La condition humaine ramenée à de
simples animaux, avec comme esprits britanniques conducteurs Margaret
Thatcher et Mary Whitehouse. Nous sommes en 1977, les Pink Floyd
sortent « Animals », un album sombre et puissant contre
la morale, en pleine morosité sociale anglaise, une crise naissante
qui continue à sévir. Un hurlement froid contre toute sorte d'abus.
Plus encore, le punk naîtra en parallèle, et le Floyd s'en tirera
bien face à la montée tsunami des Sex Pistols.
Le contexte: les Floyd reviennent des
sommets Dark Side et de Wish you are here, et pendant la tournée de
Wish, deux morceaux sont en essai, « Raving and drooling »
et « you got to be crazy » qui deviendront sur l'album à
quelques paroles prés, « Sheep » et « Dogs ».
« Animals », c'est le début
des anicroches, le planétaire a porté ses fruits mais il fallait
assurer la suite, une période où le groupe n'a plus rien à
prouver. Le leader théorique, Waters, affiche ses tendances de
dictateurs artistiques, jusqu'à la pochette qu'il a conçu à lui
seul : Une usine au sud de Londres, des hélicos, pas de montage
photographique comme conseillé, un vrai cochon gonflable géant
entre les cheminées d'une manufacture mythique et polluante. C'est
une galère technique, 8 cinéastes et 11 photographes, un tireur
d'élite pour le dégonflage, la prise photo n'est pas celle que
Waters voulait car le lendemain des premières sessions, une tempête
arracha le dodu rose de ses amarres et, devenu libre, il fera la une
des quotidien dans toute l'île britannique. Ce gros budget gadget
sera renforcé sur scène, avec avion vrombissant et cochon enfumé.
Tout cet arsenal embrume la musique du groupe et inflige au publique
un spectacle chaotique et cauchemardesque. « The wall »
confirmera.
Pourtant la musique s'affiche plus
humaine, chaleureuse, deux morceaux retravaillés, et une déclaration
d'amour de Waters à sa compagne « Pig on the wings ».
C'est réellement la transition Waters.
C'est aussi les débuts des déboires
avec le public, Waters crache sur un Montrealais excité, la
dépénalisation de la marijuana à Manhattan enveniment la soirée,
agitation générale, incidents techniques... le Floyd a toujours eu
des prestations scéniques, 1977 est aussi une transition technique
pour une volonté d'envergure qui ne cessera de croître.
La dictature de Waters était telle que
les autres membres ont sorti en cette période de fatigue, leurs
albums solo respectifs, des remèdes, des échappatoires.. 1978.
Dorénavant ils ont un budget, et ils
se payent un studio 24 pistes au Britannia Row pour quelques mois. Un
autre calendrier de tournées se dessine, avec en première partie
« Animals » et « Wish you are here » en
deuxième. Snowny White, le fin guitariste, s'ajoute au quatuor et se
rapproche de Gilmour. Il assume la basse et la guitare, laissant
Waters totalement libre pour gérer ce set épique et planétaire.
Tout le monde se laisse faire, finalement ils veulent seulement jouer
et ils jouent bien. Mais rien ne va plus, le pire reste à venir.
Un tournant donc pour un groupe dont
les musiciens sont relégués à de simples instrumentistes, mais qui
cartonne dans les ventes, dans cette période de naissance punk.
Pour info, « Raving and
drooling » et « You've got to be crazy » sont
disponibles sur le cd bonus de « Wish you where here »
réédition 2011. Le reste du concert Wembley 74 est proposé sur la
réédition de « Dark side.. ». Distribution très
discutable.
Personnellement, je suis parti acquérir
« Animals » juste après avoir dévoré « The
wall » pendant des mois d'adolescence. Un disquaire chartrain
possédait une cabine en verre munie d'un casque pour les écoutes.
J'ai fini par me faire virer par la patronne qui gérait la platine. J'écoutais "Pigs" en entier, finalement le seul nouveau gros morceau du disque. Puis se faire une idée rapide sur un album des floyd avec les
interminables intro demandait de monopoliser la cabine en verre de
longues minutes, exactement comme l'on squattait les cabines
téléphoniques. J'ai fini par acheter ce vinyle quelques mois après,
quand j'eus amassé les 35 francs nécessaires. Je l'ai toujours,
objet et pochette extraordinaire, historique bancal mais disque
formidable.
