L'ombre pyramidale
s'allonge sur les asters. L'aulne au dessus de ma tète a déjà
montré ses chatons avant de pioncer pour quelques mois. Faut se
dépêcher, le sommeil est pour demain. Les humeurs se pourchassent
et les rondins s’amoncellent. Tous les soirs je vois la forêt
mûrir et j'entends le lièvre craindre le plomb. Le bosquet de
sapins se fout de tout, son vert restera.
C'est une journée bien
fraîche, marée basse sur mes champs, le vent n'est pas revenu, ma
haie se repose, c'est moi seul qui la vois chagrin.
Avaler les confins,
marcher le plus possible malgré la lointaine embouchure, imaginer le
sel sur la peau et l'horizon s'inverser, bleu outremer en bas,
ocre-gris en haut, Nina et Johanna à nos côtés. The Cardigans et
First Aid Kit convoquées.
Je me balade souvent avec
James. Je l'ai connu avec ses Athletes, « Tender to the
blues » est toujours aussi à vif dans mon esprit, avec
cette pochette western des côtes écossaises.
Tandis que je cherchais
un coin pour fuir cette mer imaginaire sur laquelle je sifflotais, le
réconfort est venu de ce trio opportun, un acoustique pour mon huis
clos chatoyant.
James
Yorkston and Friends 2025 « Songs for Nina and Johanna »
Freak c'est pas branleur
ou alors y'en a aussi dedans. Un bouquin, une mine que dis-je, un
gouffre.. La culture musicale british par le bout des freaks. Loin
d'en être un, je pioche et picore les brides de ce qui m'aurait plu
d'être, ou pas. The Auteurs, The Jam, The Go-Between, Gene Vincent..
et je comble mes manques, je connais et puis pas trop finalement.
J'écoute tout. Même The Shadows, les premièrs amours de Luke
Haines.
Et je tombe sur « The
Evening Visits.. », The Apartments. Il y'a quelques
semaines je parlais de Guy Blackman et sa fragilité bancale à
ravager le chant par l'émotion ou la défonce. Troublant comme un
Daniel Johnston chialant, je suis resté fébrile « All the
bithdays », revigoré, confiant et dubitatif.
Démissionnaire et orageux. Un pan s'écroule sur le flan de mes
lacunes, envie de boire fort et de me barrer sobre au plus lugubre
des caves de mon sombre gourbi. C'est beau et dégueulasse, ça sent
mauvais la spirée de sublime caniveau. Ça sent pas le fric, plus
aucun freak par chez moi, je ne suis ni l'un ni l'autre, je n'ai pas
le choix, ou l'envie, et vice et versa, il n’empêche, pour une
soirée, une lecture, une plongée en apnée extraordinaire dans le
Londres barge underground imbibé et acide avec en plus l'âme de
l’hallali qui hurle en alarme étouffée.
Les pages défilent, et
« Someone Else's wife » débarque. Les Go-Between.
J'archive tout dans un coin de mon désespoir, au cas ou il me
viendrait l'idée de vriller sur mon age, ça aurait pu, ou pas, je
ne suis pas freak pour un rond .. pourtant merde.. « The
Clarke Sisters »....
Je lis Luke Haines, je
prends tout, écoute n'importe quoi. Un bouquin comme ça il y a 20
ans c'était 10 bibliothèques et des jours à courir pour tout
écouter. Là je suis avachi comme un vieux boomer qu'a jamais bossé
et je crowle sur le stream pour combler. Je me régale ou pas. Je
patauge. « What's the morning for ? » amoché.
Je suce des roues, je suis en dilettante et méritant, je me dégoutte
des fois, j'ai quelques idéologies, plus utopiste qu'hédoniste,
j'aime bien le sport et sortir en short l'été.. ouaih nan je n'en
suis pas.... j'ai rien d'un bohémien, ni intello branché..et puis
j'ai rempli ma besace avec tout ce que j'aime. Ça pèse son poids de
fric ce truc. J'écouterai pas tous les soirs, mais ...
On s'en fout des
tiquettes, et puis des « sectes », groupes, meutes ou
autre revendications pour s'extraire et cracher dans le potage, il se
le répète un peu trop souvent le Luke que freak il est .. allez, un
petit foot, un clash, une claque sur le zob puis un autre The
Apartments.
The
Apartments 1985 « The Evening Visits..And
Stays for Years »
Brutal coup d'automne sur
le coin de la gueule, une cinglante sape sur les guibolles et le
retour de la meute. J'imagine que mon wagon s'est empli,
je n'y suis pas allé ce matin, je suis resté près de cet ampli à
chercher l'onde musicale qu'il faut. Un indice, un objet bilan sur
les frères Montgolfier vient de paraître. Voilà, j'ai trouvé
malgré la vitesse des nuages. Quigley & Tranmer, pas sûr de
prendre de la hauteur.
Orion se redresse et
laisse tomber l'aube en feu nacré, avant de disparaître sous la
voûte et les trombes à flagelles. David Gilmour et sa fille
chantaient « Between Two Points » il y a un an. Je
me retrouve là, flanqué sans arme à farfouiller au plus profond
des étoiles à relier, comme les points au crayon sur les cahiers
d'exercices scolaires pour les vacances.
« Seventeen
Stars » me dilatent, m'éparpillent, le torchis est
détrempé, festin des sols craquelés. Les rampants rempilent et les
arbres pensent à la démission.
Le son des accords comme
sur l'image, le clavier aussi, tout s’arrête, le ciel canadair a
éteint mes champs incendiés, si les wagons se remplissent comme des
oies, les barques fatiguées flottent sur une mer reposée. Balayer
les fantômes, ratisser la plage ou laisser la houle bodybuildée
faire le travail. Quelle tristesse. Des tonneaux de crèmes solaires
déversés sous l'écume et les quais croulent à nouveau.
Enfin, j'imagine, je n'y
suis pas allé ce matin. J'ai remis The Montgolfier Brothers 1999,
histoire de laisser le crachin faire son malin, avant que l'été
revienne sur mes plaines. Ou pas.
