Thrill Jockey est un extraordinaire
label indépendant New Yorkais bâtissant un catalogue solide depuis
1992, et couvrant à peu près tous les styles musicaux.
Ils ont été les représentants de
quelques groupes rares sur la planète. Le Japon en particulier, avec
ce formidable collectif féminin psychédélique et tribal OOIOO.
« Kila kila kila » 2004 est le premier album d'une
discographie de cinq opus. Des allures de Red Hot, de Santana, un bon
grain de folie à la Gang gang dance, du Blonde Redhead période
rock, un album jazz rock époustouflant qu'elles auront du mal à
dupliquer par la suite. Un moment particulier et unique, cosmique,
libre et ludique. Un album EXQUIS :D
OOIOO 2004 « Kila kila kila »
label : thrill jockey
Les arbres s'imbriquent comme un puzzle pour étendre sa marée de feuilles. Clarinette, harmonica, guitare, banjo, sruti box, piano préparé, harmonium, grosse caisse et percussions. Tout s'élève vers les rayons solaires. Des strates de notes vers les sommets pour capter l'énergie, la lumière. Canopée sonore, le monde en dessous n'est plus le même.
L'immatériel évaporé, de la buée, émanation de fumée, un certains vertige éthéré. De l'eau, de la transparence. Des hauteurs.
« Où que nous soyons, ce que nous entendons est essentiellement du bruit. Lorsque nous y prêtons pas attention, cela nous dérange. Lorsque nous l'écoutons, nous le trouvons fascinant. Le son d'un camion à 50 miles à l'heure. Les parasites entre les stations de radio. La pluie.
La musique édifie, car de temps en temps elle met l'âme en opération. L'âme est ce qui rassemble des éléments disparates, et son œuvre vous emplit de paix et d'amour » (John Cage)
Dans les arbres vit un quatuor de jazz expérimental. Ils ont édifié une cathédrale sonore forestière, celle des hauteurs. Magnifiquement irréel, la sève grimpe jusqu’en haut et rayonne en jeu conjugué.
Dans la balance, il y a Moods muselé et Neil Young au sommet de son art. J’écoute « Psychedelic pill ». ……. Comme une rage qui gronde, des morceaux de vingt minutes comme pour gueuler plus fort, faire durer le débat.
85 minutes de pur jus, la nique à toutes les discographies. Un étendard. On pourrait écouter ça et rien d’autre. Formidable jeunesse éternelle, une vision impeccable d’un art que l’on suit depuis des décennies. Moods disparaît, Neil Young est toujours là.. j’écoute « Psychedelic pill » avec la plèvre en folie et les larmes aux yeux .. pour deux raisons. Rage, passion, colère, acharnement..
Bien plus que le disque de l’année…. « And now.. DRIFTIN BACK…. »
« Les nuits » comme un
hymne noctambule à la voûte dégagée, juste avant le flamenco
imaginaire et vaporeux de « The rising sun ». Jamais la
nuit, les lumières n'ont été aussi belles. Puis cette divine
descente, cette superbe dérive « The Eiffel tower »......
que l'on contemple d'une Pizzeria .. « The
pizzeria », comment peut on écrire une telle mélodie.
La pop très enlevée de « Doing
dishes », l'évidence Beatles/XTC/Dylan et la sublime envolée
« Flowers », et « heart » façon JJ Cale.
Exotique et sexy « Aquarium »
sur le bariolé « 1974 »... « Welcome back »
qui convoque les vision pop de Jeff Lyne.
L'hyper classieux à la production
sucrée, des idées d'Amérique classique jazzy, «Wools ».
Et l'on se laisse glisser sur les cordes et les chœurs de « 26
A (clouds in the sky) », avant de partir loin sur les cordes
arabisantes de « Crime & punishment ». Étourdissant.
Comme le doux gospel de « The wind, the hain »...le grand
plongeon dans « Swimming » et le sublime tango mou « The
strawberry girl ».
Puis on se souvient de ses « Three
sisters », du tribal « H.O.M », et toujours cette
lumière qu'ils possèdent « Light » quand on entre dans
la maison de Jacob. Nits, « Soulman » quelquepart, la
soul pop, celle qui tangue et bat dans les veines.
