Sans pour autant se vautrer dans la grisaille, dans le gris nous voici. Un ciel de plomb ce dimanche, avec des gris talentueux, venteux, resplendissants et nuancés, des choses qui nous parlent.
Mon hamac se balance avec sa peau de serpillière détrempée, au loin les chasseurs balancent du plomb sur nos plaines pesticidées, la plombémie terrestre des campagnes préoccupe beaucoup moins que le toit fondu de Notre Dame.
Du plomb, ils en ont dans leurs ailes ces trois là. Stephan, Frédéric et Arno.
Il fait gris, je me colle aux pochettes d'alors, nouveau triptyque, trois nouveautés magnifiques. Et puis ça tombe bien, Eicher est aussi chez Lo pour un beau duo, il y a Medeiros aussi et cet esprit Beaupain, Jacno qui règne sur "Hallelujah!". Arno fidèle à sa force...
Aussi, "Homeless Songs" reste un petit chez d’œuvre, l'apothéose de Stephan Eicher.
Stephan Eicher 2019 "Homeless Songs" label : electric unicorn music
Frédéric Lo 2019 "Hallelujah!" label : water music
Le carotène va manger le vert sous des
gris célestes flamboyants.
Les cèdres ont passé un pacte avec
Orion, ils soufflent leur poussière safranée sur nos fronts, bien
longtemps après les pins et les cyprès.
Soufre sombre zébré de cendre, regard
de braise, raz el hanout en fard sur nos regards cimentés. Ce soir
ma petite chatte ocre poivrée auprès de toi je me couche.
Rachid Taha 2019 « Je suis
Africain » label : naïve
C'est l'automne à quelques poignées
d'heures près, et déjà le beau jaune d'un rose mordoré est monté
sur les stands. Il a beau se rendre timide soudain et bas le soleil, il
brûle encore, avec des flamboyants souffles pop. Mais c'est bientôt
l’automne quand même, faut pas pousser, Fabien Martin c'est aussi
la belle mélancolie et je fonds sur les premiers « Nuages »
qui arrivent. Le Littoral était magnifique avec son ciel de traine,
sa croisière qui s'emmerde, « aMour(s) »
arrive et c'est l'automne.
Pop certes donc, mais surtout de
merveilleuses chansons de par ici, chatoyantes et chagrines. De
l'amour avec un grand « aiMe » et l'armée de questions
qui va avec, nuages, canicule, mordoré et grisaille, intimité et
envergure.... des voix d'enfants et des regards qui mûrissent,
« aMour(s) » est un concept hyper touchant,
du sourire au poignant, sur les sentiments qui nous animent.
Dès la première seconde, explosion
d'oxygène avec un gimmick vocal à la Polnareff , « Nina
Myers », fantastique danse amoureuse juste avant de croquer
la pomme rose, il n'en faut pas moins pour décrocher la lune ou
marcher sur Venus. Je gravite toujours autour de ma conquête
spéciale à moi et j'aime ce qu'il se dit ici sur mes yeux
d'astronaute tapé. Et puis finalement dans la grande vie amoureuse,
les intermèdes viennent lier comme le silence du son, le blanc du lin.. tant qu'on est dans les bras l'un de l'autre. Je
cherche déjà sur mes cordes les beaux accords de « Nuages »
en attendant à nouveau ses bras, cette belle mélodie à déposer
sur son étincelle, comme mon tout dernier regard sur son cul. J'aime
l'idée que ce n'est plus comme avant, même avec la belle et grosse
boite à chaussure de photos que l'on traîne avec le fil, des
soirées d'automne à regarder toutes ces étincelles permanentes.
Comme une belle « FantaisieLittéraire » avec des airs de chansons pop sous des parfums de
torride automne. Fabien Martin est indispensable par chez nous.
Fabien Martin 2019 « aMour(s) »
label : littoral records
C'était mieux avant, avant de lire un
excellent papier sur le Krautrock. Avant d'essayer de comprendre et
d'en découdre avec cette tiquette là. Oh bien flou quand même le
truc de la chose. Avant j'avais Can ou Neu ! comme point de
mire. Je les croyais épicentres du mouvement, avec en gravitation
les Kraft Popol Ash Ra Faust... mais voilà..
Pourquoi j'écoute le premier album de
Scorpion en boucle ?? parce qu'il est (selon Gonzaï donc) dans
la liste idéale des Krauts comme il se doit d'écouter dans
l’histoire ici du rock d'outre-Rhin. C'est vachement bon le début
des Scorpions, Zep Sabbath de là bas ??
