C'était déjà une riche
année toute noyée de lymphe et de salive lacrymale, Mount Eerie,
Nick Wheeldon.... ce Simon Joyner, c'est abuser.
Tout est gelé ce matin,
le nacre appuyé du bleu pétrole me ravage. Ma plaine est un
hématome. Sûrement je vais aller lui pommader la couenne quand j'en
aurai fini avec mes œufs brouillés. Il faut aussi que je trouve
mes grolles.
Je n'ai jamais vu autant
de stries dans le ciel depuis qu'il est éclairé pas en-dessous, on
pourrait flair des mots croisés dessus, va falloir ralentir sévère
les enfants.. ouaih c'est vrai on s'en fout, c'est foutu, les
carlingues sont déjà commandées.. crève.
Je suis chaussé, je vais
aussi aller faire de la buée avec ma bouche en foulant ce limon
violacé, puis j'irai me faufiler à travers le petits bois de
bouleaux argentés.
Tout est devenu pastel en
quelques minutes, rien n'a dégelé, les stries se sont aplanis comme
des nuages d'altitude, c'est vachement bien foutu, on dirait un voile
qui se gausse et toise ma brume des petits chemins qui a bouffé la
vieille colline du village voisin. Ils sont beaux ces bouleaux pâles
qui blanchissent les nuits étoilées, il ne manque plus que la neige
pour les épouser. Ce petit givre fera l'affaire, il a talqué pour
quelques instants ce fugace crépuscule qui chante le « Coyote
Butterfly ». Quel nom d'album !!!
La terre brune commence à
coller, il est tant de rentrer pour un café chaud. Simon Joyner de
saison s'est fendu d'un opus de bois et d'écorces pour chanter les
chatons qui se balancent à peine dans cet air vain sans vent, plombé
par ecchymose d'un pâle mercure. Le soleil sent l'arnica, je
fusionne avec cet artiste et ma bouilloire qui me siffle du bec.
Simon Joyner, après tous
ces sanglots rageux de beauté ankylosée cette année ?? c'est
abusé..ou pas.
Simon
Joyner 2024 « Coyote Butterfly »
sur BB*ISLAND
Il chantait
« Mademoiselle Liberté » avec Berry en 2011. J'avais
ramené cet album sans rien connaître de Vincent Liben, pas même
qu'il avait un groupe du nom de Mud Flow. En Belgique, il résonne
quelques groupes comme ça qu'on a tendance à oublier un peu vite..
Venus, dEUS, Girls in Hawai, Sharko....
Pourquoi cet opus 2011
dans ma besace, juste parce que j'aime énormément ces albums
francophones qui tranchent la vie avec la mélancolie dans le
sillage, la promenade bucolique légèrement voûtée, heureux et
abîmé. Et il m'avait transporté comme un Pierre Bondu, Julien
Baer, Wladimir Anselme, un Frédéric Lo, voire même un Yves Simon.
C'est un coup direct dans
l'affect, sans que je puisse décortiqué le processus, accords,
timbre, ambiance.. c'est comme ça. Et si cet opus totalement disparu
(même pas proposé par les plateformes de streaming), mes
algorithmes m'ont chopé en pleine écoute, histoire de me dire.. «
eh pépère..le Vincent, il en a sorti un autre en 2015 ».
Merci Algo.
« Animalé »
me tombe dessus. Les mêmes références d'étiquettes énoncées
plus haut, obligé j'y pense. Envergure, dimension, émotions
décuplées, gros niveau au dessus. Le rasé blanc a laissé place au
visage en collier buissonnier sous un vert tilleul, les yeux ouverts,
mais toujours abaissés, à éviter comme par timidité et les
chansons défilent et je tangue et danse sous un ciel plombé
pluvieux de haute plaine comme les miennes en moins Cévennes. La
géographie dans les chansons me mangent les amarres et le vent du
Larsac chasse mes noirceurs. Pour voir la mer quand on est loin, faut
prendre de la hauteur et l'âme sur les lichens danse avec
l’accordéon.
« Animalé »
est un refuge au bord d'une rivière, un huis clos sentimental
dans les grandes plaines.
Quelques secondes de jour
en plus, le sol tisse sa douce reprise nourricière et les premiers
pollens s'envolent. Depuis le temps que les guirlandes clignotent, le
dérèglement climatique est aussi dans les vitrines. Si ça continue
ils fêteront Halloween le 15 août.
Mais voilà, nous y
sommes, pour de vrai et le ciel d'hiver appellent aux tintements des
cloches célestes, pas celles de Pâques..quoique.. mes celles des
lutins en plein turbin.
Tull sur une compile
voisine (merci Pax), un rappel, mes chouchous et une grosse réédition
pour l'occasion. Merry Christmas à vous.
Je ne suis pas toujours
raccord avec mon lui intérieur. Aucune option dans la respiration et
le geste, mon GPS musculaire est déficient toujours. Mon affect
prends toutes les directions.
Il y a quelques jours je
suis allé voir du côté de 1973 sous de belles pochettes bleutées,
« Pin ups » ou « Theses
Foolish Things », je me suis baladé un peu partout
juste avant de rencontrer « Torso ».
Je voyage dans le temps
sous des cieux étoilés de quatre blondes cardinales avec au milieu
Desireless en promenade principale. Je suis perdu, Bassey télescopée,
Kloot en Cat Power, à moins que Waits en Velvet ne vienne m'attaquer
avant de sombrer sous l'étoile définitive de Bowie.
Déjà Stina avec ses
visions à elle avait perturbé, dorénavant avant la prochaine, il y
aura Anja Franziska auprès de moi pour me perdre à cœur perdu.
La fougère en fusion,
j'ai dû respirer les sporanges de trop près, éruption des
instruments et la raide terre a tremblé longtemps. Un accord, deux
notes et tout fout le camp. « Prélude » ils
appellent ça !! vais-je tenir jusqu'au crépuscule? Trompette
Hendrix noyée de Wah-wah infernaux, basse-percus en braise et le
vent moribond reste torride. La Miles comète électrique m'a rasée
de près, tout a brûler avant de la voir s'éloigner pour un autre
univers. « Agharta » le jour, « Pangaea »
la nuit !! merde, il est à peine 10h du mat.. qu'on appelle
d’ores et déjà un tractopelle pour que je revienne à la vie
ordinaire demain matin.