Et toujours « Malpensa »
qui revient en boucle depuis qu'il est sorti cette année. A coup sur
l'album pop de l'année... rappelez-vous....toutes ces portes du
périphérique, comme une consécration avec toutes les choses les
plus subtiles.
Tout ceci n'est pas le tracklisting du
prochain concert des Nits à Paris, mais le fidèle voyage à travers
lequel je visite les multiples facettes de ce groupes unique.
… « The Eiffel tower »...
ils seront le jeudi 29 novembre au café de la danse à Paris.
Nits est un trésor qu'il faut
débusquer, rares seront les affiches sur les murs métropolitains.
Je ne connais pas la liste des
chansons, j'y serai, je veux y être. C'est pas tous les jours que
Nits est en concert à Paris.
Une consécration mondiale après un
thème de quatre albums en solo, un casting imparable (Manu Katché,
Bill Laswell, Nile Rodgers, Stewart Copeland, Laurie Anderson,
Youssou N'Dour, Kate Bush, Daniel Lanois..) pour une consécration
tout simplement. Sommet riche en couleurs, rock atmosphérique et
world. Une pochette qui marque l'époque, une diversité maîtrisée
pour une plaque tournante dans sa carrière. Avec cet opus 86, Peter
Gabriel tourne définitivement la page de Genesis. Album parfait, des clips géniaux,
énorme succès qui lui servira à construire les murs de son
beau label World music...et surtout, la plus belle chanson dans mon classement perso: « Mercy street ».
J'ai quand même trouvé, dans cette
décennie où je cherchais en vain un disque refuge, mon étendard
80's, même si j'ai compris à cette époque là, que je ne serais jamais avec Kate Bush :D
« So » sort ces jours-ci
pour les 25 ans anniversaire. Une remasterisation remarquable du son,
un coffret avec dedans le concert inédit de la tournée de « So ».
Athens octobre 1987.
Peter Gabriel 1986 « So »
label : EMI
échelle de richter 9
support cd
après 1000 écoutes.
http://petergabriel.com/
Une jolie pop bancale vernie d'une
embellie, une certaine idée de fraicheur et de légèreté qui
s'accroche à une mélancolie allégée. Cette tendresse est un doux
rêve originalement fleuri, du pollen fou et scintillant qui
s'échappe et se dépose un peu partout.
Un premier album hébergé par Blue
Sanct en 2006, Caethua est parti se réfugier en Australie chez
Preservation records. Les idées sonores traduisent un minimalisme
tremblant au sein d'un monde fantastique comme pouvait le faire
Broadcast, ou Pram, en plus introverti. Le rythme est vaporeux, la
voix androgyne, tout est retenu timidement, délicat et gauche. De
volages cuivres graves déposent quelques touches de terre de sienne
brûlée.
Un disque touché par la grâce
imaginaire « No man's land» (album crème), un deuxième folk
« Into the dog-dayed night » (album gris), guitare/voix,
intime à souhait, proche de Cat Power période « You are
free » ou Laura Veirs. Caethua, c'est Clare Adrienne Cameron
Hubbard.
Une folkeuse doucement folle.
Véritable enchantement, introspection
de pop souterraine... en plus du design pochette unique du label
Preservation, avec des pliages, des cavités cartonnées. Un manège en bois, baroquiolément enchanté. Une femme. Une artiste.
Caethua 2009 « No man's land /
Into the dog-dayed night » label : preservation
La nuit polaire, « The rustle of
the stars » est beaucoup lyrique, plus ensoleillé, le soleil
de minuit. Un point de non-retour, des rêves d'Egdar Allan Poe, des
passages étroits, un néo-classique glacial et beau, de légères poussées post-rock, toujours saisies par le froid.
The rustle of the stars est un
phénomène d'une beauté austère, le « bruissement des
étoiles »... le bruit blanc qui chante la collision entre les
micro-cristaux de la glace dans l'air. Et la guitare flotte dans un
air capitonné par le mercure qui dégringole « drawing lines
to the end of the world ». Respiration humaine, lenteur des
déplacements, craquements de la banquise....
Une autre bande son glaciaire, un
voyage immobile pétrifiant.