Scorpions pour moi, j'ai découvert en
1984 .. (bah ouaih, c'est comme ça, y'a des ondes qui passent même
sur des îles isolées.. comme bientôt la 5G). Je n'étais pas bien
mauvais en géographie à l'époque, ni très bon non plus, ceci dit
il m'a fallu bien des décennies pour les assimiler comme Germains..
en même temps il paraît que les Bee Gees étaient Australiens ??
oui mais la langue des frères Gibbs....
Alors voilà, ce groupe formidable, se
place dans le Kraut car, selon les bristishs qui se gaussaient des
groupes de ce coin d’Europe qui marchaient et qui chantaient en
anglais, étaient des Kraut, des Choucroutes rock, des mecs à part,
des pas comme le rock tout court... à part ça, je n'entrave plus
que dalle au mouvement en dehors de ce zoom géographique d'alors un
peu concon.
Ils étaient barbus à l'époque, le
chanteur sans casquette, et ils couraient tous sur la colline comme
des Charlots féroces en déserteurs. Des tronches de Supertramp,
voire BJH qui pour des anglais, ont eut leurs plus grands succès en
Allemagne.
« Lonesome Crow » est
superbe, Kraut ou pas, c'est du rock Prog lyrique comme j'aime, le
morceau éponyme dantesque, cosmique et vaporeux, divin, hippie et
terrestre à la fois.
Bon les p'tits gars, c'est quoi le
Kraut ?? plus je lis, plus je divague.. je suis en 1972, déjà
Klaus mène la barque, et je découvre un groupe que je n'aurais
sûrement pas écouter sans un grand papier sur un mouvement certains
et qui a laissé sur moi le doute, le trouble, l'incertitude mais
aussi le plaisir définitif à l'écoute de ce brûlot initial tout
en ne sachant jamais la substance de ce son de quelque part que
quelques uns ont défini ainsi.
Un paquet de disques à écouter, sur
les starting block, « Lonesome Crow ».
Là pour le coup, je me suis abstenu pour
la pochette, superbe soit dit en passant. Mais il faut à tout prix
que je me débarrasse de cet épidermique embarras. Boris Vian quand
j'étais ado m'a retourné le cerveau avec ses mots. On a dit rien sur le physique et pourtant, et
je ne suis pas le seul apparemment, cet artiste a un sosie depuis
quelques années, le micron-minuscule
prédateur social est venu lui voler le visage. Depuis je retourne mes bouquins des romans que j'aime avec dedans Chloé et Colin.. "J'irai cracher sur vos tombes", "Et on tuera tous les affreux"..... Pas grave, ça c'est fait, il me reste les
mots, et puis parlons debout.
Sur le zinc astiqué pour faire reluire
l’œuvre, pour brouiller les moues et les faciès, faire briller le miroir et
sourire les visages je vois un groupe de 6 musiciens de rock-jazz manouche-slam-blues experts dans la chanson... eux sur scène depuis des mois revigorent le
Boris, comme pour faire oublier une autre tête. Et dire que gamin,
j'adorais « Le Déserteur », avec celui de Renaud en
plus, et en bonus le Balavoine « J'ai pas voulu faire Mon
service militaire J'voulais pas obéir à tous ces gens-là Et
puis, l'uniforme qu'ils m'ont proposé N'était pas coupé pour
moi C'est tout J'voulais garder mon blouson M'ont foutu
en prison ».. mais ça c'est une autre histoire..
Là
aujourd'hui sort un beau disque, vendredi 13 novembre, je suis dans la rue de Panam de bon matin, il y a des piétons partout et des vélos à la pelle, l'avenue chante un air de soleil blond, c'est chouette les gens à bicyclette. Je marche avec dans mon casque les airs fantasques de poésie moderne de Boris Vian chantés par DSLZ. Quelque chose d'heureux allège mon pas, j'entre dans le 13ème, pas loin d'ici la rue Watt. Les rames de métro sont à l'arrêt, je danse parmi la marais de biclous, des idées de liberté et de fleurs sauvages. On ne se refait pas, l'anticonformisme m'a toujours embrassé.
La force de Boris Vian n'a jamais été autant d'actualité, quel autre groupe pour le chanter ? Tellement repris, mais ici DSLZ a composé 5 musiques originales. Ils l'ont recueilli et bu cette formidable poésie pour la remettre sur les rails neufs des lendemains pleins d'espoir, et même si j'ai des doutes sur nos surlendemains, du Vian sur le Zinc, ça fait un bien fou.