The
Mongolfier Brothers 1999 « Seventeen Stars »
sur Vespertine
Petit huis clos,
canape-chaussons et pochette foireuse, titre pas inspiré, ça part
mal c't'affaire.
Pourtant, dès la
première note le charme balaye toutes les premières impressions,
même celle d'une platine qui tourne mou, ondulé un poil.
Des tonnes de
flemmardises et des petits morceaux confortables, complètement
séduisants. Tellement de demos l'habitent, des airs de cowboy
urbain, JJ Cale anesthésié, Nick Wheeldon joyeux, même sur « Five
Eay Hot Dogs » en 2023, Mac n'avait pas eu la force de
chanter.
Oui mais voilà, la magie
Mac opère, imparable, croustillante. Le sens de la mélodie. Merde,
j'ai la flemme de me lever tourner la galette. Touchez pas à la
platine, ça tourne normal, Mac est lui, DeMarco est là. On est
bien.
À JJ-Johanson, on
remplace une pincée de mélancolie par une once de jazz ambiant,
trip hop toujours en sourdine. On ôte un voile de délicatesse à la
voix et joint quelques cuivres agiles, « The Coldest Man
Alive » de Peder Pedersen est un diamant sonore, une
petite merveille d'album, la belle découverte du jour.
Miraculeusement nappé de dorures crémeuses, mais pas trop, une
petite perfection.
Une arborescence d'écoute
m'a menée vers cet artiste danois. Son CV n'avait rien pour
m'attirer. Souvent quand je ne sais pas quoi écouter, je sors un
coffret Nova, de la « haute musique », tout s'est arrêté
sur un morceau, et moi sur cet album. J'vais m'la péter lors de la
prochaine soirée entre amis, ce n'est pas de la musique de fond,
c'est tellement plus, ils vont tous me répondre JJ Johanson, normal,
l'équilibre est parfait et le moment délicieux.
Country alternative du
Vermont. Je commence direct technique car cet album me tombe dessus
et je n'ai rien sous les dents qui puisse mettre en herbe cette
petite dinguerie. Avec le bouquin de Luke Haines, je me suis un peu
enlisé dans ses délires avec l'impression d'avoir visité une
secte, allant jusqu'à écouter ses arborescences musicales,
notamment Peter Buck etc. Je change d'air, sorti de tout ce
« bancal » foutraque radical et narcissique, Greg Freeman
chante son « Burnover », il m'a ouvert les
portes donnant sur un ciel éclatant, populaire avec beaucoup d'air à
respirer.
Comme c'est une
découverte, je cherche et farfouille et tombe sur son premier et
précédent album qui me plaît plus encore. Je plonge dans ma came
Oldham-Lytle-Sparklehorse-etc-etc avec du Molina dedans.
Je reviens sur « Rome,
New York » et je vais me nettoyer les enceintes avec ce
rock outre-atlantique pêchu comme il faut, tendre comme il fait
tiède, De Marco, Kurt Vile, Kevin Morby… à ranger avec.
Fait un peu chaud
finalement, les glands tombent mais pas les marrons, je sais pas
pourquoi je dis ça, y'a plus de calendrier, mais je vois quand même
à peu prêt où on en est avec tout ce merdier. « Curtain »
m'enchante, et je vous laisse sur « Gone... ».
Juste quelques petites
infidélités, un autre ciel discographique de temps en temps, moi je
ne connais Chesnaux que sous un ciel constellé. « Say
Laura » est un instant particulier plus encore. Son
jazz décortiqué, volage et éthéré, l'Epiphone lui va si bien.
Des cœurs d'éponges en douces émulsions de basalte. L'intimité
s'est installée, j'ai arrêté tout ce que je faisais et j'ai
contemplé. C'est comme un tableau qu'on ne voit jamais de la même
façon, un Nick Drake ondulé. Chaque écoute change la lueur et de
lumière. Oblique ou en applique elle prend tout et nous farde, « Say
Laura » plus que les autres, tellement de choses
ressenties.
C'était il y a trois
ans, rien à changé et tout s’acclimate. Juste avant de sortir
prendre la moiteur d'un été au vestiaire, plus beau encore qu'un
paradis alangui, « Say Laura ».
Eric
Chesnaux 2022 « Say Laura » sur
Constellation
La voûte se démantibule,
la cogite s'attise et finalement cet automne de mi-août a son petit
charme. Toutes ces feuilles jaunes tombées sans calendrier, les
mêmes feuilles à terre qu'aux étés de la Saint-Martin, mais
croustillantes ici, cuites en plein vole. Paysage inattendu.
Le sol chips se gausse un
peu des grillons fatigués, les pas saccadés crépitent et rythment
la tiédeur molle, une belle musique anachronique voltigeante voile
la bouillante rondelle jaune, le ciel devient synthétique émoustillé
par les clapotis des libellules qui barbotent. Les vesces se
trémoussent sous mes pas craquants « Est ce que tu
dors ? ».
Ce duo m'enchante, entre
le monde de Burgalat et les rêves organique de Tellier.
Toutes ces feuilles qui
jonchent déjà. Moi, bien loin d'une « Crise
d'aaaangoisse » je danse dedans, il faut se faire à
l'idée, il va falloir écoper un moment donné, je reste dans leur
bulle, je suis accaparé et intrigué. « Maréeternelle »
est un instant fantasmagorique, Citron Citron une découverte.Et quelle pochette !!
Clarinette sur le bilan,
costard dans les graminées, un peu too much le lapin sur le piano.
Aucune fleur bleue dans les hautes herbes, pourtant je le suis à
fond sur cette chanson, depuis un paquet d'années. Pourquoi l'impact
de celle-là ? J'en sais rien, mais elle m'embarque toujours,
flon-flon et re-flon-flon en cuivres gras et petit orchestre pop de
bal musette quand tout le monde est presque rentré depuis quelques
lampées d'une niôle locale qui rend fou. Le jour a beau mettre
minable les derniers lampions qui vacillent et bavassent, tout n'a
pas été résolu.