C'est un prélude donc ?
Osaka,-Part1 direct sans intro ni sommation, je me soumets sans
distribution d'écran total, ni de lunette à éclipse. Mais comment
tournait le globe en 1975 ? Des tons détonnent, la fièvre
résonne, aucune pause ni ravitaillement, Osaka en épilepsie, Miles
75 c'est le bulbe branché sur le triphasé, l'opulence radioactive,
gingembre dans la flûte et cordes raidement extraterrestres.
Quelle journée, avec ce
gris récurent, qu'est ce qui m'a pris de mettre dans ma besace cette
« Agharta » à l'ancienne, double boîtier
laser d'époque en promo à 6 balles sans ventoline en sus...
et avec la petite sœur « Pangaea ». Ce
soir « Gondwana » va me bercer en espérant que ma
rétine ne suive pas la comète Miles 1975.Elle est où ma fougère....
Miles
Davis 1975/76 « Agharta » -
« Pangaea » sur Columbia
On a strié toutes mes
artères. Capillaire rayé et mon sang avance dans mes veines comme
le lombric sous un déluge. Mes vieilles rigoles pouffent de rire et
je contemple le poulpe manger la ville. Les étoiles s’éteignent
une à une, c'était portant joli ces ventouses haveuses qui happent.
J'ai vu trois étoiles depuis des semaines, je suis en extase.
Les cloches de Pinkie ont
arpenté nos dents, des langues ont chevauché et « Spangler »
m'a dévoré.
Le désert a brûlé,
j'ai vu ma mère déguisée en druide manger les feuilles du tilleul
qui toise le Betula. Alasdair Roberts et James Yorkston sont
venus danser avec elle. Juste dans leur dos, le bouleau verruqueux a
repris vie, Pâque aura son bitume et la salamandre sa grosse teube,
en attendant la noisette postillonne.
Wills et Maclure en
Pumajaw font des miracles.
2008, Domino, Drag City
et Fire records, guitare loops et mandolin, concertina et teeth
chattering pour danser sous l'extase boueux d'une pluie orangée et
chasser les galimatias.
La bascule des saisons
arrive comme on prépare la scène avant le show. Backstage, rig et
plan de façade, amplis, des fils partout comme du mycelium, son et
lumière, photosynthèse. Crépuscule aléatoire.
Le soleil va encore
descendre d'une branche sur l'horizon, et pourtant depuis quelques
jours le merle chante à 6h du mat et les noisetiers exhibent leur
petites queues de chaton à deux griffes de lâcher leur poudre
magique.
La balance, accorder,
toutes ces pelotes câblées, le merle répète. La gorge parle, le
chant s'élève, on envoie les fumigènes et le pollen attend le
départ. Imminent. Dehors les fans commencent à élaborer une queue
qui deviendra interminable. La Défense en attaque. Il n'y a aucune
impatience, rien qui ne fane, juste une horloge qui tourne, des
préparations, un rythme à assurer, l'arène se remplit.
Le mercure et la brume
cendrée n’incitent qu'à la survie, et pourtant tout recommence.
Le cycle est là, ça gronde, l'émotion et les glandes se
réveillent, ça va juter, on va foutre, le merle le sait.Les oiseaux dans le
frimât s'en foutent, ils savent eux quand nous nous imaginons loin
le prochain printemps. Bientôt l'odeur de la noisette dans l'air
abdiqué. L'hiver administratif attend le calendrier, mais mon
paysage a déjà sonné la sève endormie et la feuille évanouie,
l'hiver est lancé, le merle a repris son chant, Paul rempli l'arène.
Il y en a bien un qui
balance un billet sur Costello, juste pour afficher l'impatience du
prochain printemps. Y'a pas de raison, je dégaine Paulo, un bail que
je ne me suis pas gratté d'une fidèle page, alors je pollinise moi
aussi, sauf que là c'est Macca, même s'il a côtoyé un moment le
Elvis en question sur « Dirty Flowers » ..
etc etc..passons.
Le merle chante, au matin
du lendemain de l'arène où Paul a communié comme il se doit. 82
pollinisations du Corylus dans les narines. Il a encore toutes
ses noisettes bien accrochées le bougre. Cueilli une fois de plus,
euphorique et effondré comme mes amours qui m'ont entouré et porté
ce soir-là. Fourmilière, vibrations, et dehors le merle qui attend
le silence pour une nouvelle gorge matinale. Tracklisting écrite,
les prières sont toujours les mêmes. Y'a pas de cliché, y'a pas de
suspicions ni de doute, tous les ans depuis la nuit des temps,
l'oiseau noir chante aux jours les plus mourants de notre calendrier.
Et Paul sur son socle mécanique s'élève.
Alors j'ai dû regarder
dans mes pages, quel album de Macca non causé chez moi. Un de ceux
dont j'attends impatiemment la réédition ? « London
Town », « Press to Play »,
« Off the Ground » ??, ah « Back
to the Egg ». Il fut aussi beaucoup question des Wings
dans l'arène. Je prends cet opus à la pochette bizarre (San ku kaï)
et je regarde mes notes dedans le livret « acheté vendredi 15
octobre 1993, lendemain du concert Paul McCartney à Bercy ».
Si c'est pas un signe ça, en plus du merle qui chante très tôt le
matin depuis des jours.. « Back to the egg »
dans sa tète, au merle qui se moque de notre calendrier saisonnier,
comme de mon premier concert avec Paul en 1993.
Je vous épargne
l’historique de l'album, c'est partout sur la toile.. juste :
1979, dernier album des Wings avant la définitive carrière solo
de Paul, une nouvelle décennie s'amorce........Je recommence, dernier
album de Paul McCartney & Wings avant la disparition de John....
C'est surtout un fidèle Wings lancé dans la lave punk et disco
d'alors (il a quand même participé avec « Goodnight
tonight » gominé flamenco et coupe mulet). C'est un disque
fondamentalement rock, avec en invités, Gilmour, Towmshend, Bonham,
John Paul Jones.. ça sent la fête ultime pour la célébration de
clôture préméditée, l'audace, un pavé rock dans la marre
opposée, une autre décennie qui s'éteint. Il est là, tel merle
mi-décembre.« Winter
rose.. » mes enfants, et sur scène « Now and
then » a fait pleurer à gros bouillon ma puce qui vient de
passer ses 20 ans. Mon fils quant à lui a craqué sur « Here
today », .. moi ???Paul, avec cette
étiquette de baby face, c'est aussi « So glad to see you
here », « Spin it on ».. « Helter
Skelter ».. ah voilà, mon avant dernière chialade dans
l'arène.« Baby's
request » comme une lointaine onde pour sa nouvelle
Valentine, des 10ene de printemps plus tard.
