mercredi 11 décembre 2013

Lavilliers 2013



Ce vieux baroudeur de Nanard revient sans cesse comme le ressac. Son 20 ème album est ici, maintenant, moins politique, plus poétique. La musique plus synthétique, moins chaude, quoique. Un peu plus rock, c’est sûr. Il n'envoie pas directement, il ratisse large et accuse sans accuser… tu n’y est pour rien mon frère.. des mecs du troisième couteau qui reviennent, et qui sont la cause, ou grâce à qui, nous sommes dans la fatigue, la médiocrité, la mort et tant de misère. Il est question du grand pouvoir avec lequel nous collaborons inconsciemment et qui décime des populations entières. « Scorpion » ou « Baron samedi ». Ils sont des millions. Des mecs plébiscités par ceux qui crèvent, des rapaces qui pillent via le système, mais que tout le monde regarde avec un recul abyssal.

C’est moins instinctif, plus raffiné, moins exotique, plus synthé… qu’est ce qu’on l’aime le Nanard.

Il y a le retour de New York, la plaque tournent du mal qui mute, du vaudou, des esprits, et puis il y a l’art, et toutes les questions de la création face à la misère, de la musique face à la solitude, de l’impuissance de l’artiste devant les faits et l’élément naturel, même si c’est exactement ça qui fait son charme. Ils survivent, juste, aux catastrophes, comme Haïti et la création qui en jaillit. L’artiste est créatif, vivant, mais aussi destructeur et morbide. C’est du cristal…des pulsions, quoiqu’il arrive. « Que peut l'art » ?

Il y a une berceuse pour enfant, une chanson pour sa mère qui n’est plus et un texte de Cendrars de 26 min qui prend au tripes, qui laisse sur le carreau et allume le cerveau. Et sur des principes assez durs, il pose des violons, des contrebasses, enveloppe tout dans un écrin Nanard pour nous câliner le cœur de ces souffrances que l’on subit tous à échelles différentes.

Il y a Jack l’éventreur d’un nouveau genre, moderne. Il y a beaucoup de vague à l’âme, d’inspiration, autant dans les voyages que dans la peinture. Il y a des touches électro et du cinématographique. Il fait ressentir l’émotion d’un seul trait, une seule image, en quelques mots. Sa vie à lui est toujours bouillonnante, toutes ses épopées l’éloignent plus encore de la quiétude intellectuelle, de l’embourgeoisement qui nous morve au nez. Nanard est un camaïeu puissant et infatigable, il est noir de monde.
Nanard est un écorché raffiné qui nappe le brutal en ondes harmonieuses. Il est pas précieux Nanard, il est féminin et sensible, il recherche l’harmonie. Même les idées les plus violentes sont lissées par les notes. Il aurait été facile de collé des guitares dures sur les pinces du scorpion.

Chaque album de Bernard Lavilliers est un rendez-vous avec lui et toutes les âmes qui l’entourent et l’inspirent.


Finalement, on est tous des scorpions.



Bernard Lavilliers 2013 « Baron samedi » label : barclay





 


14 commentaires:

1shadok a dit…

Moi aussi je pensais que cet album était un peu plus synthétique et moins "chaud". Même que les mélodies avaient l'air plus fades par rapport à ce qu'il est capable...Mais après plusieurs écoutes je dois bien reconnaitre que c'est un grand cru qui devrait très bien vieillir. L'album est chaud comme de la braise mais ca n'apparait pas immédiatement. Voila. Ph

Alex De La Pop a dit…

Arf.... J'ai toujours été allergique à ce gars. Désolé, c'est épidermique !
Comme on dit, on ne peut pas tout aimer ..!

charlu a dit…

Oui, j'en suis à une petite dizaine d'écoute, il a y des moments "torrides".. c'est clair. Chaud, j'étais plus sur l'idée de Reggae, bossa, du folklorique.. des trucs "carnet de bord" qu'il n'y a pas ici .. même s'il y a une référence au patrimoine culturel de la Réunion (Maloya). C'est un nouveau grand cru leShadok :D

Je comprends Alex, je pense qu'on est allergique ou attendri. Bizarrement contrairement aux mecs de sa générations (comme Renaud ou Thief), je suis à fond Lavilliers depuis ses débuts.

Tu as corrigé de toi même Jimm, c'est bien de Blaise dont il est question.

cabinoffear a dit…

Connais pas bien mais le mec m'est sympathique, certes parfois maladroit, mais toujours vrai. Du moins c'est l'impression qu'il donne. Il s'est pas mal bougé le cul, en Fench Valley quand les usines ont fermées. Et ça c'est cool, car il n'a pas fait de pub, mais comme il a bossé un temps dans la sidérurgie, ben il a bougé son cul.