Pas grand chose à
retenir de cet album, il est d'époque, et y'en a tellement des
« Lucile », peut-être « La musique se
lève à l'ouest ». Je n'ai aucune idée de la répercussion
de Chamfort à ce moment-là, « L'amour tsé-tsé »
.. insupportable. Lui aussi, souvent.
« Mariage à
l'essai », rien que celle-là, Chamfort aux notes, Rivat à
l'écriture. Un vieux mariage, je suis fou, je déteste l'idée des
unions administratives et religieuses, j'ai joué le jeu début 90's,
c'est passé comme on attend son tour pour valider son ticket de
loterie. J'aime bien l'idée aujourd'hui, de cette journée pénible,
ce truc qu'il fallait abroger le jour suivant pour mieux s'unir, ce
vieux bois qu'il faut lasurer tous les jours, ce sentiment d'être un
ancien combattant et d'aimer quelque soit le métal et la pierre. Ce
n'était finalement pas une mauvaise idée.
J'ai une troublante
anecdote avec ce vinyle. Aucune raison au début des 90's, qu'il soit
dans le garage de cette famille-là, immigrée depuis 20 ans, à Lucé
en Eure-et-Loir. Un Johnny encore, ou un Eddy, mais Alain !! Je
n'ai jamais su d'où il venait, pourquoi il était là. Quand mon
beau-père a disparu en 1992, nous avons perdu la trace de ce
33tours. Je demande souvent ce qu'il est devenu, le disque, qui l'a
chapardé, revendu ou gardé précieusement pour la nostalgie. Il
n’empêche depuis, je dors toujours auprès de sa fille avec mes
vieux rêves.
Je viens de trouver sur
Vinted le 1er des 3 coffrets pour autant d'euros que d'années de
mariage pour moi et la fille du garage d'Augusto à Lucé avec dedans
entre autre, le deuxième LP d'Alain Chamfort. Il a disparu avec lui,
qu'est ce qui foutait là.. le disque. J'y pense souvent. J'écoute
uniquement cette chanson de cet album. Elle est belle. Je fais tout pour que la fête continue même si
tout le monde dit qu'on est fou.
On se recroqueville
derrière des cicatrices, quelques chansons belles comme des
amulettes tournent comme les saisons. On repasse tout, je cherche la
faille, je me vautre et lutte contre les amours en fuite. Des leçons
à farfouiller mes déraisons, je me mets des coups de savates dans
l'âme comme on brame le glas, je m'enlise dans le déni.
Spleen de Tristan en
longues heures de tristesse. Je ne m'y ferai jamais.
J'écoute, je me noie, un
morceau m'échappe, il tape dans la poitrine, je vérifie d'où vient
« La prière », mon
streaming chiale et je fouille parmi mes galettes. « Marlène »
appelle à la génuflexion, foutre de crénom. Le flot amer pour quelques notes se
dissipe, comme une nouveauté, j'écoute cette chanson bonus cachée
de Jean-Louis Murat. Lourd comme une âme en peine, grinçant comme
la cruauté, je jubile en triste sujet, il fait un peu plus jour, je
découvre un JLM.
Ma salive en plein
estivage, j'ai le goût de la chaume dans le naseau rien qu'à
regarder la poussière des herses s'envoler. Le soleil est déjà
dans sa descente, la sève à bout de souffle. Les prunus passent à
autre chose.
La chair de guigne est un
souvenir, le noyau attend la pluie. J'écoute « The
Kind » en boucle, toutes mes cellules en transhumance
dévalent sans rien déballer. Je fais de la rétention d'émotions,
j'hésite à dévoiler. Il n’empêche, tout s'est figé et le
Panic-pied-de-coq chante à crête rabattue ses épis plumés de
haute gorge à dévaler sous le vent-là vital et tonique.
Descendre des alpages,
amener en bas l'altitude sous ses paupières et toutes les écritures
d'en haut pour faire un disque. Sommet de poésie.
Bouffée de chaleur sur
les joues, la tempe offensive et les yeux plissés je dévore
« Moisturzier » à moitié urgé. Ça gicle
affolé solidement développé. Je me suis dit dans un premier temps,
ouaih, y'en a des tonnes des groupes ainsi à faire du bruit.
Ce beau brelan m'ébranle, les deux filles ont trouvé trois zicos du
tonnerre, la recette fonctionne, je suis pris au jeu.
L'accroche racole et me
colle au casque. Âpre et sec complètement boumer je me dandine.
J'ai loupé l'apparition
virale de 2022, on me la fera pas sur cette confirmation proposée
aussi en cassette.
10 balles la nouveauté,
rien que pour faire jouir ses baffles et tremper le carrelage. Petit
coup de gingembre dans mon ciel gris, filles caféines, je tiens plus
en place.
Le
temps des lilas disparu est un leurre, un autre celui des Indes
fleurit quand tout est grillé. Plus intense en couleur, moindre en
odeur. De l’autre côté de la palissade, les Robiniers sans épines
tapissent
les trottoirs de leurs confettis crèmes. On dirait un lendemain de
carnaval. Sophora et Lagerose sont à la fête. C’est exactement
l’image qui m’est venue à la vue de cette sublime pochette. Une
dominante de couleurs qui apaise.
Il
fallait aussi que je tombe sur de la chanson nébuleuse, légèrement
bancale et fragile tout en
gardant
l’idée que je déambulais déboussolé au beau milieu de l’été
qui avait déjà connu la brûlure. Un ciel vaseux, un thermomètre
moelleux, météorologiquement intemporel avec alentours les teintes
qui ne laissent aucun doute sur l’instant. Il pleut un peu sur les
ardoises. J’ai laissé cette aubaine musicale diffuser comme on
enfile une pelure au petit matin d’un été qui reprend son
souffle.
Les
abeilles butinent au sol les fleurs tombées du Sophora japonica
avant d’être piétinées. Le rose
intense
des fleurs de mousseline du lilas d'été, ce sera pour ce soir quand
les fleurs s’allumeront. « Out
of sight» est un nectar délicieux qui me perd un peu
dans l’air, dans l'émoi et le calendrier.