Le « Wings
Greatest » est déjà sorti, prémonition, et avec le
recul cet album 1979 est historiquement coincé dans l'étau. « Back
to the egg », menu absolu, bien loin du Paul encas.
Dans les bonus de
l'édition 93, il y'a «Wonderful Christmastime », un
autre signe, en plus du merle qui chante depuis quelques jours avec
les chatons de noisetiers qui gigotent alors que l'hiver
administratif n'a pas encore commencé et que déjà tous les oiseaux
sur le qui-vivent savent.
Énième coïncidence,
j'ai regardé le doc « John Lennon, L'amour interdit ».
Quel bonheur John et May.. avec dedans les retrouvailles d'avec Paul
et un projet, juste avant le retour du cafard. Je me suis mis à
rêver, comme quand j'étais gamin, d'acheter un Beatles qui sortait.
Alors « Now and then » dans l'arène, j'ai
pleuré aussi. Pas possible une telle chanson.. Définitivement.
Merde, finalement, je ne
vous ai pas épargné.
J'entends le merle,
j'étais dans l'arène, je me suis demandé quel album de Paul pas
encore chroniqué à chroniquer ? Une évidence, ce retour de
l’œuf et de l'oiseau noir à l’œil malicieux revenu depuis que
l'été nous a lâchement abandonné. Il ne m'a pas fallu retourner
mon étagère pour qu'il sorte de son nid. Le merle et l'arène. Le
roi Blackbird.
Vous ai-je dis que dehors
tôt le matin, cet oiseau avait repris son chant mélodique et
cyclique. Il sait, comme le pollen.
Puisque ce week-end je
suis dans l'aveu, un autre m'est tombé sur la couenne. Il aura juste
fallu que j'oublie ma clé USB pour ziquer la bagnole, et me brancher
sur Radio Nova, comme il y a pas mal d'années.
L'effet d'une bombe,
l’alcôve en vrac, ma caisse tellurique a décollé. J'ai plané,
vibré, suffoqué et côtoyé les OVNI. Contact en sueur, j'ai perdu
le contrôle sous la soul monstrueuse de Teddy Swims. Les indices
fournis, j'ai cliqué, fouillé, visité le phénomène pour
finalement me diriger vers le disquaire le plus proche. Oui, c'est un
album à écouter sur des enceintes habilitées, avec les épaules,
le crane et la musculature nécessaires à la déflagration. Cliché ?
Je sais pas, il a fait mouche avec ses grosses lunettes opaques et
son front tatoué, son coffre et la mélodies des choses.
Pas évident d'expliquer,
faut écouter. Je le voyais comme un opus d'un tube un seul, « The
doors », nenni, ça défile, c'est non stop, impossible de
stopper le carnage, « Hammer to the heart ».. « Loose
control ».. « Apple juice ».. « What
more can I say ».. ma chaîne est dans un état, je croise les
doigts pour les fusibles du tableau.
« Tiens, tu écoutes
ça toi » ai-je entendu juste avant de mettre ma chemise
trempée au sale.... « j'avoue »..j'ai répondu.
Difficile de causer de la
vieille baudruche et de ses restes. Comment être crédible, comment
lancer la gaule, avec quel hameçon ? Ado en drapeau, sans pour
autant le brandir plus que ça, le Floyd n'était même pas marqué
au feutre noir sur mon sac US. Mais, il était ma charpente, de la
faîtière aux gargouilles. Et ça dégoulinait dans la Vallée, au
pied des moulins empourprés d'orange, du mur au cochon, de la vache
à l'oreille, tantôt Roger, tantôt David, je prenais position, je
lançais des parpaings sans connaître le contexte.. on fait souvent
ça dans le feu du sang, ils le font tous dans les urnes.
Très Syd comme on a pu
être Peter chez les Fleetwood, j'ai avancé en gardant l'idée, tout
en tournant des pages, j'ai toujours gardé une affection cellulaire
au monstre. Certes les goodies, le revival, l’indécrottable des
promontoires et des vitrines comme pour les Beatles, j'ai enjambé et
gardé tout malgré tout.
Roger m'a laissé las
avec sa Moon acoustique inutile, juste pour raviver la hache. Son
acharnement du mur et on oublie que David se balade quand même sur
ses opus, de la SNCF à la barque intersidérale qui flotte sur les
nuages (beaucoup plus ponctuels eux).
« Piper's
call » et son final solo, y'a tout dedans. Il est
facile, inspiré, sa fille ajoute comme un beau morceau de Steven
Wilson, quant à « Dark and Velvet Nights » ça
sent le laps de temps intemporel momentané, « Scattered »
sa gravité planante d'une cloche divisée... le Gilmour défile.
Alors voilà, tout ça
pour vous dire, qu'évidemment Gilmour est mon tonton sympathique
qu'on invite quoiqu'il arrive, mais aussi que « Luck and
Strange » est un sacré bon disque des Pink Floyd...
hein ?? mais nan j'ai rien dis.
C'est du David, du très
bon, les Gilmourophobe s’abstenir, les Watersophille aussi, les
fans du Floyd ?? c'est gratos, ça se prend tranquille, ça fait
un bien fout, le reste on s'en branle. Et puis pour les détracteurs,
vous allez me kiffer, je n'aime que moyennement la pochette.
C'est un aveu. J'ai mis du temps. Je me méfie
des ondes médiatiques.
J'ai craqué en me disant
quand même à force de lui trouver du talent partout où elle passe
qu'il va bien falloir écouter cet album. Les « Victoires »,
c'est peut être ça ma frilosité. Pourtant quel titre « La
Symphonie des éclairs », une pochette qui ressemble à
Air.
Son esprit sur les
plateaux, avec son regard par dessus.
Sa voix
extraordinairement à elle qu'elle fait danser, placée juste
soufflée, murmurée avec un joli coffre plein d'amour à peine
voilé.
J'ai écouté l'album son
premier voyage (le dernier augmenté), et je suis resté sans voix,
comme un appel à ne pas bouger, subjugué.
