samedi 2 octobre 2021

Julos Beaucarne 1974


 

Une semée de gouttes parfume la terre, saupoudre la flaque mourante. Des airs de poussières passent comme une tempête de sable de nos vieux chaumes grillés. Julos Beaucarne chante chez moi et le vent qui se lève de l’autre côté de la vitre n’impressionne plus personne. Le gris monte en altitude, le ragréage du ciel pour les mois à venir. Il peut faire tous les gris inimaginables, Julos chantera tant que les arbres fruitiers se pommeront.

Les transats sont rangés, le brave rouge-gorge est revenu, la bruyère fleurit, il n’y a pas de pause pour les jardiniers.

Julos Beaucarne 1974 « (Front De Libération Des Arbres Fruitiers)

vendredi 18 juin 2021

Dustin O'Halloran 2021


 

Lessivées par l’orage, les graminées dansent lourdement, abasourdies par le déluge, les grandes pluies d’été. Elles dansent quand même, mollement, le jeune merle sautille, le Pinson des arbres observe et les moineaux picorent. Doux festin partagé. Puis l’étonnement des petits volatiles provient d’un quartier de pomme jeté entre les trèfles et les pâquerettes. Quelques coups de becs dans cette pulpe sucrée puis retour vers le pain mouillé balancé lui aussi. Le ciel se couvre un peu.

Tout semble respirer l’ordre des choses, c’est un bel instant matinal pourtant déjà bien éloigné de l’aube. Plus encore du crépuscule. Dustin O’Halloran s’installe parmi ce cours ordinaire, son piano distille l’apaisement, il n’est pas impossible qu’il ait lui aussi bu à plein poumon ces grands parfums de foin à venir, l’haleine de cette marée d’herbes sauvages.

« Silfur » chef d’orchestre du jour.


Dustin O’Halloran 2021 « Silfur » label : Deutsche Grammophon

mardi 15 juin 2021

Bertrand BURGALAT 2021

 


Hyper rayonnant de classe, et ça devient un petit peu une habitude chez lui. Absolument estival et ça tombe bien, quelle autre bande son pour ces jours radieux, caniculaires, « Rêve capital » longe le mercure, épouse le ciel, danse avec le vent chaud. Le hamac tangue de plaisir, je respire le son, solaire.

Adéquat, idéal, superbement déposé sur le calendrier, l'échine en sueur, les épaules cuites, le pas léger, cette petite crème délicieuse rend beau nos cerveaux ankylosés, on flamme en se trouvant presque parfaits, des petites allures d'homme idéal, on finirait bien par y croire.

60 ème pièces du catalogue Tricatel, moi je dis que Katerine, Sébastien Tellier, Bon Entendeur et même Julien Doré devraient y être hébergés.

Bertrand BURGALAT 2021 « Rêve Capital » label : Tricatel



samedi 12 juin 2021

Noé Preszow


 

Permettez ma frilosité, mon recul, on ne sort pas indemne d'un tel gadin. Tard ou tôt on paye nos abus de confiance.

Suivant aveuglement les toits artistiques, mes phares à moi, je suis tombé un jour à boire tout Tôt-ou-Tard, sur un jeune nouveau, le premier album de Vianney. C'est pas que j'ai un truc contre lui, tant mieux pour le label, mais il me semble avoir été trahi.

J'aime toujours voir la lune sur la tranche d'un album, on se refait pas, et puis il faut bien dire que le streaming n'était pas très très répandu en 2014. Là pour le coup, j'écoute Noé Preszow et je tombe sous le charme. En longeant les bacs un midi par hasard, je tombe sur son support physique avec sur la tranche donc, la lune emblématique. Il aura fallu un chemin de croix, oublier ses douleurs, les préjugés, n'en faire qu'à sa tète, faire le lien en oubliant les ondes, les réseaux, les réactions, les tendances, oublier Saez, Gauvin qui sonnent chez Noé, suivre cette route-là pour une petite heure, quitte à la renouveler .