Le grand estuaire où le
Tage se dévide a craché sur la petite capitale de collines
saillantes. C'est la première fois que j'arpente ses rues de belles
pentes sous le crachin. Même ce ciel dévorant la ville a du mal à
faire taire les couleurs lumineuses de Lisbonne. À peine rincés les
petits pavés glissants s'allument et le blanc se répand comme le
fado tristeza qui résonne dans les bas fond dégringolant vers le
bras de mer.
Des nuances de jaune sur
quelques façades se diluent et les bougainvillées empourprent
encore. La place du commerce est toujours aussi belle avec ses petits
clapotis de vague tout en bas. Alors je pense à Pesoa une fois de
plus :
« Tout
l'entassement irrégulier et montagneux de la ville m’apparaît
aujourd'hui comme une plaine, une plaine de pluie. Où que s'étende
mon regard, tout est couleur de pluie, d'un noir pâle. J'éprouve
des sensations bizarres, toutes également froides. Il me semble
parfois que le paysage essentiel est tout entier de brume, et que les
maisons cette brume qui le voile ».
Je vais m’engouffrer
dans l'Alfama et déguster quelques tentacules grillées avec des
grenailles à l'huile d'olive. Quand même, il ne pleut pas des
journées entières ici, les entrées maritimes avec le fleuve
éventré crachent doux et puis c'est tout. L'onde est une fête
mélancolique qui bruine et ternit à peine la grande lumière de
Lisbonne. Le vent pleure Ferdinand sur la Plaça da figueira.
J'imagine sa présence au creux de cette nouvelle ville pour lui,
savoir ses yeux neufs, connaître ses pensées nouvelles, ce timide
fonctionnaire. Je suis à peine attaqué par cette grise angoisse, je
suis de la Beauce quand même et les fines pluies canadair toussotant
qu'elles sont, me lustrent le cortex.
Bien loin d'ici, sous le
fracas d'une chanson révolutionnaire « Grândola, Vila
Morena » d'une dictature qui va disparaître, au château
d'Hérouville, José Afonso enregistrait son album mythique
« Cantigas do maio ». Dans les murs du studio de Magne
1971, Christian Padovan, Michel Delaporte, Branis et Granier avec
quelques autres musiciens portugais œuvraient pour cette pépite
historique, poignante et sacrée.
J'oscille entre la
brûlure du ciel et la douce lecture intranquille sous l'ombre d'un
olivier centenaire. Un vent fort et chaud assèche la sueur de l'âme.
Le parfum des herbes cuites accompagne la lenteur de mes journées
abandonnées. Sur un autre arbre en face de moi, une petite cage à
oiseaux sans fond se balance. Je suffoque sous les fortes rafales. Un
perchoir est encore dedans, une passiflore s'y est déjà agrippée.
J'aime l'idée d'une cage sans fond.
Tout est doux et calme,
je bois toute la culture des contrées plissées, je mange ici, je
dors là, je ne prends que l'offre de ces collines abruptes.
Jusqu'aux arômes
Un vaste dôme montagneux
se dresse devant moi, la montagne de l'air. Mon corps est lourd. La
fosse atlantique est à quelques vallées d'ici, un peu de sel dans
le vent. Les murs blancs aveuglent, et les rues pavées comme des
peaux de serpents s'entortillent dans le village. J'ai posé pour un
moment les pages de Pesoa pour écouter Fausto et celle belle
découverte locale. Carlos Fausto Bordalo Gomes Dias de son vrai nom.
Il ressort ces jour-ci dans le pays. Toute la lourde histoire sur un
folk de voyageur comme ce vent de caractère me remue. Mais je suis
bien arimé au tronc tordu et robuste de mon olivier.
Fausto
1982 « Por Este Rio Acima » sur Triangulo /
Columbia
« Started off
free », et le ciel se couvre. Oh, rien de menaçant, juste
baisser les yeux et ne pas se disperser. Focus sur un crush récurent,
JAPW, « To Survive » la gorge serrée,
« Damned Devotion », « The Deep
Field »..au feu... et ce « Lemon, Limes and
Orchids » dans un reliquaire. Cet écrin, de la pop
soul qui va faire jazzer dans ses plus beau habits légers.
Rien ne dépasse, ciselé,
taillé dans l’albâtre avec des outils délicats et une chaleur
des cellules. Clim à fond dans la caisse, « With hope in my
breath » fait onduler l'habitacle, le pare-brise est
bouillant, je sens son haleine sur le poitrail, l'horizon se trouble,
tout devient mirage. « Long for ruin » et mon cou
perle, je lève le pied et tangue dans ma chemise serpillière.
J'ai dans la bouche une
grande idée de canne et d'agrume jaune citrique à vert profond
mentholé avec une avalanche de glaces, une banquise fondant à vue
de palais autour de ma paille en carton. Cet album classieux est un
cocktail caniculaire.
Joan as
Police Woman 2024 « Lemons, Limes ans
Orchids »
Tendance à étriquer
partout, les mots de chagrin sur une peau crachin, agripper la rampe
pour résister à la vitesse. Les semelles ne tiennent plus, ça sent
le roussi. Là où il n'y en a plus, avant de l'atomiser, la poésie
sous un angle d'ardoise cendrée, l'éraflure sur un son à
raccommoder sur le « Reflet du monde lointain
».
Comment faire pour nous
désencombrer ? Se désenclaver la gueule, peut-on encore se
soustraire de la rotation ?
Lymphe épaisse, entaille
de saignée par l'horizon, mon corps élastique s’allonge, la tète
dans les nuages, les talons dans le limon la queue girouette. Des
racines et des influences, troublante Léonie Pernet. « Poèmes
pulvérisés » me foudroie debout. Puis me traverse. Le
thermomètre est pulvérisé, allongé, plombé, je me laisse
traverser.
La « Reverie »
est passée, la bascule est là, le soleil repart dans l'autre sens,
les moissonneuses le savent bien. La chaume est une couleur que
j'adore renifler. L'ocre nacré cuit souligne les bois. Le ciel est
ambré, je découvre après Rebecca et Aliayta, « Still,
there is the sea » d'Ambre Ciel. Jessica Hébert fait
danser l'orchestre en fragments d'émotions avec son chant qui fait
place discrète.
