Je ne contemple plus rien, du moins
depuis mes contemporains tintintin.. c'est pas pour rien que je
peignais sans eux sur le lin, j'avais un doute, je m'abstenais.
La virginité de l'horizon devient un
luxe.
A force de croire qu'il fallait que je
les aime je me demande si je n'ai pas perdu mon message en route.
Celui enfant que l'on doit transmettre au vieillard que nous serons.
Les évidences sont souvent fades à
dire, à répéter, tout dépends la façon de les montrer et de les
mettre en musique. Les bras tombent, on le savait qu'ils étaient
lourds, une sauvegarde ou un égoïsme de les laisser tomber ainsi
comme des larmes ?
L'adulte, c'est-à-dire l'homme devenu
administratif, doit lutter pour ne pas perdre son statue d'homme,
garder ce message d'enfant donc pour ce vieillard, essayer au mieux
de ne pas anéantir ses chimères, ses utopies amères qui le
deviennent à force de surenchérir l'indifférence parce que le
quotidien que l'on nous offre est un endormissement des envies, un
engourdissement des jouissances, du bromure pour nos herbes folles.
La vie entière d'un astre chaud ne
dépend que de quelques mégalopoles affamées suçant l'énergie du
noyau, pompant, phagocytant le vital du globe. Le bipède comme la
limaille de fer s'agglutine vers les immeubles aimants et les
sous-sols, quelques chose les attire comme un mot d'ordre.
Pourtant, l'idée que chacun d'entre
eux est beau me plait beaucoup, il suffit d'une rencontre, de gratter
un peu, de regarder bien au fond pour voir la beauté et délier
toute chose qui font le charme d'une âme.
J'ai dû resté enfant pour autant
pleurer sur « Human » qu'il s'agisse de la splendeur d'un
visage, de la musique ou des images, devant l'évidence invisible. Je
dois être affublé de symptômes pour arriver à cette altitude de
fébrilité, lutter au quotidien contre mon implication consumériste
pour culpabiliser sans cesse en silence. Je suis un maillon.
A force de ne plus rien voir de mes
contemporains, je ne regarde plus que celle qui m'accompagne depuis
25 ans, je vois une fourmilière moite et contaminée tout autour, je
ne vois qu'elle et nos petits fruits à nous, les seuls qui peuvent
encore m'injecter un minimum de lucidité et de bonne tenue. J'ai
convoqué ces petits fruits pour regarder « Human »,
c'est tellement facile, devenu anodin et bateau que je me suis dit
qu'il ne fallait pas s'en priver. Puis si c'est si évident, il y a
donc non assistance …
Ne vous moquez pas.. mes enfants sont
les enfants d'un enfant, pourtant je joue le jeux, je suis à peine
dedans mais j'y suis, j'y ai un pied et j'essaye de penser à cet
enfant que j'étais, solitaire mais pas misanthrope, plein d'espoirs,
prendre les individus un par un, jamais en groupe ou à plusieurs.
Regarder dedans.. et pourquoi pas les peindre, comme Yann Arthus
Bertrand. La misanthropie corrigée pourrait devenir un art ?
C'est pas un film documentaire pour
ouvrir les yeux, c'est pour éviter de les fermer un peu plus, c'est
pour prendre nos messages d'enfants par la main et les trainer avec
nous, sans rien lâcher...aimer chacune de nos rencontres, jusqu'à
les peindre, les croquer, les poser sur un horizon, capturer leur
beauté définitivement.
Yann Arthus Bertrand / Armand Amar 2015
« Human »
3 commentaires:
Ce fut un choc ce mois dernier. C'est Sadaya qui m'a allumée sur ce film. J'ai tellement pleuré. Pleuré de joie devant un film si lumineux. Je n'avais pas la bande son. Me suis dit que ça viendrait bien. Que je gardais ces visages et ces toiles encore un peu sous mes yeux. Merci... je ne crois pas que je vais attendre finalement.
Je m'attendais un peu au choc, je crois même que je suis allé le chercher..et oui, moi aussi énormément de joie sur la douleur.
Tu vas voir, les chansons magnifiques, ts les visages reviennent. Biz
.. et dire qu'on fantasme pour une goutte d'eau sur Mars.
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