Noé Preszow tombe dans mes enceintes, l'expérience tôt ou tard m'aura rendu dubitatif et prudent, pourtant je l'ai acheté pour conjurer le sort, c'est toujours plus beau dans les enceintes quand c'est beau. La plus belle nouveauté de par ici que j'ai écouté depuis pas mal de temps.


Noé PRESZOW 2021 « A nous » label : tôt ou tard

https://www.totoutard.com/artiste/noe-preszow

mardi 1 juin 2021

Maxwell Farrington & Le SuperHomard


 

Configuration inédite légèrement complexe, il s'agit derrière ce nom digne d'un groupe de rock progressif, d'une rencontre entre Christophe Vaillant, cerveau du Superhomard hospitalier, et un chanteur Australien, Maxwell Farrington donc. … Improbable ? Pas tant que ça, une aubain pour sûr.


Lee Hazlewood à coup sûr, Married Monk parfois, Richard Hawley, Divine Comedy ou Adam Green et peut-être aussi John Grant.. sur nos courtes collines, posés sur nos sobres horizons, un autre climat. Les harmonies caressent le crooner chaleureuses comme le pôle nord (« North pole »).

Évidemment tant de références pourraient alourdir « Once », mais les écoutes à répétitions enchantent la soudaine éclaboussure solaire venue effacer comme on essuie d'un revers de la manche la buée des vitres, le triste mois de Mai passé.

En juin fais ce qu'il te plaît, mais s'il te plaît, Maxwell Farrington & le Superhomard est à écouter incontournablement. Symphoniquement country pop intemporelle. Les monts roses comme la chair du sol mis à nu, bleu-ciel sur la voûte, marée de chlorophylle enivrante .. des airs à se balader à travers les ondulations de graminées.


Il fallait bien un tel disque pour venir un peu titiller ces pages en dormance.


Maxwell Farrington & Le Superhomard 2021 « Once » label : talitres

dimanche 4 avril 2021

Bertrand Betsch 2021

 



Une myriade de petites paraboles blanches et jaunes suivent de leurs capitules le tracé du soleil. Les tètes se penchent comme une molle chorégraphie solaire. Elles le fixent comme un gourou, l'une le cou plus haut, gourmande, fayotte qui toise ses voisines avachies, celles qui veulent rester aux ras. Quelques cardamines hirsutes droites et fermes viennent tenir tète à toutes ces folles hypnotisées. Mais déjà, à quelques pas de là, l'ombre d'avril avance et une à une, les collerettes de fleurs blanches disciplinées se ferment sur un cœur jaune mimosa. Le couvre-feu solaire des Astéracées. Quelques unes se sont discrètement empourprées, le phare aux fleurs, des pâquerettes s'encanaillent. Des touffes de Véroniques sont là aussi, minuscules bout de ciel sur cet océan vert, discrètes avec les quatre petits lobes célestes.

Je marche sur la pointe des pieds sur mon lopin de pelouse, pointillisme blanc jaune et bleu sur tapis vert coloré, faites vos jeux.

Sur la pointe des jambes, me faire léger tant mal que mal.

De ma léthargie biologique, je garde l'essence du vivant, de la poussière qui revit, comme du orange sur un bleu de globe aigre-doux. Je me lève pour changer de disque, de couleur. Pointillisme aussi en coulée, pareil à marcher sur la pointe des pieds comme sur des œufs de fine surface oculaire, avant d'en avoir derrière de la neige.

Double album en faux jumeaux tel « La Fragilité » et « Toute Latitude », de belles choses identiques à peine séparées. Bertrand, c'est définitivement devenu récurent, cyclique, permanent et indispensable.