J'ai vu des immeubles
surgir, puis disparaître, l'aurore comme le crépuscule là où tout
se bouscule avant le noir et le grand jour. Agnès Obel, Soap &
Skin... elle prend possession d'une âme philharmonique ambiante pour
chanter alors que tout se fige.
Tout plane au sommet de
quelques chose. Un mirage. Dans des nuées de poussière de blé
battu, Ambre culmine.
Le soleil au plus haut,
nuit toute petite pour fêter la musique, la fête des éboueurs, au jour qui se lève des
camions en ligne comme après la guerre.
Cette nuit-là, quand les
sœurs Foon se sont tues, il restait au dessus de mon jardin les étoiles médusées et un
doux vent faible qui faisait chantonner les charmilles. La
chauve-souris était déjà collée aux tuiles du hangar, plus aucun
battement, juste cette caresse musicale dans toute sa délicatesse.
Il me semblait que les lichens fredonnaient, les mousses reprenaient
un peu de rosée histoire de préparer la journée suivante. Les
vieilles guignes noires toutes cuites suintaient tout leur jus au
bout des branches lourdes de sucre. J'entendais le bruit des larmes
noires tomber sur la vieille table en fer, comme des clapotis grillés
en grésillements de musique de chambre nocturne. C'est comme ça,
les cerises saignent quand les moissons commencent.
La musique était là, la
plus belle qu'il soit, il n'a rien fallu nettoyer au petit matin.
J'ai posé ma tasse de café sur les traces de caramel sang comme une sève
figée. Le jour était là depuis quelques heures.
J'ai remis « Reverie » de Rebecca et
Aliayta. Constellation. Silver Mt Zion.. Set Fire to Flame. C'est un
pur chef d’œuvre. Ce n'était pas un rêve.
Je brandissais il y a une
grosse poignée de mois « Villes Sauvages »
adossé aux indispensables de mes étagères de par ici. Août 2023,
énumérant la liste avec lui des opus qui comptent. Il n'a pas été
depuis rangé ailleurs que sur cette cime-là, définitivement adopté. Tout s'est allumé depuis.
Je fredonne souvent les
« Silures », « Baltimore »,
elles sont ici proposées en versions outre-Manche, et je traverse
des frontières avec Casagrande dans ma besace, à peine dépaysé.
Je connais le chant habituel de Nicolas, et « Wild
Cities » me transporte vers le Polnareff 1975.
« Wandering man », « Rainy day song »,
une idée de réconfort chansonné sur une autre langue, et toujours
cette duveteuse mélancolie.
Une façon pop de prendre
à soi la chanson de par ici. Le mérite du globe. Il faut dire que
Fabien Martin est toujours aux manettes. Quel son, il fait des
merveilles...Littoral Little, une belle famille artistique qui me
colle à la peau.
Jeff Halam est là, son
jeu de cordes graves sur « Never let me down again »
entre autre, et pour l'écriture aussi. Et puis « Sea Song »
avec Cheval fou, Armelle déjà sur « Le gant sur la
peau »(« Glove
on your skin » avec Nadine Khouri cette fois-ci), la
dernière fois que cette chansons m'a flanqué les poils, c'était
avec Married Monk. Il faudra un jour élucider le mystère pour ce
joyau là, je lis tout, je cherche et farfouille, j'aperçois
quelques pistes, mais rien sur la mitochondrie.
Un crayon de bois dans ma
boite aux lettres, je vais rajeunir d'un seul coup. Rembobiner à
l'ancienne. La galette et la K7 pour un pack vintage, je suis comme
un gosse, j'use à nouveau mon auto-reverse. Deuxième album pour
Nicolas Contant, et une cassette en sus, il est fou, c'est tellement
bon.
Casagrande
2025 « Wild Cities » sur Littoral Records
C'était mieux
maintenant. Les textes défilent et rien ne changent. Les belles
histoires d'amours figent la plaque. La plus belle de toute dans les
douceurs les plus troublantes. On traverse depuis des millénaires,
passe à travers, ou pas. Faut pas contracter sinon ça pique, se
cramponner aux affections, sucer l'ardeur.
J'ai marché au bord de
la Remarde ce matin, il faisait encore frais. Le ru entortillé m'a
accompagné mollement jusqu'au ruisseau. Cortège d'insectes, opéra
d'oiseaux, le vent faisait frissonner les hautes herbes. Un talus de
canches ondulait, juste quelques vulpins des près à la danse timide
restaient raides. Plus le soleil montait, plus le lit s'élargissait,
trois libellules ne lâchaient pas l'ombre. Je suis passé à côté
du terrain de tennis abandonné. Deux belles pommes sur l'asphalte
mousseux semblaient attendre le nylon tendu. Juste derrière une
fontaine aguichait quelques guêpes nerveuses. En fredonnant « La
traversée », je me suis arrêté au café tout près
de l'église de Saint-Martin-de-Bleury. J'ai pris un bock avant de
rentrée chez moi. Quelque part loin d'ici le long des rivières et de la baraka,
faut éviter le mortier. Quelques grenades sur un terrain de tennis
en ruine.
J'allais bramer dans les
bastringues Avec un buriné bipède qui bandait pas pour le
burlingue Dans ce bar branché bipolaire À faire basculer les
belles-mères J'allais besogner le brouillard avec un tambour de
bazar
T'allais baver pour les babas et les
broutards à boucles blondes Des petites bulles de baraka (et des
bonbons pour les James Bond)
Baby, boum-boum, baby, boum-boum, faut
faire un break Y en a ras l'bol de ces blancs-becs Qui bandent
que pour le bazooka, pas pour la bagarre et le branle-bas ...