Un autre jazz tarabiscoté, celui d'une
artiste cette fois-ci, une pianiste chanteuse américaine qui fut
propulsée dans le monde du jazz en épousant le bassiste Gary
Peacock.
Une discographie charnue, un label
(Ironic), et surtout une vision folle, une façon libre de faire du
jazz. Cette femme sensuelle pioche dans le R'n'B, la soul, le jazz,
le rock, le psychédélique.. sa voix modulaire est distordue et
puissante, elle s'amuse à la rendre robotique en gérant elle-même
l'électronique. Elle a tout écrit et composé. Artiste accomplie,
icône 70's, un sex-appeal, un grain de folie, une réédition
précieuse assurée par Light in the attic (celle qui ressuscite LeeHazlewood). Puis entre chaque délire expérimental, une balade, avec
toujours ces petits feux follets sonores qui font l'identité de
« I'm the one », deuxième album d'Annette Peacock.
Une contagion, celle de Pascal à
travers lequel, j'essaye de combler mes lacunes jazz.
Fantastique album.
Annette Peacock 1972/2012 « I'm
the one » label : RCA/ light in the attic
Jazz blues cubiste, un peu comme si
Vincent Gallo venait percuter les studios d'Ummagumma. Libre,
cérébral et complexe, l'architecture bizarroïde de « You are
always on our minds » injecte une expérimentation
psychédélique à la Santana, Wyatt ou Miles Davis, avec des
apparitions vocales de blues théâtrale façon Tom Waits ou Red. Un
batteur fou donne la réplique à un piano perdu, et le bassiste
mathématiquement sportif rivalise avec une guitare alcoolique.
Quelques unes des 17 plages frôlent la
folie pure et pourraient faire un séjour du côté de l'asile Beta LactamRing. La pochette quant à elle, rappelle une caricature fauve animée
du film culte « Dune ».
Complètement intéressant, avec des belles
crises tribales, le nouvel album de The hand to man band est un bon
trip dégingandé et jouissif.
The hand to man band 2012 « You
are always on our minds » label : post consumer
Plus de post-rock, plus d'éruption,
tout est débranché. Tout est à plat, ne reste que les plaines
brumeuses et boueuses, des gris, du détrempé, de simples petites
touches d'ocre réchauffent timidement, comme un foyer qui agonise.
Quelques bois viennent rompre l'horizon complexé. L'homme n'est
plus.
La moiteur et l'absence de vent sont
suffocantes, la pilosité se charge de la rosée des brumes, comme
ses grasses toiles d'araignée que le brouillard dévoile. Un lièvre
sort de son terrier, aucun chasseur n'a survécu à l'étendue. Le
blé d'hiver empêche mes croquenots boueux de s'enfoncer dans le
limon mouvant. Marcher loin, chercher l'éclaircie, un rayon, une
percée de cobalt et s'assoir sur une roche de champ que la herse
contourne. Se permettre cette solitude incertaine étourdis par les
vapeurs cendrées, et grisé par les parfums de la terre alourdis par
les gouttelettes microscopiques.
Les notes de piano font la lumière,
les cordes le contraste, il faut repartir, le froid s'empare de
l'humidité et le gris se salit. L'ocre s'est dissipé et la solitude
reprends son pas, comme le plus fidèle compagnon.
Les disques du soleil et de l'acier
2005 .... Beckie Foon (de Constellation) au violoncelle, Rachel
Levine à la mandoline, Spencer Krug au piano/accordéon. Trio
canadien pour une rencontre unique, un trio néoclassique automnal.
Fiths of seven « Spry from
bichter anise folds » label : DSA
La forêt a surgit du terreau, les
moulins n'ont plus de vent. Les ailes sont mortes et la rouille ronge
les arbres. Rêve d'automne. Un siècle que la meule de pierre n'a
pas écrasé le grain.
Le soleil tiède moite et inespéré
perce enfin. Lumière dominicale douce et lustrale. Vite un bon
disque de soul.
Syl Johnson, un grand blues man soul à
l'ombre des célébrités du même genre, dont Al Green dont il
partage le même label ( et pourtant bien meilleur à mon avis).
Assez méconnu, je plonge dans un album
secondaire, mais tellement bon et chaud avec une touche de sombre.
C'est pas sa meilleur vente, c'est un collector.