J'ai vu aussi la force du groupe sur les planches, c'était le 12 novembre 2016 à Rambouillet.. quel autre groupe vous dis-je ?
Notre
petite monnaie se fait la mâle, de nos poches vers les gros coffres,
y'a du soleil sur nos campagnes, j'ai dans mon crane le bel air de "La valse jaune"..obligé, avec un petit sourire anodin ou presque je repense à notre cher résident de la république, Mathurin la fleur .. on avait dit pas le physique.. mais bon, dédicace, une petite chanson pour lui.
Debout Sur le Zinc 2019 "Chante Vian" label : Jacques Canetti
Parce qu'il s'agit encore d'une pluie
d'été malgré bon sang ce foutu réveil qui sonne depuis quelques semaines en pleine nuit. Puisque l'odeur dehors de cette nuit sous la
fine pluie radine charrie tous les parfums d'une saison bien tapée,
d'un été qui a battu les plaines, corrigé nos doux dômes ocres
asséchés..et puisque la foule infernale s'est replacée là où
elle doit se retrouver, je replonge dans l'épure, le silence qui
tourbillonne entre les notes.
Ce matin encore, le vent plein ouest,
j'ai mangé ma plaine. Pas âme qui vive, seuls péniblement les
tracteurs enfouis sous la poussière des herses grappillaient les
sillons, les nuages de terre avides comme des incendies.
(Inland) de Vanessa Wagner, comme pour
prolonger mon matin. Ces quelques gouttes de pluie comme une eau de parfum.
Il est tombé le disque le plus beau. Depuis quand cherche t-on la beauté ? L'intégralité des émotions, de l'exactitude sur de l'acoustique à perte de vue, comment chose aussi belle est-elle encore possible ?
J'ai d'abord cru à un collectif reprenant les beaux standards du globe, en fait c'est un trio sur des écritures originales (à deux exceptions près) et quelques voix sublimes, tellement belles qu'on croirait les chansons écrites pour elles.
Tant de choses dedans, tellement de quelque part, une recherche de pureté et quoi d'autre sur le moment pour se détourner de la grande pâmoison ? "ROSEAIIX" est la respiration du ciel à la seule condition que la plante de nos guiboles soit collée à la croûte. Va s'imposer comme une chose naturelle sur cette rentrée ce bel opus bleu trouble.. Tout étaler et voir ce qu'il reste des jouissances alanguies, de la gravité des rythmes, du sérieux des sourires, de la totalité... Va falloir le hurler sur tous les toits, vers toutes les souffrances et les joies, le mettre bien fort pour étouffer le bruit alentour, pour que le sang respire, les cœurs bouent, les peaux se croisent et les regards nous transpercent. Quatre ans de travail, rien au hasard. Absolument rien.
Filles ou garçons, cordes ou cuivres, soul ou jazz, n'importe quel continent, tout est beau à se tordre.
Sans jamais chavirer, tout tangue à cœur rompre jusqu'à la dernière note... "Waves of sorrow" comme le dernier souffle d'un piano ankylosé de désir, quand tout a commencé sur la flûte séminale de Claudio "Cacau" Queiroz. Bien loin l'envie de mentir ici, j'ai pleuré dès la première chanson, ce "Kaät" lacrymal, joie suffocante. Habituellement mes larmes sont réservées au cinéma, sauf ici, pour une fois.
Les fautifs : Émile Omar, Clément Petit, Alex Finkin.. artistes évidemment, mais aussi producteur, réalisateur, directeur..
La lumière : Renaud Letang
La distribution : Blick Bassy, Ben L'Oncle Soul, Anna Majidson, Olle Nyman, Mélissa Laveaux, Aloe Blacc
Les grands folkeux de l'Americana chantent aussi au creux de nos collines. Rien à envier.
Un bout de temps que celui-là nous
ouvre les espaces et traînent ses savates dans nos campagnes façon
Damien Rice, Mark Oliver Everett, Elvis Perkins, Grandaddy (« Crazy ones »),
Damien Jurado, The Walkabouts, Sparklehorse (« Saturday »)...
Il est de par ici, tout comme Maarten
ou Perio, son Colorado est vert fleuri gorgé de frais ruisseaux
généreux. « Midlife » est une bouffée
d'air des grands plateaux avec des mélodies resplendissantes.
Il a débuté en 2006, le label Boxson
en 2008 m'a fait découvrir H-Burns. 9 disques plus tard, H-Burns
sort ici son meilleur.
H-Burns 2019 « Midlife »
label : vietnam / Because