Bertrand BETSCH 2021 « Demande à la poussière » «  Orange Bleue Amère »

mardi 23 mars 2021

Arman Méliès - Laurel Canyon 2021


 

Des coins du monde inspirent, des épicentres culturels injectent, Arman est allé chercher l'âme de son troisième projet outre Atlantique au creux du Laurel Canyon. Son écriture n'est plus à défendre, il n'est pourtant pas souvent dans les nominations, il faudra un jour aussi à leur tour que des Dieux croient en nous.

Une belle viscosité mélancolique dégouline de mes enceintes.. de l'espace, un autre ciel poétiquement désespéré, sombre aux mélodies d'yeux de hiboux.

Plus je l'écoute au fil des ans, plus je pense à David Eugene Edwards du Colorado et ses 16 Horsepower. Des cavaleries de spleen sauvage s'abattent des hauteurs, la nuit va être chouette. Une armée de prunus enivre la contrée, le vent fort embarque sa poussière vitale. Cavalcade silencieuse des gamètes dans l'air, les vastes complaintes d'Arman.

Arman Mélies 2021 « Laurel Canyon »

mardi 16 mars 2021

Arab Strap - 2021

 


Une pluie de marée basse compose un air visqueux sur la lourde terre détrempée. Aucun vent, le ciel s'égoutte tranquille, haut et lourd, j'écoute le clapotis sourd et moelleux sur les mottes brunes et c'est joli. Tout est calme et nacré, pas moyen de s'abriter sous les arbres émondés, le dos calé sur l'arrondi d'un château d'eau, je fais une pause histoire de plus près voir ce ciel laiteux et engourdi qui postillonne, à moins qu'il ne pleure. Pas encore l'ombre d'une obscénité chlorophyllienne dans les branches, juste une idée que les ligneux ont commencé à pomper, les herbes à sucer, alors la giboulée de connivence vient asperger plus que de raison.

Les ravines sont pleines, les routes flanquées de flaques, dedans elles pareil, les ocres et les cobalts mous se sont fondus, des « miroirs dans la boue ». Et des corbeaux sautillent sur la marmelade des champs jadis labourés.

Le tempo du bruit des gouttes s’accélère, il semblerait bien que la marée monte, d'ailleurs les cyprès commencent à danser.

Des tonnes d'eau stockées au dessus de ma tète, ils sont beaux les châteaux d'eau de mes plaines comme des clochers à sec. La voûte se charge aussi de la flotte vitale à distribuer, le ciel cède à la danse folle des plantes assoiffées, ça va usiner en haut en bas, je suis coincé au milieu de ce coït biologique inondé. Les songeries à son comble je reluque et hume, tandis que la sueur capillaire de mon fauteuil d'herbe me remonte le long du dos, je termine la profonde écoute de « As Days Get Dark », le nouvel abyme merveilleux des sombres écossais, et je reprends ma route vers la vallée où les fables sont belles, au dessus à peine de laquelle je dors quand le silence est total et que le noir vient me caresser le cerveau.


Arab Strap 2021 « As Days Get Dark » label : Rock Action

mardi 9 février 2021

Gisèle Pape - 2020


 

Les humains sur les plaines s’entassent comme des batons de mikado. Sur les peines aussi. L’ère est au dépistage, elle, c’est « Le chant des pistes », juste l’horizon à peine ondulé, le monde entier. Dôme, collines, coteaux ou galbes à pister quitte à suivre l’invisible.

« Caillou » est une toile impressionniste, un minimalisme à reliefs, des ondulations pour une osmose bucolique. Gisèle fixe les regards sur un son vital, des parfums courbes et minéraux, une contemplation saphir.

J’arrive le long de mes plaines criblées de silex, Gisèle tape mes tempes sourdement et j’entends Balibar, Arielle, Emily Loiseau voire Breut avec la ligne sèche et vitale d’une fossette. « Peau fine » comme une danse lacrymale à la Bertrand Betsch.

Aime-moi caillou, la mélancolie appelle aux lueurs, la lumière nous suit, le long de la piste, au plus profond des étendues.