Millésime..dominical, timidement ensoleillé, grisant,
sentimentalement humide.
Syl Johnson 1974 « Diamon in the
rough» label : HI
Rien à faire, aucune touche de cobalt
ne perce cette chape grise qui chiale depuis des jours. L'énergie
Prince s'est diluée en léthargie délavée. Une douce démission.
Leny Escudero, c'est un peu
particulier, c'est la bande son minot, des idées que je me suis fait
de la peinture à l'huile.
Un auteur maudit le poing en l'air, pas
toujours d'accord avec ses confrères gueulards. Brassens brandit
« Mourir pour des idées ».. Leny lui rétorque « Vivre
pour des idées ». Mourir pour des idées, c'est plutôt un
accident pour lui. La guerre d'Espagne, les montagnes de la
Guadalajara.. La milice gantée à cravache menace la vie de son père
qu'il sauvera parce qu'il ne sait ni lire ni écrire. L'exil.
Leny après avoir côtoyé les étoiles
du monde yéyé entre 1962 et 67, accumulant les succès et les 45T,
est parti faire le tour du monde, pour rompre et fuir. Fuir et
revenir avec une autre discographie. Celle des 33T et des ventes
amoindries, une image de rebelle en colère, un auteur compositeur
maudit. Des injustices, des histoires d'amours et d'hommes, de
l'histoire et une enfance qui remonte dans la gueule dès qu'il faut
défendre.
Il revient avec « Escudero 71 »
et empoche le prix Charles Cros, puis sort ce que je considère comme
son plus bel album « Vivre pour des idées » 1973. Cet
homme est debout, fier, son regard transperce et sa présence sur
scène ravage. Cet homme est beau.
Le gris après-midi s'alourdit,
s'épaissit, le carotène naissant s'éteint. J'écoute Leny Escudero
et j'ai envie de prendre les brosses. Dehors les grosses herses
retournent.. des corbeaux comme des goélands derrière un chalutier,
dévorent les lombrics énormes. Quelques jachères relèvent ces
terres de sienne brûlée.. « terre morte je t'aime ».
Un disque pour le samedi matin,pour
injecter du carburant après une semaine de taff, histoire de montrer
que toute l'énergie n'est pas bouffée. Un disque pour pousser vers
le haut les tonnes de flottes qui continuent à s'abattre … nous on
aime pas quand le ciel nous tombe sur la tète.
Il manque toujours une pièce dans la
discographie généreuse et mal foutue de Prince, l'homme mystère
sans site. Une autre visite récurrente dans ses bacs et je suis
tombé sur « The Vault.. ». Une pochette tellement
hideuse qu'on dirait une vieille compile de supermarché. Et pourtant
dedans, c'est, comme d'habitude gigantesque. Très jazz, Prince
semble prendre beaucoup de plaisir avec toujours cette sensation de
facilité et d'intelligence pétillante.
Bon, inutile de dire que j'ai eu les
gros yeux de mon ado fan de Michael !!! J'ai juste eu le temps
s'esquisser un alibi qui se tient pour justifier ma transe et ma
« trahison ». J'aime le blues et Prince, contrairement à Michael, est un excellent
bluesman. « 5 Women » déhanchait ses accords, terrible,
torride, c'est bon le blues balancé par un soulman.
« The vault.. » 1999,
facile, excellent, soul, funk, disco, jazz, blues.. le ciel semble
s'éclaircir ???
Le post-rock est cette fois-ci
néoclassique ténébreux, arpèges anthracites et rythmiques
plombées. Ça vrombit calme, avec de puissantes irruptions de
guitares. Du slow jazz de plaines grises, du rock ambiant minimal
viennent se poser sur des complaintes en lignes de violon. Tout y est
chez The pirate ship quintet... quelques panoramiques brumeux de
cordes classiques, et des cris de colère qui jaillissent
d'outre-tombe … guitare/basse/batterie... et violon, avec une
touche de gothique sur chaque envolée sonore... nous sommes chez
Denovali.
The pirate ship quintet 2012 « Rope
for no-hopers » label : denovali
La grand retour du post-rock ? Juste avant la réapparition du Godspeed, une autre entité du rock qui gronde sur des étendues est revenue nous parler d’envergure. Mono sort un nouvel opus fidèlement abrité par Temporary residence, un voisin artistique de Constellation.