Les paroles
époustouflantes, le rythme, le tempo, la cadence, les claviers.. du
début à la fin. Ça déborde d'amour, y'a même que ça sur les
quatre points cardinaux, elle rêve et on est emporté. Elle avec les
autres, le cerveau et le corps d'une intelligence moderne tellement
rare.
Les oiseaux au dessus des
nuages, et tout le reste aussi. Toutes ses respirations....un gros coup de cœur.
Ma spirale Zaho a débuté,
j'ai mis du temps, c'est bien ainsi, au bout de la queue de la comète
qui fuse. Je tente des trucs tout le temps, j'écoute tout le plus
possible, le goût des autres et je me suis arrêté net sur Zaho.
Souvent quelquefois, je me passe son album tellement beau, accaparé.
Zaho de
Sagazan « La Symphonie des éclairs (dernier
voyage) »
Un peu mal à la gueule
ce matin, le ciel écossais a encore le goût de la tourbe, je l'ai
pris en plein poire au réveil, c'est la tempête ou c'est mes yeux ?
Je ne sortirai pas aujourd'hui, j'ai pas mes palmes, à coup sûr du
lèche vitre aspergée, de mon canapé. Je jette l'éponge imbibée
par ce ciel irlandais qui a plu du malt toute la nuit, je ne trouve
plus ma télécommande, « Make Art » de
Nick Wheeldon va passer en boucle, il ne lâche rien, moi non plus.
C'est mon gros poto aujourd'hui, il couine comme jamais, Daniel
Johnston n'est pas loin. Quel album une fois de plus. Il devient
récurent, mon rencard annuel.
Allez, dans quelques
semaines les jours vont rallonger, en attendant on continue de
s'enfoncer, à boire la voûte galloise. Un crachin british plein les
dents, je ne souris pas pourtant. Et dire que dehors à quelques
encablures de mon chambranle, tout clignote et scintille. J'écouterai
Sinatra Christmas dans trois semaines..pas avant.. et encore.
Tiens, j'irais bien me
barrer dans les îles, au chaud.
J'ai raclé le fond de
mon stream. Comme tous les matin au sortir du train, un golf de
propositions s'ouvre à moi, il faut que je me mette un truc à
écouter. Ankylosé par la torpeur du wagon juste après une nuit
agitée, j'ai un laps de temps pour fouiller.
Montparnasse , 7h10
passé.
Reprendre ses esprits,
juste avant de s'incorporer avec le son juste. L'agitation du quai
sous les ruines du ciel pour goûter la bruine tombe, et si c'était
l'inverse. L’entrepôt de mes idées encore vivantes me guide,
indice, son, rictus sur un visage, texture de la salive et mon corps
dans ces fringues. Quais donc, rivages abscons, escalators de
fourmilière, envie retorse, je n'ai pas du tout la même vitesse que
les autres.
Il faut dire que je pars
bien avant l'heure, je n'aime pas la presse. Quitte à détruire une
nuit de sommeil, mieux vaut lui offrir un doux décollage. Peu
importe les anicroches, de toute façon il y en aura.
Alors écouter quoi ?
Quel pas pour désynchroniser tout en longeant, quel débit pour
m'emmener là où je vais bien souvent avec cette humeur qui fusille
ma météo.
Trouver la bande pour
alunir.
J'ai renâclé, les
dépouilles alentours ont les mêmes visages que d'habitude. Hier il
était question d'espace susurré par la pleine lune, j'avais posé
mon premier pas sur un astre mort en ébullition avec « Final
rescue attempt », je sortais du wagon comme on descend à
la Cave. Question d'humeur. Avant hier, je luttais contre un arbre
mou en avalanche fantôme de Rodoplphe, « Encore et
Encore ».
Il va falloir trouver du
bouillon ce matin, un truc sec, mathématique, froid avec une petit
violence pour passer sur l'autre berge, souterrain cette fois-ci,
ligne de métro dans la torpeur avant de resurgir et respirer à
peine. S'immerger, pénétrer, sombrer un peu plus tous les matins.
Allumer le néon et sourire.
Je connaissais Raime,
j'ai adoré 90 Day Men dans le genre, et plus encore l'album unique
de Fourth Quartet rare et précieux.
Ce matin, c'est MOIN, du
RAIME avec guest. Je suis arrivé à destination. Quel pied avec
exactitude, quel ajustement.
Tout s'est accéléré, à
vue d’œil la neige a été kidnappée. Il a fallu tenter « Small
changes » pour voir les glissades se figer…flocon mirage,
blanc éphémère.
À peine le temps de
sortir la luge du garage que déjà son bois mangeait la purée.
Michael Kiwanuka est venu d'une note ramasser toute la poudre
croustillante.
Même les lueurs ont
changé, le gris voûté s'est empourpré et un bout de bleu de la
partie est venu chanter en chœur.
Tous ces petits
changements éphémères font d'un dérèglement majeur une molle
idée zoomée de surprises sautillantes, le quotidien n'est plus
écrit.
Le Toine avait prévenu, les douanes se sont détendues, la Marinière
caniculaire, Michael nous flanque aux nues.
Son quatrième album est
une pépite.
Michael
Kiwanuka 2024 « Small Changes »
sur Polydor.
La
croûte gelée se ramollit, ventre flasque et tiède respiration. Le
ciel se charge de l’halènes des Steppes, le silence gronde.
Notre
limon cryogénique sous la bêtise des trottinant fond comme neige
au soleil, la permanence n’est plus, l'éternel a des doutes. Il
va falloir penser autrement, aimer le mou sous la semelle, comme sur
mes plaines avec cette terre amoureuse qui s’accroche vainement.
Meuble gras toussotant que nous sommes, revoir la boussole.
Chaque
lame épaisse de glace qui craque est un tissu d’âme qu’on
déchire, le bloc de gré qui s’affaisse geint et les racines
dansent. La maison Pise a une autre gueule, tout croule, tout tangue
sur la boule bleue pâte à modeler. La gorge d’outre-tombe râle
en lave baryton. Ça gronde sous nos pieds, le ventre mou qui
gazouille et croasse, des sons drones sourdent comme des
respirations, des cotes craquent, la plèvre demande la parole.
Il
y a une vie là-dessous, un moteur libéré, un souffle localisé qui
se focalise sur le rythme dilaté.Thomas Köner a organisé la fuite
sonore du pergélisol, c’était en 1993, époque où la croûte
gelée tenait encore sa permanence.
