière, mon berceau, l'Eure. Combien d'heures de contemplation sans bouger, le temps qui se figeait fatigué par mon périple de l'après midi. J'allumais mon Grundig, sortait une galette noire à la belle pochette et je mettais un vinyle, histoire de finir cette pâmoison panoramique pré-adolescente en musique.

C'était une époque où une chanson pouvait rendre heureux, un air, un texte, du populaire qui chantait sous toutes les coutures et surtout qui embellissait nos radios. La liste est longue, j'écoutais beaucoup les ondes à l'époque.

Des chansons qui me soignaient quand je rentrais dans ma chambre à l'étage à regarder par la grande fenêtre ouverte sur la campagne et qui plongeait sur l'Eure, vers Fontenay. J'écoutais beaucoup Branduardi, Yves Simon, Maurice Fanon  bien loin des gars du quartier qui m'auraient sûrement charrié pour ça. Je mentais sur mon sac US, il n'était pas inscrit au feutre noir Branduardi, ni Yves Simon. Évidemment j' étais un cancre, on ne se ballade pas comme ça des heures sans laisser de côté les choses que l'on doit faire. La tète en partance pas loin vers les choses simples et vitales inconsciemment. J'écoute Brandu et c'est tout ça qui resurgit à chaque fois, ce temps qui s’arrête, une chanson qui injecte quelque-chose de bon et rassurant, des moments insoucieux, le cours ordinaire qui passe.

Comme je me retrouvais seul presque tout le temps et quasiment volontairement, je balançais tout dans les chimères, les utopies, et je refaisais le monde dans mon coin. Il était vachement bien ce monde là avec ces chansons qui embellissent le quotidien, et enflamment la réserve d'une journée toute chargée de rien, des rêves et des espoirs.
« A la Foire de l'Est » est le troisième album de Branduardi à écouter en français ou italien, conteur et poète unique. Tant de belles chansons dans sa discographie, « Le don du cerf » ici, celle qui chante les souvenirs d'un gamin qui errait.... chanson pour embellir la vie.

Angelo Branduardi 1976 « A la Foire de l'Est » label : polydor



lundi 7 mai 2018

Damien Jurado 2018



Damien Jurado est un pilier du label secretly Canadian, le tenancier dorénavant. C'est une transition attendue avec Jason Molina qui n'en finit pas de hanter nos platines, lui aussi hébergé par ce label important de Bloomington, lui et ses travaux parallèles, Songs:Ohia, Magnolia Electric Co et autres collaborations.
La carrière de Molina s'est arrêtée nette en 2013, pas le temps de devenir un autre pilier.

Jurado, c'est son passage chez Secretly qui m'a ouvert la voix, « Omaha » Lo-Fi bouleversant qui sent bon la croûte terrestre. C'était en 2003 sur « Where Shall you Take me ? ». La suite est une longue et belle fidélité.
L'effet Jurado c'est un peu comme l'impression Tindersticks ou Lambchop, Staples et Wagner dans la voix particulière et familière, et ce magnifique mariage du folk et de la soul dans leurs plus belles discrétions. Acoustique chaloupé.

Il aime les étendues de ses contrées, il le raconte habité, transmettant toute l'émotion épidermique d'un amoureux des terres, cartes postales sonores, doux moments de recueillements.


Damien Jurado 2018 « The Horizon Just Laughed » label : secretly canadian


dimanche 6 mai 2018

Songs:Ohia 2001/2018



Sortie d'outre tombe, le flamenco macabre de Jason Molina pleure sur un Ep perdu dans les ténèbres. Aussi sombre que « Ghost Tropic », « Travels in Constants » commence comme le finish de « Oh well ». Seul comme jamais cette pièce unique de Songs:Ohia arrache les tripes. Blues mortifère, folk slow core qui prend à la gorge, il faut attendre le crépuscule pour se laisser dévorrer par ces deux morceaux … ne pas lâcher l'idée du noir.

Songs:Ohia 2001 « Travels in Constants » label : temporary residence

mardi 1 mai 2018

Johann Johannsson 2002/2018



C'est un album posthume, il y a peu de temps ce grand artiste néoclassique islandais a pris le large. « Englabörn » est son premier album, sorti en 2002, il commençait à travailler sur sa réédition. Quelques proches artistes de son entourage sont venu créer des variations autour de cette somptueuse pièce d'une discographie dorénavant close.

Il est des meilleurs dans ce domaine, le néo-classique que Deutsche Grammophon a décidé récemment de mettre en valeur, comme le bouleversant « Orphée » en 2016. Il a composé beaucoup de musiques originales pour le cinéma, c'est un style parfait pour le 7ème art. Ici revient le bleu absolu de la grande étendue océanique que son âme surplombe. « Englabörn », indispensable disque de musique classique.

Johann Johannsson 2002/2018 « Englabörn & variations » 
label : deutsche grammophon

Thomas Köner 1993

  La croûte gelée se ramollit, ventre flasque et tiède respiration. Le ciel se charge de l’halènes des Steppes, le silence gronde. Notre ...