Pink Floyd 1977 « Animals »
label : harvest
15 commentaires:
Hi Charlu
De la rive droite de la Seine vers le quai de Bercy à Charenton, juste avant le périph, tu peux apercevoir une usine (toujours en activité ) avec 2 grandes tours comme d'énormes fumigènes identiques à celle de la pochette d'Animals. Tous les soirs quand je reprends le bus pour rentrer, je pense à ce disque.
Le début de la fin en ce qui me concerne... J'étais tombé sous le charme de "Wish.." et j'avais trouvé celui ci décevant déjà en terme de son (Normal? Le nouveau studio?) Peu sensible à la métaphore ANIMAL.
Mais avec le temps et contrairement à THE WALL j'ai fini par l'apprivoiser.
Pour l'anecdote lue, le titre court du morceau fait que Waters se prend le max en droit d'auteur, hé oui, injuste, la durée des morceaux ne fait rien à l'affaire ;-)
Yes Rouste..je connais très bien ces cheminée pour les voir apparaitre à chacun de mes déplacement de la place d'Italie..mais bizarrement j'avais jamais envoyé mon cerveau sur Animals.. coquin de coq, dorénavant j'y songerai avec le galino en plus.
Eh Tonuio, moi aussi j'avais un poil l'écoute à reculons, d'où l'énervement de la patronne.. je voulais du The Wall à tout prix. Et comme toi, il a beaucoup mieux vieilli et je me le passe régulièrement. Ceci dit, les morceaux live sont super bons.. faites moi signe au cas où.
Merci pour l'anecdote pigs on the wings.. t'ain il touche un max alors qu'il est plus avec la meuff d'alors ?? !! Le nouveau studio doit y être pour qqchose .. effectivement pas énorme le son.. d'où l'intéret d'écouter le live :D
Très belle chronique, bien instructive. Entièrement d'accord avec toi, même si je ne possède pas la même histoire que toi avec cet album!
J' ai été très émue par le lyrisme des billets précédents,c' est inhabituel comme carte postale de vacances, alors avec en fond ce bestiaire de nos flamants roses, c' est parfait!
Mon préféré...
Enfin j'en sais rien, car je crois que jusqu'à celui ci je les aime tous..
Cette histoire, narrée dans le bouquin de Mason (très bon livre d'ailleurs) et les solos effacés dit la légende...
Toute une "best" époque...
Merci.
Merci Orfee.. j'ai bien peur qu'il y ait de grosses différences chez moi entre les billets techniques et les musiques à peindre :D..mais bon, comme je suis boulimique des deux.
J'aime bien celui là aussi T & Pax..même si ma préférence va direct à Meddle et Atom.
La photographie et la musique de l'angoisse par excellence. On ne peut pas reproduire si bien ce sentiment sans être passé par là.
C'est à dire !!!?? tu veux dire que je suis un gros cochon rose ?? !!! ;DDD
Un cochon rose? Ah! Ben là, je suis perdue dans tes méandres douteux. :D
Je ne crois que je n'ai pas été claire dans mes propos. Je voulais dire que Pink Floyd, dans le visuel comme dans la musique, transmet l'émotion de l'angoisse si parfaitement que c'est impossible que ces créateurs ne soient pas passés par là.
Si si Red, c'était clair.. je suis un gros lourd :D mais tu as raison, Waters qui prend lamain ici est devenu un angoissé terrible, flippé, tout est remonté chez lui, le musique c'est assombrie, et The wall sera la confirmation. Et je parle pas de Final Cut..
Le clin d'oeil Thatcher aussi.. avec ses débuts de tyran.
Mais j'ai vu le cochon rose traverser une salle parisienne en 87.. terrible. Je suis très Floyd :D
J'ai arrêté ma carrière de Floyd à mon adolescence, après un party débile où The Wall avait joué en boucle. Ça me rend complètement patraque maintenant, j'évite.
C'est quoi cette party ?? vous avez transformé des gosses en viandes hachée ??!!
Les fans des Floyd n'aiment pas trop The Wall.. à l'occas je t'envois Meddle et Atom.. allez quoi.. parole de Charlu c'est très bon.
Je ne dis pas non, si tu me dis que ça donne pas envie de ce suicider.
Enregistrer un commentaire