Thomas
Köner 1993/ 2010 « Permafrost »
sur Type records
Au détour d'un pavé sur
des albums par forcément dans les plus répandus des piliers de
l'histoire, je chope un article sur « Nation Time »
de Joe McPhee. Aux heures profondes où je fripouille au sein de IARR
et McCraven, le free jazz continue à me travailler le bulbe. Et je
m'enlise.
Le bouquin, c'est
« Musiques, Traverses & Horizons en 400 disques »
de Philippe Robert (sur Le mot et le reste), des albums étouffés
par d'autres, et qui méritent tout autant et même plus très
souvent. Un peu comme « L'Anti-discothèque » de
Christophe Conte.
Et tout l'univers de Joe
s'ouvre à moi. John Coltrane, Ornette Coleman.. du free et plus
encore. Pauline Oliveros, de l'expérimental, et je rejoins le
fantastique bouquin de David TOPP mangé goulûment il y a quelques
semaines.
« Nation
Time » est son entrée très politique en discographie,
1970 sur CjRecords (1971 pour discogs). La transe, le gingembre dans
le cortex, c'est un brûlot classique complètement dévergondé.
Coincé entre IARR et
Coltrane ou Davis, je découvre au fil d'une belle lecture affamée
un album « culte » à la pochette sublime, avec des
morceaux qui collent à « la révolte de la communauté
afro-américaine » d'alors. Le trompettiste saxophoniste fou en
quête d'unité de peuple fait rugir son instrument.
Joe MCPHEE
1970 « Nation Time » sur CjRecord
production
J’ai
mis à belle veste orange pour sortir grimper sur le chemin qui
surplombe le village. C’est pas trop pour qu’on me distingue ou
qu’on ne me cartouche pas, nan, c’est juste que je l’aime bien
cette vieille pelure roussie quand l’automne traîne l’été sous
ses godasses. La gadoue porte encore en elle les averses estivales,
le soleil cucul éponge, la citrouille est cuite, la gueule grande
ouverte tuée par les guirlandes et les boules de Noël. Un jour on
va la tartiner de frangipane. Pourquoi vouloir toujours accélérer,
s’engouffrer dans le tunnel toujours plus vite.
Potiron
poltron, châtaigne en cendre, cèdres délavés, Potron Minet,
l’eau est là, partout, à poil les branches, plus aucune gêne
et le foutre en flotte les chatons s’agitent. Aurons-nous de la
neige cette année ? je vais laisser mes géraniums dehors, à
force.
« Le
ciel plonge depuis des semaines…. » le vivant pionce, les
arbres ne sont plus qu’arborescence. On va savater mou et
laisser traîner le pas, le blues des ploucs que la glaise braise. Le
rouge aux joues pour mettre à jour l’humeur du matin je reviens du
coteau tout crotté l’air heureux et harassé. J’ai quelques
bûches aux creux des bras la braise glaise attend mon foyer, mes
croquenots terreux ont des cailloux collés avec des feuilles et des
asticots. Ma belle veste orange rebelle fume, c’est le mois sans
tabac. Mon plan de cuisine cucurbite assez la cardamone et les
topinambours m’attendent, tout est nuit, la hache courbaturée sur
la chèvre est cuite, les trois petits cochons sont toujours dans le
bois. Dick n'à de garde que de faire vibrer la poésie.
Quand l'outremer du bleu
vient dévorer son cobalt il est fort à parier que la houle va
manger nos plaines. Limon ensablé et Raoul salé se pare des habits
du Calexico mais pas que.
Depuis quelques années
le chêne argenté de cet artiste à la Lee moustache m'intrigue. Son
marbre à eu raison de moi. Comment peut-on longer de tels artistes
de par chez nous sans les embarquer pour arpenter les espaces ?
« Miracle argenté » je disais en 2017.. que dire
aujourd'hui, « Shadow Bands » est une belle
lumière automnale, je le passe en boucle depuis des jours et lui
valse dans la glaise. Tous les ciels fatigués ont défilé sans
bouger, clay en main, les cieux engorgés se sont tenus à
carreaux pour quelques accords d’artefacts désossés.
Depuis hier, la pluie a
mangé le brouillard, l'horizon est revenu, « Brimstone
Skies » est juste à quelques jets de mon talus, le vaste
avec lui, une trouée dans le bleu intense ensablé. Le haut des
bâtiments s'est dévoilé enfin et les clochers bandent à nouveau.
Le marchand de sable a déposé une belle couche de
poussière ocre sur la lune à l’hallali Hazlewood endormie.
Et si pour une fois la
lumière venait d'en bas. Colline éblouissante par en dessous, le
sablier décolle et la dune abat-jour rayonne. Le fibre molle des
grains de sable qui s'entreposent laisse jaillir l'éveil capillaire
des insomniaques. Raoul Vignal fait des miracles.
Avant-hier, sur le seuil
du big-bang, la densité de l'univers naissant était telle qu'un son
mélodieux circulait. Cette musique a catalysé la genèse, la
berceuse. J'aime l'idée que nous sommes là grâce à elle. L'onde
fertile, ma croyance. La musique sauverait l'homme donc... sans
déconner.
Apparemment il ne
l'écoute pas assez. Plutôt que de l'entendre ramoner, ramenons
toutes nos émotions sur la note et l'harmonie. Captons. Table rase
avec cette portée d'oiseaux qui chantent, ces notes sinusoïdales
sur les branches parallèles qu'un vent hydrogène fait tanguer.
Loin des mitrailles
sulfatés, la portée sur le vitrail de l'histoire mets en champs la
création, le chant de bataille et chaque pensée à condition
qu'elle soit à disposition pour laisser la peau frissonner sur un
accord.
Il suffit de lever les
yeux pour voir le ciel beau, puis le regarder avant de le contempler.
Sucé et adsorbé près du Sun Ra. C'est ici, là que le nuage
commence à fredonner et les feuilles chanter. Une fois au sol, elles
deviennent douces percussions de verre sous nos pas syncopés, semées
sur un sol de ciel absorbé qui a gardé le silence de son chant
reculé, juste au dessus de nos tètes retournées.