Ils s'braquent à bloc sur l'baston,
des barbes bleues bardées de bronze Des cow-boys bourrés de
béton, des zombies bidons et des bonzes Qui leur balancent une
blanquette à écrabouiller les banquettes (À vous briser les
roubignoles, à vous faire barrer d'la boussole)
Pendant qu'tu brûles de la banquise,
braconnant le bonheur sans but Et me baignant aux quatre bises
avec les boucs de Belzébuth
Baby, boum-boum, baby, boum-boum, faut
faire un break Y en a ras l'bol de ces blancs-becs Qui bandent
que pour le bazooka pas pour la bagarre et le branle-bas
(branle-bas) …....
Ras l'bec de brouter du bitume et
d'barjotter dans une bagnole Ras l'bec de branler de la brume et
d'barrater des branquignoles Pendant qu'les barbeaux du business
qui nous bastonnent des bassesses Biberonnent des bourbons dans
leur buick, j'bosse par peau d'balle et crotte de bique
Tu vas broyer tous ces bouchers qui se
font bronzer la baudruche aux Bahamas Avec ton blé (pendant
qu'j'balise dans les balluches)
Baby, boum-boum, baby, boum-boum, faut
faire un break Y en a ras l'bol de ces blancs-becs Qui bandent
que pour le bazooka, pour la bagarre et le branle-bas »
Piers Facini du Finistère
avec des songes d'Anthony. On sent moins le varech que Denez, l'art
de Brieg est pétrifiant, il déborde sur toutes les autres terres.
Habité, d'envergure mystique sur des flots d’acoustique. Il y
dedans quoiqu'il arrive du celtique. Antonio Zambujo du Portugal
danse sur les mêmes landes d'ajoncs et de conifères, et tant
d'autres encore. Du sable sous nos pas, qu'il soit dans la forêt ou
sur le bord des chemins, l'océan n'est pas loin, et le regard meure
sur la terre intérieure lacérée de quelques lancées électriques.
La belle découverte « Un
Noz A Vo », inconsciemment l'envie de fraîcheur
sûrement, mais la mer est belle aussi quand la dune brûle, la vague
est toujours froide.
Comment vont réagir les
puristes à cette parution ? Je prends ce retour comme un bonus
heureux avec dedans les ingrédients que j'aime bien. J'ai eu un gros
retour « This is Hardcore » y'a quelques
mois, l'aubaine tombe à ravir. Là, je suis bien dedans la pulpe,
j'ai ce qu'il faut, sans plus.. remugles et madeleine même, sa voix,
cette idée là, le style, la gratuité du processus.. et j'adore
plus que tout l'ocre et le cobalt.
C'est l'heure vibrante de
l'astre qui n'en finit pas de cuire. Lourdes persiennes, stores
dilatés, murs boursouflés. Si les gestes ralentissent, les ondes
d'un film spacieux calment le mercure, tout en s'accrochant
délicatement à ses degrés, histoire de garder la lumière.
Pas d'imbroglio chez
Hubro. Sous ces tuiles de jazz expérimental, d'ambiances follement
dilatées, Geir Sundstol trace ses sentes de paysagiste. De drôles
d’oiseaux dans cette auberge, précieuse agence de voyage au socle
musique inébranlable et minéral. Juste les couleurs qui changent
d'un artiste à un autre, une température, un angle, une hauteur,
quelques latitudes et des milliers de lueurs.
Le plafond s'approche du
haut des cranes, ça tape dur sur la faîtière. « Sakte
Film » maîtrise à merveille la thermo-hygrométrie.
Le Deveron a eu raison de
mon agitation. 10 ans d'age à la rescousse. Tout de suite le gras
Trip Hop de Jay-Jay et les souvenirs, la découverte irréversible de
« Whiskey » Portishead pas loin et ces
longs tempo mous qui me vont comme de longs lents langoureux baisers
abyssaux. « Backstage »
m'embarque. Il y a du silence chez JJJ, celui du salon dont il vous
en dépossède. Deux ou trois touches de piano pour la braise. C'est
un doux poison le « Backstage », sa
concoction habituelle, mon addiction crooneuse.
J'ai bien failli me
fâcher avec sa tentative de coupe Aladin Sane dans les antennes. Il
est revenu malter mes soirées avec « The long term
physical effects are not yet known ». C'est de
l'histoire ancienne, mon cristal à nouveau est un vitrail ambré, la
lumière tourbée étreint mes glandes lacrymales. Ma nuque en
cadence molle se laisse caresser par la glue.
Début juin automnale, ça
tombe bien, la brique est trempée, je le garde pour calmer la
prochaine canicule.
Robert Foster, Elliott
Murphy, Murphy en Peter.. avec mon pote on écoute souvent ensembles
« nos petites vieilles ». C'est comme ça qu'on les
appelle les quelques unes à nous, entre nous. Lui est un gros fan des
Bauhaus, moi c'est plus The Go-Betweens.
Pas facile de causer de
ces piliers, pondre un billet lourd de contexte et d'histoire, sans
pour autant que ce soit notre came, patauger dans les remugles,
éviter les clichés. Crédibilité.
Impossible à survoler,
sauf peut-être le dernier Idol abjecte. Le devoir de dérouler,
mentionner, des etc à tout bout de champs, ne pas faire comme si on
découvrait.
Ou alors si. Se poser
candide tout frais, en vieux puceau béa qui débarque, histoire de
moins juger en se décroûtant la couenne. Y'a bien des jeunes
d'alors qui balances comme nos viocs jadis.
Robert, ça passe
tranquille, lumineux comme un petit dèj dans le train, Peter de
Bahaus bof, un peu trop K2000 ou alerte à Malibu, au choix. Elliott
a pris une entière de mes soirées et j'y retournerai, « Infinity »
superbe à flotter sur son opulente discographie.
Et voici notre
intersection avec mon pote branleur, l'accord parfait sur nos petites
vieilles. « The Cleasing » avec le recul,
une des plus belles sorties l'an passé. J'y croyais pas trop, je
suis conquis.Je le garde, il sera Peter pérenne. Au fait, il sort quand un autre album solo la Jagger ??