De sa musique elle a fait la bande-son de ses films expérimentaux, elle est la mienne entêtante sur mon trajet qui va de la ville vers mes plaines, « Ritournelles électroniques » et je m'éloigne de la foule..j'arrive marcher à nouveau sur mes cailloux. Field recording derrière ces rêveries intimes et poétiques. Des émotions camouflées elle me bichonne, ma petite richesse du jour.

Un EP en 2016, un paquet de 1ère partie, voici son premier album.



Gisèle Pape 2020 « Caillou » label : Finalistes / Paule et Paule

http://www.giselepape.com/



dimanche 31 janvier 2021

The Czars - 2005

 


Plaine délavée, fossés pleins, les champs en marmelade, tout ruisselle, il n'en finit plus de pleuvoir. Je fouille des vieux disques et je tombe sur quelques bijoux oubliés. The Czars n'est plus, John Grant œuvre tout seul, en 2005 sur Bella Union, comme un adieu, ils ont laissé sur la route une petite douzaine de reprises, toutes à tomber. Cette collection débute avec la plus belle des lumières, le traditionnel « Black is the colour » Nina.

« For Emily »  Paul Simon … « You don't know wht love is »..et la pluie peut bien tomber.

The Czars 2005 « Sorry I Made you Cry » label : bella union

jeudi 7 janvier 2021

Elvis Perkins - 2020

 


Déjà presque 15 ans « Ash Wenesday », l'éblouissement folk 2006.

Cette autre cime d'Elvis Perkins en plein creux de vague 2020 illumine nos angoisses. S'il y avait un bilan annuel à proposer, le tiercé le lorgnerait. Je parle d'une pop moderne, celle qui surtout ici conjugue le folk baroque, les accords lumineux, le majestueux des harmonies, la country psyché avec une voix de fond Lennon fils, des cuivres à s'envoler de la croûte gelée pour se sécher les larmes aux ondes tièdes des hauteurs bariolées, des ballades au piano plaintif, de l'intime acoustique en petit country sophistiqué.. « The half life », « Mrs & Mr E » Townes Van zandt en duo avec Adam Green ..


Je veux bien un confinement de plus s'il faut inlassablement se ravager les glandes avec des disques comme celui-ci.

Malgré des priorités discutables, le dérèglement des dispositifs de l'homme moderne qui oblige la bureaucratie à faire des choix, l'anxiogène des ondes n'aura pas empêché quelques petits joyaux de sortir et d'arriver à nos oreilles... Celui-là en est un, « rescapé ».


« Ash Wenesday » avait mis la puce à l'oreille, cet Elvis là est à lorgner. « Creation Myths » depuis quelques jours est le bouclier en boucle du gris compact des jours, mon pied-de-nez à ma télé pas allumée.


Elvis Perkins 2020 « Creation Myths » label : MIR

mardi 5 janvier 2021

Keith JARRETT 2020

 



Doigts crochus et main d'arthroses, comment fait Keith Richards pour jouer encore comme ça ? Le pirate aux yeux malicieux, le cuir cuit comme un marin, ses doigts courent encore sur le manche.

Ceux d'un autre Keith ne cavaleront plus sur le clavier. La main de Jarrett démissionne, son corps ne transmet plus les blanches et les noires au bout de ses doigts.

1968 son premier album, 1964 pour Richards au sein des Stones.. mais depuis combien de temps jouent-ils ?? les os et les vaisseaux s'usent comme les arbres et les navires.


Keith Jarrett ne jouera plus devant nous. En attendant, en 2016 il faisait à nouveau rêver, c'était à Budapest. Le concert intégral sur ECM.


Keith Jarrett 2020 « Budapest concert » label:ECM 

https://www.ecmrecords.com/artists/1435045745/keith-jarrett

Thomas Köner 1993

  La croûte gelée se ramollit, ventre flasque et tiède respiration. Le ciel se charge de l’halènes des Steppes, le silence gronde. Notre ...