La menace de l'horizon
est un roulement de tambour, les rives ordinaires frissonnent à
peine, les mots sont emprisonnés, peu importe la musique est
toujours là, muette, mais sûr d'elle, de nous avoir rendu possible la vie
avant-hier. Le silence dans un liquide amniotique avec ce brouhaha
lointain ouvre les yeux et la respiration fait valser nos cellules.
Les tablatures surgissent comme un sens exact, un acte naturel
inépuisable. Lourd de vitalité, accoucher la programmation du
plasma.
En bas de chez moi le
ruisseau chante, plus loin un moteur toussaille, le portail municipal
en fer graillonne avec la bourrasque, le Kronos Quartet va lancer son
opéra rock, un houppier oscille et grince tout en haut avec son
voisin, un moteur de clim d'usine ronfle au loin à peine
perceptible, trois petits oiseaux et le vent dans leurs gorges
s'emballe, les instruments sont là. C'est la fête.
Kronos
Quartet 2024
« Outer
spaceways incorporated Kronos Quartet & friends meet Sun Ra »
Issue éclaboussante et
lampe frontale pour avancer, les étoiles sont tissées. Je suis
passé par Sainte-Eulalie-d'Olt pour gindre mon chant monotone. La vallée
du Lot, les enfants et les marmottes, des crues sans nom et des
chairs à vifs. La cantilène des marmots et ses niveaux
mélancoliques soulignés au marqueur indélébile, errer le long du fleuve de Saint-Geniez et imaginer l'eau bien au dessus de la tète qui
défile, comme la marée."Mourir comme un chien crevé dans le fleuve.."
La planète est une femme
fontaine, une simple bricole pour elle, un jaillissement doux, une
goutte sur la joue, une vallée inondée et tellement de larmes de
fond, des peines à remplir en bennes à jouir. Albouefera.
Brigitte est là, sous de
grandes lumières enluminanasées, tellement bien sapée avec eux, et
si tous nous nous embrassions à la gloire de cette grande dame noyée
de poésie ?
Pauvres errants,
crevards miteux, chiens galeux et autres peigne-cul reculottés,
cette égalité sur les starting-block, des faux départs tout le
temps, la toile est tissée, qui à l'arrivée ? L'eau monte, le
ciel nous scrute et les gris en n'ont rien à foutre. Sur ce fleuve
gonflé, le cobalt n’arrive plus à se poser, et l'ocre des coteaux
avale tout même les lingots d'or. Les parapluies inutiles s'envolent, les Mary Poppins sont
restées dans l'eau. Si seulement certaines avaient pu s'envoler
comme cette conne.
Une corde pincée hurle à
la mort, un tronc miaule et toutes les branches chialent à mourir,
les feuilles flottent déjà sur le salé. La roche sur la fougère ne pipe
mot, lessivée elle câline la mousse sous les aisselles. Et tout
s'entasse sous les ponts.
L'erre est au pébroc, le
bipède botté se dépatouille avec la glaise et l'endotoxine prend
son bain. La planète chiale, allons créer des richesses. L’œil
du journaleux est Trumpé, pas de bol pour les trempés, et "la mer qui aide les collines couvertes d'oliviers" recueille.
Brigitte, la nique à
tous les voisins de promontoire, on en a Cure des Aubert affligeant
Indochinés et autres vulgarités. La Fontaine vient poser son rose zob
à tire la Rigole. Je l'aime aussi ce "Divin Blasphème". Embrassons-nous.
Le Rouge-gorge s'est posé
sur la branche comme on tape sur le diapason. La délicatesse tintant
comme du cristal dans le gris, le rameau vibre encore et l'onde
résonne.
Un peu pétrifié à
l'écoute de cet opus, avant de réaliser et m'extraire de ma
torpeur. Les versions dépouillées ont laissé planer le doute avant
que j'aille directement me poser sur « Crystal ».
Ils m'ont cueilli, sans
aucune somation. Cet hommage est tombé du ciel sans que je puisse
imaginer la moindre reprise de quiconque de cet opus que je chéris
depuis que les Fleetwood ont mis le grappin sur ma discographie.
Buckingham / Nicks
1974, Cunningham / Bird 2024 et le ciel aplanit tous
les reliefs. Les oiseaux font des réserves, aucun relief ne résiste
au ciel qui nous tombe sur la tète. Il y a bien le vert tendre à
mes pieds et ce cramoisie à portée de bras, mais mes yeux sont
embués, et mes lunettes ruissellent à pleurer de joie à l'écoute
de ce duo.
La voix d'Andrew
calmement aux côtés de Lindsey, l'esprit Stevie que Madison happe.
Et « Crystal » qui s'installe.
Andrew Bird m'a mis le
grappin dessus avec son « Weather systems» au
début du siècle. Je suis resté fidèle. Et voici qu'il me perturbe
avec Madison Cunningham plongeant à travers ce chef d’œuvre de la
branche USA venue se greffer aux British Fleetwood, au beau milieu
des 70's.
Un paquet d'étiquettes
viennent s’engouffrer dans ce quartet irrésistible. Le truc qu'on
aurait pu dire qu'il s'agissait d'un nouveau groupe de petits
branleurs en herbe à la sauce revival comme il y en a à la pelle. Le
délire a pour noms Malkmus, Sweeny, White (en Jim) et Kelly, s'il
vous plaît. Du coup, on déchire les étiquettes de cette vieille
fringue chopée en circuit court, et on se mange ce brûlot pop à la
casquette rock bien trempé et vice versa.
Vieux branleurs donc et
un batifolage total, une grosse addiction guette quand on chérit
tout ce beau monde qui gravite et s'entrechoque autour des quatre
vieux garçons dans l'avant. Toujours aussi frais .. si si, ou alors
c'est moi, nous, eux, ne pas vieillir. Mûrir ouaih tant qu'on nous
emmerde pas avec le « O » du même mot, « Kill
by death ».
C'est une belle petite
saloperie qui tombe du ciel, un truc parfait pour se foutre de
presque tout, d'aller pointer, de la raideur de ses lombaires, du
gris du ciel qui s'installe pourvu qu'on n'ait plus la flotte, des
magasins qui dégueulassent les citrouilles de boules et de
guirlandes à sapin, des actualités et de mon transat que je n'ai
toujours pas rangé couvert de mousses et de moisissures.
Les étiquettes arrachées
jonchent mon lopins de boue, elles gigotent au milieux des feuilles mortes à
l'appel. Non je suis pas vieux, The Hard Quartet aurait pu
être des gamins à rétroviseur en manque de super son de tout
temps, genre les troublants The Lemon Twigs pour ne citer
qu'eux.