Pascal GEORGES a dit…

Salut Charlu...
A chaque sortie d'un album de Lavilliers j'hésite puis finalement me décide et fini par adopter.
Il en a fait tellement et de tellement bons que je ne sais pas pourquoi, mais c'est ainsi.
Celui là ne va pas faire la valse hésitation longtemps et je crois que ton billet m'aura aidé...

Ps : "'tain Charlu, fais gaffe quoi, tu t'es fait retoquer par ton prof de français, surtout quand tu dissertes sur Lavilliers, enfin quoi, relis !...m... sinon gare à ta moyenne...".
Bon là, éval' tout de même excellente sur ce billet B.L mérite bien cet engouement.
à + mon grand.

Keith Michards a dit…

J'ai pris un réel plaisir à découvrir ce nouveau "Nanard". L'artiste poursuit son bonhomme de chemin, entre rythmes poivrés et rock acide. Les textes sont toujours aussi beaux.
J'ai moins apprécié le texte de Cendrars !
Sinon, que du bon

charlu a dit…

Vi T... je connais son engagement réél pour le peuple et ses interventions..et ses coups de gueule.. ses textes son beaux, tjrs, ces musiques roublardes et chaloupées..l'ensemble assez bétonné à chaque fois.. je ne lui connais pas de mauvais disk (à par peut être "Nuit d'amour".. mais bon, c'est 80's :D
Nanard l'insoumis

charlu a dit…

Yes Pax..je suis le roi de la bourde, de l'étourderie et des photes d'aurtografe :D J'ai beau me relire, dingo. J'te dis pas ma moyenne de français au collège... ehhh, j'écoutais déjà Lavilliers à l'époque.. "Kingston"... affamé comme moi...

reusement que les fans de Nanard déboulent..
Kif, j'adore tes mots "poivrés et rock acide" et tjrs des beaux textes.
Le texte de Cendrars est un plus, un truc qui lui tient à cœur depuis qq années. ça me rappelle ses 33T avec un maxi en plus... "noir et blanc" etc etc.

Je parlais des 80's, et bizarrement je suis dingo de "Etat d'urgence".

Alex De La Pop a dit…

Je respecte totalement hein, c'est juste que ça ne passe pas. Puisque tu parles de Thiéfaine, si on parle de cette génération, c'est lui que je choisis sans aucun doute

Un hommage plus ou moins humoristique plutôt marrant (bien que très naze) à Lavilliers, parce que je ne suis pas rancunier : https://www.youtube.com/watch?v=9i3aD_toF9s Enfin, ça me faisait marrer au collège, beaucoup moins à la réécoute maintenant ^^

charlu a dit…

mdr.. même si t'as raison, c'est vraiment une chanson (groupe ?) pour collégien ;D

Alex De La Pop a dit…

C'est tout à fait ça ! Enfin, j'ai des potes de 20 piges qui sont restés bloqués dessus, y'a des exceptions ^^

charlu a dit…

C'est bon ça p'tite boite.. à l'époque j'en connaissais plein qui se foutait de sa gueule aussi avec cette chanson.. cliché etc etc. Mais bon, en dehors de l'étiquette et des épaules larges, les accords guitares de cette chanson sont cotons..un peu comme ceux de "Betty".. comme j'aimerais bien y arriver..à jouer ça.

Pascal GEORGES a dit…

Betty... cette chanson qui a marqué nombre d'ados...
Une de mes fétiches (puisqu'on tourne sur ce sujet) - "les Barbares"...
Le groupe de backgroud était constitué des frangins Cinelu (futurs Chute Libre et Mino passé chez Miles dans les années 80) + notre dédé national aux drums...
Ce monument de la batterie version frenchy à placer juste à coté de Katché.
Lavilliers, pas le genre d'artiste qui s'entoure manchots...
Une sorte de nec plus ultra avec des choix musicaux vraiment difficiles à rendre en leur état "originel", sans leur donner une récup de couleur varièt' (manie franco française - Enzo Enzo, Pauline Ester, Dany Brillant et tant d'autres qui s'emparent jazz/salsa/bossa en faisant lifting tf1nisé).
Chez Lavilliers, malgré les critiques envers textes et "grande gueule", tout sonne juste que ce soit musique ou écrit, et ça, chez nous c'est suffisamment rare pour être souligné et tant pis pour ceux qui le taxent de démago.
Allez, à +

Le Gallinacé a dit…

Il ressemble de plus en plus à Enrico Macias. je l'ai vu sur scène il y a longtemps, d'un inintérêt complet.

Thomas Köner 1993

  La croûte gelée se ramollit, ventre flasque et tiède respiration. Le ciel se charge de l’halènes des Steppes, le silence gronde. Notre ...