lundi 13 octobre 2014

Murat & The Delano Orchestra



Quoi de mieux que du cousu main pour Jean-Louis Murat, des cuivres et du banjo. C'est la collision du grand poète des monts et du drapeau rock du label Kütü Folk.

Des lustres que j'entends chez Murat le JJ Cale, Neil Young hexagonale, avec ce que l'hexagone peut injecter en plus, le romantisme, la féminité, la mélancolie, le sexe, la terre grasse … « Babel » pour le coup, et le Crazy Horse vient se greffer, avec pour chevaux fous The Delano Orchestra. Un point de rencontre exact et cohérent...un derby, un jam poétique de voisinage.

 


Un double album, face A, face B, un flan nord, une face sud, une œuvre colossale à ralentir un blog, il me faut l'immersion, une vieille bagnole à arpenter les collines plissées, esseulées et brumeuses, mettre du temps à pénétrer chaque sente en profondeur, chaque senteur de mon antre. La musique qu'il me faut ? L'acte artistique parfait ?

« Grives... beauté.. ronces..vallée des merveilles...rhubarbe..vacher..foin.. vent de pluie qui asperge.. blues.. cygnes et chèvres...chagrin violette....neige.... ferme et passion.... genet et pissenlit...  le pays où il est né ».

Leurs trompettes font de lui le Calexico des Monts d'Or, la Maison Tellier en plein Sancy.

 
Je frissonne, il pleut gris automne et tiède.. la lumière est comme il faut, une vie de campagne ordinaire.. la mienne, en écoutant la sienne, la leur..juste un peu avant que les arbres se dénudent.. et je me demande pourquoi je lutte à ne plus vouloir peindre ma tour, le pays où je suis né.
« Babel » tombe ici, juste dans mon cerveau, dans mon paysage.. je me l'accapare comme j'avais l'intention de le faire, j'y ai songé et j'y sombre...


 
Je voudrais m'isoler loin pour approcher le bœuf musqué, comment vais je à nouveau me replonger dans le trafic avec sur les épaules, cette marée d'accords mineurs. Va falloir trainer la bouse de mes groles sur l'asphalte des grandes avenues, un peu des berges de la Voise, comme une trace de Dordogne dans les rues de Paname.
Peut être le temps s'arrête, c'est exactement comme je l'imaginais. Peut être que le temps va rester sur le gris Babel, sur l'anthracite paradis, le charbon de nos mitochondries.
J'appréhendais l'automne....plus maintenant.

 
Murat épouse le fumier de ma campagne plus que jamais, je suis The Delano Orchestra depuis la naissance du Kütu cousu main.. c'est une rencontre logique et improbable.
Un énième billet sur le Bergheaud de Murat, une nouvelle bande son de ma vie de campagne quand je suis ailleurs ou quand j'y reviens, tous les jours.



Murat & The Delano Orchestra 2014 « Babel »
label : scarlett/pias


samedi 11 octobre 2014

Thom Yorke 2014



Je suis resté fixé irréversiblement sur « Kid A », impossible de bouger autrement à travers leur carrière.
Puis j'ai sauté à pieds joints sur « Eraser » pour mieux rebondir et venir à nouveau me poser durablement sur « Tomorrow's modern boxes ».
Cet album prévisible est un voyage astral, une lévitation surréaliste et un glissement huileux sur la croûte céleste, juste en dessous la voûte terrestre.

On flotte dans la piscine cosmique anthracite avec une apesanteur fluo paradisiaque.
"Nose grows some"... un sommet de haute profondeur.


Thom Yorke 2014 « Tomorrow's modern boxes » label : TY self released

jeudi 9 octobre 2014

Slow Joe & the Ginger Accident



Wouarf le petit bijou coup de foudre qui me tombe dessus et me prend par le bras avec la fulgurance du talent de ce duo là. Cédric De La Chapelle rencontre Goa Joseph et le premier album de Slow Joe & the Ginger Accident nous pète à la gueule en 2011. N'importe quelle idée musicale de « Sunny side up » est une jubilation intraveineuse, une jolie pilule de joyeuseté hyper classe.

On tombe ainsi de temps en temps sur des crus exceptionnels, un tanin salaud qui nous prend toutes les glandes. Racoleur dans tous les sens du terme, ce Slow Joe là, c'est comme tomber amoureux au premier regard. Et c'est sur « Cover me over » que tout devient sérieux et palpable, que les corps se lâchent.
Orgue, synthé, airs sépia gominés, « Long long walk » comme un air du King gospel des caravanes.. tout est délicieux, comme quand la « Brunette blonde » monte sur la piste et que tout s'emballe sur des sonorités des Doors & The Coral. Les slow 60's à faire chialer ma grand mère sont racés et ça draguent sec sur l'estrade.

« Cover me over » justement, Slow Joe revient avec un nouvel album « Lost for love », plus sombre et sérieux, moins piste de dance, violon Calexico, grave et plus complexe, moins instinctif, mais tout aussi bon, avec cette sublime chanson, mais cette fois-ci en duo avec Yaël Naïm.