Plus mélodieux cette fois-ci, plus proche de la surface terrestre. Cinématographique même, avec de grands espaces symphoniques. Quelques airs de guitares rappellent Mike Oldfield et la plaine crachin Sigur Ros. De l’érosion et des embellies. Une patine de cordes lyriques qui donne de la lumière au post-rock rugueux qui a fait la gloire du collectif japonais né il y a dix ans.
La clé de contact prête pour le grand
vol. Un bail que le zingue n'avait pas vrombi, que le moteur n'avait
pas pulsé ses tour-minutes. Et pourtant ça démarre au quart de
tour, la mécanique bien huilée. Bâché, rangé, garé dans le
vieux hangar, le beau Dakota 87 loin du train du soir, sort ses ailes
reluisantes, le moteur est nickel, toujours aussi puissant, l'hélice
aussi ferme, prêt pour les envergures et les hauteurs.
Vitesse fulgurante, lente ascension
vertigineuse, chute tétanisante, le cœur de la machine s'accroche à
la carlingue, rien de défaille, la pression artérielle maintient le
cape. La syncope guette, les cordes sont tendues comme des
convections suffocantes, les tempes battent mais la veine tient bon.
Longtemps que nous n'étions pas monté aussi haut. Jusqu'à
l'apesanteur.
Pas besoin d'hélium, d'aéronef ou de
capsule pour une telle expérience, peu importe la stratosphère et
les hauts budgets inutiles, l'onanisme scientifico-médiatique... A
quoi sert d'aller ci haut pour ne rien voir, ne pas prendre le temps
de regarder, si ce n'est pour contempler les reflets bleus, la
texture des nuages, le noir galactique et l'appel de la
brume....rester à bouffer des yeux cette opportunité panoramique et
oublier l'exploit et la technicité.
Godspeed est là, de retour pour nous
montrer le galbe de l'horizon, sa fesse bleutée et ses nébuleuses
blanches vues d'en haut. « Allelujah! Don't bend! Ascend »
est un nouveau voyage immobile, strictement vertical. Celui de monter
là où il n'est plus possible d'aller depuis qu'ils ont rangé le
vieux zingue GYBE dans le hangar. Une décennie sans toucher les étoiles,
avec ces longs moments contemplatifs avant la chute libre. Le
protocole est simple, se coiffer d'un casque Hi-Fi et tourner la clé
de contact « play »... et c'est parti... c'est reparti.
L'équipage ?? le même..Amar, Bryant, Cawdron, Menuck, Moya,
Trudeau....... ..le voyage ? Pour tous.
Difficile d'aborder un tel artiste, de
trouver des mots pour traduite l'émotion injectée à l'écoute d'un
vinyle de Bertin. Comme une balade un dimanche après midi gris, dans
un parc. Borelly. « Jets d'eau, jeux d'oiseaux tranquilles,
acte petit jeté aux oiseaux... ».
Le temps imbécile, la terre, toujours
une terre qui colle aux semelles. Des granges, des tonnelles, la
pudeur des sentiments divulgués, la tristesse dans une chanson,
comme un bateau mort sur un fleuve... Un fleuve. Paroisse, rivière,
des chansons comme des paysages, des prairies avec des fêtes
étranges. Un tourbillon de personnages au milieu de remugles
d'enfance. Des douleurs et une humilité à faire pleurer. Dandysme
romantique en sentiments purs et forts, mourir aux genoux d'une femme
très douce.
Jacques Bertin depuis 1967 offre sa
musique très loin du brouhaha, sans concession aucune, à bichonner
de torrides et fidèles passionnés...loin très loin du tumulte.
Des textes poignants et attachants.
« Le grand bras, les îles... »
et je voudrais redevenir cet enfant qui passe.. de longues promenades
au bord de la Loire, faire le tour de l'île d'or et sentir les
peupliers géants. Ce lit merveilleux, ces remous..la paix.
Un accordéon à Chalonnes. Des
couleurs. Toujours du calme. Un soir d'automne, le dimanche. Du
blanc, du vert, du roux et du gris, des tètes penchent... un orgue
mélancolique et d'éternelles chutes de feuilles.