J'ai pas vu venir ce
train caché par l'autre que je prends très régulièrement. Dès
l'entrée instrumentale « Rio », jusqu'au sublime
morriconien « Free » et change de quai. Le bolide
qui cache, c'est Warhaus que j'écoute non stop le plus souvent
possible. Quand « Ha ha Heartbreak » m'a
pris la tronche en 2022 je me suis dit qu'il s'agissait là d'une
définition presque parfaite d'une pop idéale à mes yeux, partagée
avec celle de Baxter Dury à certains moments de l'année.
Gémellité J.Bernardt et
Warhaus ? Maarten et Jinte à s'y perdre, physiquement pareil.
Pop donc, luxuriante,
spacieuse, mélodieuse, moderne, moelleuse et bien produite. Easy à
n'importe quelle lumière proposée. Trip chaloupé de crooners
baladins.. de « Zero one code » à « I'm
the ghost you forgot » récurent et entêtant.
Je suis bloqué en boucle
sur « Karaoke Moon » depuis des mois, le
genre d'album qui passe à travers les écrits, mais qu'on ne range
jamais. Comment parler de cette petite perfection pop ? par le
biais de son binôme scindé Jinte Perez, alias J.Bernadt, deux opus
2024 avec celui de Maarten Devoldere de la Flandre-Occidentale,
indissociables. Les fièvres du Balthazar.
Un air de coquelicot et
de lin a pris la clé des champs. Terminé le jaune à faire pâlir
l'orge et le froment. L’épeautre vit sa vie et les nuanciers
défilent.
Ce tendre violet des
étendues de linacées est apaisant, il contraste avec la robe
sanguine des pavots. Les lumières sont pornographiques, j'aime tout,
je suis polygamme.
J'ai longtemps était
partagé par la sorti du premier opus de Jesse.D Vernon, « Morning
Star » 1999 au crédit noir de monde. Je collectionnais
les disques « Microbe » et les conseils de Magic !
Seulement voilà, jamais dedans, peut-être une fois de temps en
temps. Il va falloir que je l'écoute à nouveau, car je tombe sur
« Luminal Zone » et je suis hyper emballé,
à tel point que les souvenirs du siècle dernier s'effacent.
Absolument printanier,
totalement rouge et bleu, aucun goût de moutarde dans le
vestibulaire.
« Mind mind »
comme une belle légèreté plus que tiède, « Coming
around » en ballade Macca avec Linda derrière, le doux
funky de « Carry it home »... Cet album est bon,
simple, sympa, easy en écoute à laisser défiler sans s'anicrocher
avec quoique ce soit.
J'ai dû louper quelques
chose de Morning Star, rendez-vous manqué. Tiens..« My
Place in the Dust » avec John Parish aux
manettes..pareil. Je ressors Magic !, les deux premiers albums,
je m'y replonge tout en gardant « Luminal Zone »
comme s'il s'agissait de retrouvailles.
Morning
Star Music Club 2025 « Luminal Zone »
sur Rough Trade
J'ai fait une belle
découverte en 2023, Nicolas Paugam et son univers bariotifolié. On
écoute sa discographie comme on s'abrite soi-même sans être
bricoleur. « La Délicatesse » m'a cueilli et je suis
encore sur sa balade sauvage. C'est une transition, avec son frère
Alexandre, ils ont fondé Da Capo que j'ai découvert en 2023 donc. À
peine le temps de découvrir la discographie grosse déjà, que
« Songs from the Shade » me tombe sur les
tuiles.
Pas un pour rattraper
l'autre. La fantaisie du rêve est venue à peine bicarbonater mon
réveil. À moins que le matelas ne me pelote encore. Dandy Arty
fantasque en douce épopée plombée.
J'ai 90 Days Men en tète,
la même dinguerie, Space et la même classe spiders qui fait
l'élégance baroque et le nuancier fou de la lune et du soleil.
« The Moon and the Sun ».. c'est pas possible une
chanson pareil !! me suis fait sucer la fémorale ou bien ?
Élixir sonore injecté..
voix ajustées.. les mélodies à couper les gorges des carnes
envoûtées. Je tangue, les montagnes acidifiées sont cendrées
comme le Black Mountain écaillé.
Je ne regarde pas les
ondes de peur qu'on ne parle point de cette folie, cette pureté
mélancolique .. comment grimper la chaîne si de cendre elle est
monticulée ? « Skeletons » et je dors dans
la ravine les os encore fumants. « Shadows » je
suis phoque en suie ; « Alone » où est
Rover ? C'est coffré et fragile, classique et cabarété.
« Hear me Brother » ? Nicolas ??
Le pavé Merlan Poire se
pavane dans l'assiette, avant la morsure du beurre noisette. Le
clapet s'impatiente j'ai du sel au bout des doigts, mes méninges
suintent. Déguster comme on tient une pancarte, bientôt la
traversée de Paris tranquille, sans se faire péter le steak plus
que ça, avec sous le paletot le DVD du dernier Mission :
Impossible enroulé avec la hampe.
Sur la planche en
éventail comme dirait Brigitte, j'ai déposé quelques tranches
fines de Comté, elle vont s'attendrir avant la croque. De l'autre
côté de la baie vitrée grande ouverte sur un printemps qui bombe
le torse, le hamac m'attend pour ma digestion au méthane. Ce sera
pour tout à l'heure quand j'irai fredonner avec le merle les airs
enjoués du dernier Bertrand Louis. Je repenserai à Baudelaire, puis
Verlaine, je relirai quelques textes des « Fleurs du Mal »
si le tangage ne m'embarque pas. À moins que je ne me fasse pomper
copieusement le cépage Glyphosate par une femelle moustique que nous
aimons tant.
Clavecin « Because »
pose la palette direct et ouvre l'heure époustouflante. Une petite
baffe les amis. Je n'aurais pas piqué un hanneton en voyant la
pochette et le nom qui va avec, du Syd Beatles je vous dis. J'ai un
vague souvenir d'un album des Simian qui avait en plus electro tâtait
du côté pop Fab Four dela sorte. « Lovely Suzy »
titille même le Harrison inspiré et l'ensemble un Caleb Landry
Jones hyper produit et polissé.