Cédric & Goa, ce binôme là fait des étincelles et Goa revient de loin :
« J'ai pris de la drogue très jeune. La première fois que j'ai fumé du haschich, j'avais 14 ans. Ça m'a tellement explosé la tête que je n'y ai plus touché pendant un an. Mais la deuxième fois, c'était un bon trip, et je suis devenu psychologiquement accro. Puis quelqu'un m'a fait essayer l'héroïne, la pire des drogues. Je vous le dis : si vous essayez l'héroïne, vous ne serez plus jamais la même personne. Quand on m'a envoyé dans un centre de désintoxication, je vivais dans la rue depuis douze ans. Avant de monter dans l'avion, j'ai pris ma dose de brown sugar. Au centre, pendant deux mois et demi, je me suis littéralement senti comme un poisson privé d'eau. Je ne pouvais pas marcher, on devait me porter, je ne pouvais même pas pisser tout seul. Mais tout finit bien : si je n'étais pas passé par tout ça, je n'aurais jamais rencontré Ginger et je ne serais pas là en train de vous parler. »

Ils sont passés logiquement chez Tôt ou tard..dont voici l'annonce :
« Slow Joe, né en 1943 à Bombay, a un talent musical inné, une voix de crooner cabossé et surtout une jeunesse d'esprit restée intacte. Cédric de la Chapelle, guitariste intrépide de la scène lyonnaise, fait sa connaissance en 2007 à Goa, l'aide à constituer un répertoire de chansons inédites, s'emploie à lui former un groupe sur mesure (The Ginger Accident), produit son premier album (Sunny Side Up), dont l'accueil est unanimement élogieux et ce second opus "Lost for Love" rendant compte d'une éclatante évolution »
La pochette, on dirait un Léon Redbone cinglé de Dr John. Slow Joe à nouveau.
J'ai une préférence pour la bouteille 2011, en croyant écouter un vieux cowboy sortant du saloon pour aller droit vers ce cabaret acoustique aux vapeurs poussiéreuses mais bourrées d'idées originales quasiment bristish.
C'est un duo Franco-indien, et c'est vachement bon.



Slow Joe & the Ginger Accident 2011 « Sunny side up » label : EMI
Slow joe & the Ginger Accident 2014 «  Lost for love » label : tôt ou tard






mercredi 8 octobre 2014

Lucinda Williams



« Compassion » m'a écorché. La griffure qui garde au cœur l'émotion d'un album. Juste un ongle qui perfore le thorax avec émotion.
La suite est classique, carrosserie qui brille, solo de tiags poussiéreux, vitesse visqueuse et spacieuse, grande tradition américaine de bitume pour laquelle on est en droit d'avoir un maximum de compassion.

La Marianne outre-atlantique ? Ou la meuff de Tony Joe White ? (« West Memphis »? « Foolishness », "Everything but the truth"....).


Lucinda Williams 2014 « Down where the spirit meets the bone »
label : highway 20 records




lundi 6 octobre 2014

Marianne et Robert




Tu préfères ton père ou ta mère ?? je suis aux pieds de monuments, devant maman et papa, comment rester crédible dans la « critique » ?
Le dubitatif se répand sur l'échelle des chairs de poule, tantôt oui, tantôt non, la désobéissance, puis le moment où il faut bien avouer, débattre ou pas.

 
Je suis venu voir Robert sous des cieux d'humeur maussade, une précipitation aigrie sans envie, un jour où il n'aurait pas fallu que j'aille écouter ces palabres. L'impatience, le décalage d'écoute, une hormone mal placée, ma gueule pas bien calée sous la voute, une de ces visites qui nous fait regretter d'être venu. Même le maquillage du violon celtique de « Little Maggie » n'a rien arrangé, comme quand on retourne dans son village natal, deant la maison familiale et que quelque chose n'est pas en adéquation, et qui vient surement de soi.
Le père a beau me parler, me raisonner, me prendre par les sentiments.. aujourd'hui, j'ai envie que ma mère me regarde, envie d'aller fumer un clope avec elle au sous-sol. Des fois c'est l'inverse. Mais le cigare n'a pas de goût aujourd'hui, juste envie d'une mentholée avec ma reum dans les bas fonds diamantés. Il faut dire que Marianne vieillit bien, je la trouve de plus en plus belle. Cette pochette est une aubaine.
 

Pourtant « Give my love to London », la chanson, avait les mêmes discours que certaines de Robert sur « Lullaby... ».. les voix proches, la mélodie, la production, elle a même essayé de parler comme lui avec « Mother wolf »... Et même si le paternel a tenté de détourner l'affection avec « Embrace another fall »  ou le sublime «  Up on the hollow hill », l'ensemble reste insipide, inadapté, je ne suis pas dessus, ni en dessous, je glisse et boude.