Pour l'instant, c'est ma Beauce et
l'horizon bouché. Des tonnes d'eau dégringolent, une caisse de
disques chutent dans mon cerveau, viennent épouser ma léthargie.
Recueillement, à la pointe nue de l'averse ma mélancolie.
J'ai retrouvé la date du concert de
Leny Escudero, là où j'ai rencontré Renaud, du Leny contre du
Bertin/Corringe. C'est en fait le vendredi 2 octobre 98. On s'est
perdu de vue, il me reste toutes les bandes chrome avec les vinyles
dessus.
Merci Renaud jadis, merci la pluie
aujourd'hui.
« Je suis l’âme de tout le monde et je suis toute l’âme
du monde : la braise qui dans la soute chante. J’ai transformé
le vieux doute en voilier je suis l’oiseau blessé qui ne
tombe jamais »
L'écluse est ouverte, les albums
défilent comme le déluge de la voûte plombée. Hémorragie
automnale, tout y passe, de Corringe à Bertin en passant par Vasca
et Beaucarne.
Le temps s'arrête sur la mémoire des
roses, petite comptine médiévale romantico-mélancolique.
Julos Beaucarne est l'emblème de la
poésie chantée Belge, écologiste, comédien, baladin engagé,
sculpteur, il a beaucoup œuvré pour la francophonie (il chante en
Français et en Wallon et s'est beaucoup rapproché du Québec).
Julos Beaucarne entre montage, chansons, révolte, tendresse, humour,
monologues.. et une colossale discographie (quarantaine d'album dont
le dernier vient juste de sortir).
On s'arrête en 1975, sa compagne vient
d'être assassinée par un déséquilibré à la chandeleur de cette
année là. Un album profondément troublant, plus que les autres
évidemment. Et puis dedans, il a « De mémoire de rose ».
Bucheron des villes, Corringe a détruit
ses premiers enregistrements. Sabotage, autodestruction, punition,
beaucoup de poètes coléreux comme lui se sont abîmés à vouloir
gueuler bien haut. Muselé par l'indifférence, Corringe s'est
naufragé la tronche sur son art rejeté, comme un Fanon, un
Léveillée... la voix Lavilliers Ferland Dassin de timbre puissant à
la Ferrat.
Garagiste aussi, restaurateur, Beatnik
d'ici, ce mec est un vagabond volontaire, dont « La route »
est le point discographique culminant. Un peu de tout ça dans ce
disque, plus tard c'est Roda-Gil qui lui écrit quatre chansons, ici,
c'est Danyel Gérard. Nous sommes en plein dans les grands crus de la
chanson française pure souche seventies. L'identité profonde.
« It's raining like a vache qui
pisse », le goût des autres, je reviens de dehors avec mes
godasses boueuses, des bûches plein les bras. Le foyer crépite pour
la première fois cet automne.. du gris à n'en plus finir.. « la
tète en vrille »..la « tète vide »..la tète
grise. Crever comme un chien, tout seul, pour aller retrouver les
siens.
1970 un grand classique « La
route ».. un disque improbable, incroyable, témoin d'une
époque franchouillarde millésimée. Il vase, ça crépite, ça
gueule, des tranches de vie d'un pays où le « malheureux est
roi ».
J'ai découvert Corringe en 1999,
j'attendais dans ma voiture l'ouverture de la salle de concert. Dans
le poste à cassettes gueulait Lenny Escudero, « La planète
des fous » avec des 45T enregistrés. Un autre fou à tapé à
ma vitre pour me demander éberlué la provenance de ces chansons
inédites en 33T. Nous avons parler d'artistes français pendant des
heures, je lui ai filé les Escudero inédits (K7 enregistrée)..il
m'a proposé Corringe et Bertin, toujours en cassette. Quel cadeau...
Je me suis rué sur l'édition CD 2008
de « La route » (« Les paumés » à
l'époque), une pochette grise avec son chien... « Les Saintes
Marie »..Lenny aussi a chanté ça.
Michel Corringe est un fou furieux
baladin extraordinaire.. l'histoire du « petit gars ». Merci pour l'aiguillage Jeepee ;D
Michel Corringe 1970 « La route »
label : magic records