Certes ça va faire râler
les anti-revival rappel vintage rétroviseur en folie, mais et bref,
le son culmine, la prod reluit, le jeu excitant happe, ambitieux,
comment trouver encore de telles mélodies avec tout ce passé pop
massif et fastueux. Il faut rester jusqu'au bout, « To
please you all » et « The pagan truth »
sont des bijoux de 6 min.
Oubliez la pochette, ce
double vinyle est luxuriant, pas plus sombre que ça.
Oubliez le pseudo du bordelais pareil, je vais me faire une cover à
moi avec un blaze perso en écoutant ce brûlot, genre Arthur Kinks,
Art Barett.... Je vais pourtant aller acheter cet opus du côté de
la rue Saint Sabin, chez le taulier Born Bad.
Arthur
Satan 2025 « A Journey That Never Was »
sur Born Bad
Il y a donc eu un nouvel
IDAHO. Les 13 ans d'absence auraient dû décupler ce beau retour
embruiné, quelque soit la distribution. Les californiens ont fait
les beaux jours de mes 2000's (auprès de Grandaddy, Spaklehorse, Low..
dans le genre) et un peu plus encore.
Un an qu'il est sorti !!,
personne ne m'a rien dit... c'est ma came pourtant, ce sec son en
poisseuse lenteur qui me traverse. Je vais réserver tout le reste
pour me focaliser, ça tombe bien, une chaleur inattendue nous tombe
dessus alors qu'avril met son jaune crucifère à terre. L'ombre d'un
arbre pour ne pas me cuire le casque, peut-être les gambas au
soleil, le nouvel album d'Idaho tout le laps de temps qu'il faudra,
il est tout pile-poil comme j'aime, doucement, le strict minimum.
Rien à voir avec un
confinement. Je me souviens très bien encore il y a cinq ans et ce
recroquevillement, le cul dans l'herbe à souffler, à fouiller
l’alentour de proximité, approfondir les quelques encablures.
C'est finalement le seul moyen qu'on ait trouvé pour stopper les
guerres et les avions. Je me souviens d'entendre souvent mes
grand-parents afficher cette phrase qui me sidérait.. « il
leur faudrait une bonne guerre... ». Peut-être je sortirai
bientôt une même idée à la con.. genre « Il leur faudrait
un bon confinement à tous ces cons.. ».
Rien à voir avec le
confinement mais je suis bloqué à l'étage de mon toit, pour cause
de travaux. En bas c'est le chantier, l'odeur de plâtre, le vacarme,
la cloison qui tremble, là-haut, c'est la mansarde, la lumière
oblique, le cocooning tuilé, seul étage où personne du dehors n'a
le droit de monter. Les vinyles, les livres et les Compact-Disc y
sont soigneusement déposés. Le rocking-chair s'y balance, les
canapés sont racoleurs et le son délicieux. L'ordi éclaire la
sous-pente blanche, les disques laissent passer la profondeur prune
de la peinture murale. Le parquet grince et je laisse le grésillement
des galettes me bercer.
Oui, pourquoi je vous
raconte ma vie comme ça, je suis en fait tombé sur un album oublié,
comme tant d'autres, comment peut-on tout écouter nos pépites si
tous les jours il faut laisser le confinement dans le confins des
souvenirs !! Je suis isolé en haut avec Catherine Lara et son
premier album. Remugles d'émotions pétrifiées. Au moment où la
rockeuse inondait les ondes, je revenais avec sous le bras « Ad
Libitum », totalement improbable (Je crois que j'ai le même
problème avec le premier Lenorman).
Ses chansons en
coquelicots crépons sont éditées par April Music, la poésie est à
son comble (aménagé). Boublil à l'écriture, elle aux notes. C'est
une jolie époque pour plein d'artistes qui sont devenus autre chose
après. Je sais pourquoi maintenant j'aime tant Marissa Nadler des
forêts. Il y a un vinyle de Joan Baez rangé pas loin .. comment
j'ai classé tout ça moi ? Pochette noire, visages en
clair-obscur, avril c'est surtout la mort d'Orion. Pas évident de
mettre Catherine Lara sur la table, qui la connaît ainsi, juste
avant le petit jour, le cœur à découvert ?? Un quatuor
acoustique habité, Denise Glaser en onde protectrice, « L'étranger »
religieusement qui me fait penser à « La veuve de Joe Stan
Murray ». Tout coule au gré de son chant et des
enjolivures la vêtant.
Quelques heures confiné,
je n'aurai sans doute pas retrouvé Catherine à l'étage, la Lara
land des beaux jours, la mienne cet après midi sous la pente, « Ad
Libitum ». D'un autre temps.
J'avais sûrement besoin
d'une nouvelle peau. Un instant magique. Je zappe musique dans le
vide depuis quelques jours, j'écoute de vieilles choses qui me
réconfortent certes, mais en décalage total avec le foutre
pollinique des nouvelles lumières d'avril.
Sur nos abris,
l'indécence des branches, le fécond même la nuit, et au bal des
couleurs sucrées à butiner, la liste est longue. L'opéra des
oiseaux, la course des feuilles, et le silence débourré entrelardé.
Je fouille sans espoir déterminé, je picore la croûte, il me faut
un truc qui gigote et s'entortille. Et puis à travers ma cave à zic
(et un souvenir Magic!), l’arrêt net sur cette petite grenouille
et la boucle qui démarre.
C'est une écoute
raccord, l'accord parfait avec l'air qui jute là juste alentours et
même au creux des rhizomes enfouis.
C'est un signe pour moi,
cet album séminal en boucle et cette respiration profonde sous mon
Cercis éclaté par le haut soleil dans l'axe. Dès la
troisième chanson « Line Back 22 » j'ai squatté
pour ne plus rien lâcher. « How long can you keep up a
lie ? » et un clavier qui se mêlé au tronc... « 10
Ways.. » et son petit accès de fougue sur « Exhaust
the topic »... « Puddle.. », je ne
connais absolument rien d'elle, je suis vulnérable, comme j'ai pu
l'être très souvent avec Kazu Makino.Et puis tiens, la pochette plombée est très jolie.