 
Au début, j'avais besoin d'eux, je me disais, je vais aller voir les p'tits vieux de la vieille, aller fouiner chez moi pour glaner du réconfort.. et puis j'aime pas quand Marianne s'énerve on dirait Robert un poil contrarié. Si Marianne m'embarque, Robert me plante avec un son artificiellement acoustique, un poil glacé, on dirai qu'il n'y croit pas, son flot mélodieux est insipide. Et pourtant les voix sont proches, comme on a vécu avec ses parents, et que l'on écoute les cordes se sensibiliser au fil des plaisirs des années défilées.
Et puis ma mère a accueilli mes larmes quand elle m'a parlé de sad Lisa avec son « Deep water » infernal. C'est pas donné à tout le monde de savoir parler au bon moment.
Ah j'oubliais, il y a des hymnes aussi, quand l'émotion d'un souvenir nous tire l'épiderme, nous étrangle à ne plus pouvoir parler, ou quand une femme qu'on aime chante comme Marianne.
Ah oui, j'oubliais aussi, « Going home ».. c'est là que j'ai franchi le pas du seuil où j'ai vécu, là où la majorité m'a chassé comme une force centrifuge, là où j'aime revenir.
 

J'ai essayé et tenté, trois quatre fois, rien n'y fait.. aujourd'hui, Robert radote.

« True lies », je sais déjà que les mots vont suinter des yeux, que l'accolade frissonnera. La gravité des talents n'a rien à voir ce soir avec ma sensibilité, j'ai besoin d'une matrice, d'un tanin qui tatoue au héné sur l'épiderme échinocoque.
J'ai la chair de poule, Marianne.

Papa, c'est pas pour ce soir, ta fripe me froisse, ton arc-en-ciel est gris, tes manières sont feintes, t'as trop bu, tu prends des airs..je reviens, t'inquiètes, je vais fumer une cigarette avec maman.

Marianne Faithfull 2014 « Give my love to London » label : naïve
 
Robert Plant «  Lullaby and .. the ceaseless roar » label : nonesuch
 
 








dimanche 5 octobre 2014

Bob Carpenter



Le dimanche je fouille dans la caisse de rééditions, pour dénicher de grands disques aux allures dominicales. Le label No-Quarter a décidé de remettre en service « Silent passage », l'unique album de Bob Carpenter sorti en 1975. C'est du country folk, du grand classique invisible bien dépressif apparu en plein milieu de « Blood on the tracks » et « Tonight's the night », ou encore « Born to run », « Zuma », "The hissing of summer lawns", "Still crazy after all these years", « Fandango », « On of these nights »......

De l'orgue, des violons, des chansons sublimes quand on aime Cat Stevens et surtout Gene Clark.
Son chemin, album et sa carrière furent sabotés par quelques employés de la warner, et le poète canadien devait alors voir son chef d'œuvre sombrer dans l'oubli. Il n'est vraiment apparu que 10 ans plus tard.
Devant ce non succès, il se fait alors moine boudhiste à Los Angeles avant de retourner 10 ans après sur ses terres natales, malade et condamné. Il y finira ses jours.

Combien d'albums merveilleux comme celui-là, oubliés quelque part et qui finissent par revenir plus beaux encore.
Pas de bonus, « Silent passage », brut avec un superbe livret sur l'histoire maudite de ce poète canadien, est un petit trésor de country folk lyrique et mélancolique.



Bob Carpenter 1975 « Silent passage » label : no quarter







samedi 4 octobre 2014

Alt-j 2014



Je suis complètement bluffé par ce groupe. J'avais omis l'écoute du précédent, ajoutant à retardement « An awesome wave » dans le bilan annuel des meilleurs disques 2012. Je me devais de ne pas manquer celui-là.

« This is all yours » est déroutant, ultra moderne avec une intimité anthracite à foutre des couleurs primaires abîmées partout. Nara.. à peine croyable, quel bonheur de mélancolie travaillée, deux minutes d'intro pour un chant et un violon à étrangler tout amoureux de « I talk tothe wind »
« Garden of England » a une jolie tendresse ancestrale verte tendre quand « Choice kingdom » devient paradisiaque et inquiétant comme une balade de Sébastien Schuller, une messe cosmique et vaporeuse.... « Warm foothills » est bercé par les convections tièdes d'un automne torride... « Pusher » me happe, phagocyté par le murmure pop susurré à la lisière du cerveau.

Il y a même des petits pause tarabiscotée avec ce blues moderne qu'on pourrait imaginer provenir de Syd Barrett.

Puis Nara revient en épilogue, comme une belle histoire d'amour à peine dévoilée. Déjà deux albums et autant de sommets, des allures de chef d'œuvre de pop moderne conceptuelle british. Des allures d'insolence artistique.

Alt-J « This is all yours » label : infectious



Hildur Gudnadottir 2025

  Avec l'age, je suis devenu un lève tôt. J'ai perdu l’habitude de laisser s'étendre la nuit quelques heures de plus au fond de...