Super groupe qu'ils
disent.
Très très bon album en
boucle infernale.
Mûrir oui, mais sans le
« o ».
The
Hard Quartet 2024 « The
Hard Quartet » .. disque de l'année.
La brume mange la moitié
du paysage, à cette hauteur de château d'eau on ne voit pas à
100m. Il faut redescendre à hauteur d'arbuste pour voir s'allonger
devant soi les parterres de cyclamens. Le brouillard va si bien à la
chlorophylle qui se barre, la pluie dégueulasse est d'une lâcheté.
Brouillard, brume et bruine, un vrai petit temps à explorer la
discothèque.
Et ça tombe bien, je
viens de recevoir un coffret 5 vinyles, un truc que j'ai mis plus de
20 ans à me rappeler que je n'avais jamais pu mettre la main dessus.
À l'époque, souvent des champs de batailles pour aller pécher des
sorties, des sous à trouver pour de beaux objets rétrospectifs.
Aujourd'hui, s'ajoute au streaming, les sites d'échanges où l'on
peut quasiment se démerder entre nous. Vinted des fringues ??
pas que. Qui m'a conseillé ce site pour compulser les vieux
disques ? Pour quelques kopecks je clique des coups secs
jubilant, secoué de petits soubresauts compulsifs et vieux toc
d'acheteur d'opus que je croyais disparu.
En 1988 je n'avais pas
encore découvert Jethro Tull. Lorsque je mis la pogne dessus, les
« 25th anniversary
1968 - 1993 » sortaient dans une boite à cigares.
Obligé, je lorgnais sur la grosse compilation sortie 5 ans
auparavant. Je venais de jeter au feu mes sapes de bidasses avec dans
le fond des poches la volonté d'y jeter du morlingue dès que
possible. Tant d'années après, Vinted depuis quelques semaines
seulement pour moi et l'idée utopique d'y trouver « 20
years of Jethro Tull ». Loin des cotes, la foire à
tout, on veut se débarrasser. Une aubaine. Venez à moi la décote, une demi-molle rien qu'avec la rétine.
En ce week-end maussade
du ciel, je m'enferme avec mon adolescence pour causer un peu avec
mon impatience d'alors, ma frustration de jadis, ma faim de naguère.
La folle flûte en transe pour me souffler qu'il est mieux
appréciable aujourd'hui. D'ailleurs les 2 derniers opus CD sont là
aussi avec toute la discographie, mais il est question de 20 ans
aujourd'hui, de ma puérilité guillerette très mature (du coup) à
tenir dans les mains un objet que je n'avais même jamais vu en
rayon, promontoire ou moult brocantes maintes fois visitées. Mais je
cause, j'ai encore 3 galettes à écouter avant de ressortir la boite
à cigares pleine de CD.
Compact Disk pour les 25
ans, la version vinyle pour les 20 donc, et ces inédits, surtout
celui-là, le « Part of the machine » très
construit, à la limite du heavy celtique et du prog médiéval.. bah
l'étiquette du Tull en fait. Et du coup, j'en découvre d'autres à
jamais n'avoir osé le peer to peeré, « Coronah »
par exemple. Un truc d'ancien, les Anderson's guy ne soulèvent plus
beaucoup d’intérêt depuis pas mal de temps. Balec, je ne lâcherai rien,
je jubile sur une patte.
Tiens, il fait nuit plus
tôt aujourd'hui, le ciel retombe de plus belle, une purée sans nom.
Les salauds, ils ne m'auront pas, la buée sur les vitres, à moins
qu'il ne s'agisse du brouillard, de la bruine ou de la brume, je
patauge dans mon Tull comme on danse sur les pointes ou fabrique sa
moustiquaire.
Jethro
Tull 1988 « 20 Years of Jethro Tull »
sur Chrysalis
Les canards ont envahi
les champs. Les maïs ont les pieds dans l'eau. Anatidés tout
étonnés de zigzaguer entre ces graminées.
La terre est endolorie,
comme une noyée qu'on a sauvée, étendue sur la berge, le teint
blême, les cheveux plaqués, toutes les fringues lessivées.
L'ultime averse de pluie a fait déborder l'évasé.
Mon paysage est un
rescapé, l'automne est tiède et tout embué. On respire mieux en
haut du coteau, on voit les canards qui flottent sur ces nouveaux
lacs. Les champs s'étendent et brillent de ces milles morceaux de
verre cassé éparpillés qui reflètent. Le limon soiffard cuve
comme il peut. Va falloir sevrer tous ces angles et soigner les
lopins avant la prochaine douche.
À quelques traits de
ciel d'ici, un autre déluge fait frémir la surface de l'eau. Quelle
frustration pour une goutte de pluie de tomber dans la mer. Quel
gâchis, à quoi bon. Un coup rien, la corde raide dégringole dans
l'immense flotte qui ondule, découragée, disparaître et attendre à
nouveau un autre tour pour remonter là-haut, un autre plongeon pour
un bourgeon, poussé par le vent. Se faire déguster par une cellule,
pousser la floraison, se faire butiner, s'envoler puis planer pour
remonter sur un courant d'haleine chaude.
Hier, j'ai acheté une
nouveauté, « Fuckin'up » de Neil Young.
Sacralisé, sacré Graal.
Une telle évidence.. « Au revoir mon amour »
sonnait déjà comme cette chose haute en émotion. La mémoire est
intacte, avec en plus une couche par dessus, l'envergure, le platine,
la grande maturité déracinée pas piquée des pâquerettes.
Le noir bleu intense est
resté accroché au monde réel. Un rayon sur le crane, entre de
beaux bouleaux verruqueux, la chemise s'est nappée d'un beau
vert-olive, et la lumière tape. Une nouvelle. Le tout en haut,
tout condensé en cinématographique, pas le droit à l'erreur,
l'envergure, l'acoustique, l'émotion. Tellement évident.
Dominique dans les
grandes plaines, au pupitre, intime et symphonique, sur les ondes, le grandiose,
chevauchons l’histoire. Indélébile comme l'encre. Se permettre,
s'oxygéner, rétroviser comme sur un écran géant à voir défiler. En
cascade depuis des mois, Memento, Rezvani, Gabriel Auguste, H-Burns, Hugues Pluviose...partout, constant.
Consécration, je suis
totalement remué d'émoi. Ébranlé. Les beaux reflets du monde
réel, on grimpe un peu plus dans le flagrant. L'éclatante ballade
de Domnique A.
Tous les bovins de la
prairie se sont abrités sous le grand saule. Le Salix est
seul à régner au beau milieu du carré vert. Ses longues branches
larmoyantes semblent caresser l'échine blanc poilu des taures
immobiles. Elles sont soyeuses d'ici et la lumière les encercle.
On entend le vent
qui s'engouffre dans le houppier qu'octobre a cuivré. Un son
mélancolique de sax ondule jusqu'aux orées.
On dirait une île que
berce le son d'une basse flûte volage ou d'un hautbois endormi. Une
trompette solennelle les fige, avachi sur ma barrière je les
observe sans être pour autant écorniflé par l'idée du Cow-boy.
Lassé sans lasso je laisse les bêtes accrochées à leur île, je
rebrousse chemin, l'air des Crimson dans la tète, un nuage de voix
lactée dans le sifflet.
La
baume n’a pas suffi la pluie est venue jusqu'à moi. Gouttant et
ruisselant dans ce mince abri j’ai vu la plaine se mettre à
l’envers. Du cobalt dans la chaume, l’abscisse désordonné et le
gris argenté qui fait trembler les peupliers. J’ai laissé passer
la nuée longue d’une demie révolution. Le vernier a perdu son
roulement, je n’ai plus l’échelle du temps, tout s’est
enraillé et ma cachette s’est immergée.
Le
débit des eaux a pris mes jambes à son coup, de la crème dans les
flaques, un généreux café au lait coule dans le lit, tout est
clapotis, gorgé et saturé. Mes pensées boueuses se diluent, la
moindre envie est endormie.
À
mes côtés, la Picride fausse-épervière me murmure de douces mélodies jaunes, tout est doux et tiède, j'attends la dernière
goutte pour sortir, sûrement au petit matin.
« L'ambiant est
la musique sans rythme, allant de Terry Riley aux interludes des
disques de hip-hop ; une musique tribale où les tambours
lointains se superposent aux bruits de la forêt, au sonore ambiant,
où les cris d'animaux distordus se mélangent au grincement des
insectes nocturnes ; c'est une trame qui s'inscrit, comme les
chansons des tribus aborigènes, dans le paysage, avec la nature. Un
circuit tracé comme un cri, qui se répète en boucle de sampler,
déformée et granuleuse..... L'ambiant comme fourre-tout de la
musique intelligente, provocante. Une musique anti-club à jouer dans
les clubs, comme transition, comme épice, comme acte de résistance
et de subversion, un défi. »
Une fois n'est pas
coutume, je propose ici les mots de Raphaël VALENSI, un bout de sa
préface pour « Ocean of Sound » de David
TOOP. Ce recueil sur la musique ambiante est une fantastique épopée,
une immersion totale dans le genre, un témoignage sur ce son qui a
ondulé depuis plusieurs décennies, avec des creux, des hauts, des
retours en force dans les années 2010 avec des couleurs et des
lumières différentes. J'ai eu ma grosse période ambiante dans les
années 2000, je flottait en haut de cette vague, TRAXX ou TSUGI sous
le bras. Je louais tout, achetais les opus conseillés et je me
laissé happer par tous ces field recordings, ces tableaux sonores
allant de l'insecte à l'orage, les nappes sous les drones, les
crépitements sur les claviers, ces tranches de vie dans les micros,
les oiseaux dans la neige de Watson, le bruit moléculaire d'un
matériau...
J'ai une caisse de
galettes avec tout un univers chantant sans mélodie, je sors des
trésors de rêves de tout horizon, le « Texture in glass
tubes and reed organ » de Minoru Sato ; le « Seven
year silence » de Ronnie Sundin ; le témoignage
sonore de l'exploration polaire de Simon Turner Fischer « The
great white silence »; l'intrusion forestière d'Aaron
Martin « Worried about the fire »,
l'abrasif Thomas Köner sur Type « Nunatak – Teimo -
Permafrost » ; Eno dans son aéroport ;
« Musique pour statues-menhirs » chez les
anciens Arbouse recordings ; les ouvres d'Eleh ; Fabio Orsi
et tous ces confrères italiens ; ou encore le « travail
sur la visualisation du son et l'oscillation des ondes sonores en
relation avec les forces de la nature... le son et l'imagerie des
phénomènes naturels tels que les mouvementz du soleil, des nuages,
de lamer et du vent » de Ducan Nilsson-Pinhas et Per
Svensson (sur Galerie Jeune Creation Edition en 40 exemplaires). A
nouveau d'autres mots inscrits au dos de ce dernier opus :
« Le son d'une
mer en furie couvre la totalité du spectre sonore : c'est le
bruit blanc, addition de toutes fréquences. Cependant ce spectre
semble changer constamment ; parfois les vibrations profondes
dominent, puis ce sont les sifflements aigus. Lorsque la mer se fait
inoffensive, le rythme remplace le chaos. Elle expire enfin à
l'horizon dans un murmure, se mêlant au plus douces musiques ».
C'est un monde
fantastique qui s'ouvre sur des mots, un mouvement inépuisable qui
prend ses racines chez Debussy, infini. Allia édition aussi sait en
témoigner : « L'art du bruit » de
Luigi Russolo ; « Modulations, une histoire de la
musique électronique » de Peter Shapiro ou encore « La
révolution digitale dans la musique, une philosophie de lamusique »
d'Harry Lehman. Des océan de mots sur des ondulations. De quoi
s'armer pour passer l'hiver.
Il est question d'un
livre à la base. « Ocean of sound », puis
d'un monde discographique qui dégringole, étourdissant. De mes
écoutes je me concentre sur Toop du coup et j'aurais pu vous parler
de l'abyssal « The shell that speaks the sea »,
ou du musical « Apparition paintings », du
parlé « Field recording and fox spirits »,
mais je suis resté ankylosé par le chamanique et planétaire
« Sound body » enregistré en 2006 lors de
son passage chez David Sylvian et Samadhisound. Instruments, voix et
machines. Expérimentations, collages, flûtes et oscillations,
textures et délicatesse. Hypnotique, contemplatif les yeux fermés,
un voyage surdimensionné.