samedi 27 juillet 2024

Six Organs of Admittance 2024



Janick fumait du chanvre en créant, tout le temps on l'a appelé « Artiste en herbe ». Je passais des après-midi chez lui à écouter le catalogue Drag City que l'on affectionnait particulièrement.

Concomitance avec son petit brouillard en huis clos et l'odeur de l'acrylique qui finalement tout en dedans respirait bon le dehors. Ses peintures étaient des fenêtres bariolées comme un filtre permanent pour ne pas voir le gris. Il fermait toujours ses fenêtres pour peindre, contrairement à moi qui humais toujours des yeux la chape grise des lourdes étendues qui font ma contrée.


De Drag City, nous sommes inévitablement tombés sur Ben Chasny. Je connaissais son jeu de guitare depuis « Dark Noontide » en 2002, sur Holy Mountain alors. Nous sommes toujours restés raccords sur ce baladin au fingerpicking boisé, acidulé devenu abrasif ces dernières années.

Six Organs of Adminttance nous transportait vers des horizons flamboyants, des ciels délétères, des humus mouvants et des troncs affolants.


Janick a franchi l'équateur depuis quelques années, changé d'hémisphère, loin du gris d'ici. Il est allé se poser vers les couleurs qu'il aime, les fenêtres ouvertes, sans filtre. Bizarrement, j'ai perdu le fil Chasny depuis son départ. J'ai vaguement "Hexadic II" et sa blancheur en souvenir, et puis tout devient flou. Souvent je rêve qu'il pleut sous les cordes de « Compathia », susurrant la sève de « For Octavio Paz ».


J'écoute le berçant « Time is Glass » qui vient de sortir, et tout me remonte dans les naseaux, les parfums acryliques, le brouillard sucré, des petites bières en rafale, les cordes de Ben comme de doux déluges, j'ouvre mes fenêtres et le gris suffoquant me lèche les paupières. Il pleut. J'imagine sa plage gris sablé avec le ciel mercure, de l'autre côté de l'équateur. J'écoute Six Organs of Admittance à nouveau, avec la même ferveur défoncée de jadis. C'est sur Drag City, je suis sûr qu'il l'écoute lui aussi de l'autre côté.


Six Organs of Admittance 2024 « Time is Glass » sur Drag City

mercredi 24 juillet 2024

Born Heller 2023



 

Des sirènes en montagne, je vous assure, je les ai vues. Les mélèzes perdent bien leurs feuilles.

Je sais pas, la mer recouvrait ces cimes il y a quelques nuitées. Il y a bien un lac sans fond à deux ou trois flans d'ici.

Un mont n'est rien d'autre qu'un gros rocher. Ou alors c'est le réchauffement climatique.

Jason Ajemian aussi connaît la créature, comme le marin éberlué.


Je vous assure elle n'était pas aviforme, j'ai vu des écailles. Elle chante avec ses cordes sèches et je flotte.

Effectivement la neige avait un éclat cobalt au pied des chutes de gré imitant la mer.

Mais l'océan est outre-mer, aucun remoud ni moutons à la surface, sans aucun doute.


Merde, je sais encore discerner une Tichodrome échelette d'une mouette. Et cet Helictrotrichon sempervirens qui danse.. c'est de l'Oyat peut-être ?


Le chant de la sirène sous cette chaîne de montagne à peine effleurée par le soleil couchant a eu raison de mes gestes. Je descendrai à l'aube par cet névé glissant, en attendant, je vais passer la nuit sur ce port.


Born Heller, c'est Josephine Foster et Jason Ajemian, un folk habité. Je les ai découvert en 2004 sur Locust Music. C'est l'édition vinyle 2023 sur Fire Records.

dimanche 21 juillet 2024

Maiya Hershey & Steve Jansen 2022

 


Le rocking-chair a fini par s’arrêter, tout est dilaté. L'écho, la résonance, le souffle.

Place aux nappes, au climatiseur sonore. Même les insectes ont fui les ombres, le sommeil des cellules. La somnolence est presque verticale, cerveau massé, inconscience amassée, c'est une douce et belle dérive électro acoustique. Contemplation abusive, flottement des peaux.

Steve Jansen a travaillé ces hautes ombres volages avec Maiya Hershey, c'est un pur délice.

La lumière change de côté, les lueurs s'abîment avant le nacre flamboyant. Tout interprète l'air de plomb qui nous assomme.

Laisser ruisseler la sueur sous l'échine et le son du duo sur les tempes. Cette association là fait des miracles. 

 



Steve Jansen & Maiya Hetshey 2022 « Neither Present Nor Absent ».

vendredi 19 juillet 2024

Jake Xerxes Fussell - 2024


 

Le mercure pousse le rocking-chair à se balancer, c'est chose faite. Les persiennes sont tombées comme des masses, les murs luttent et retiennent l'assaut comme ils peuvent, fallait s'y attendre. J'aime par la force des choses l'instant reclus, l'air qui oblige. Le frais refuge dans la pénombre. Se lever récupérer quelques galettes caniculaires, attendre que la chaume grille. C'est Jake Xerxes Fussell qui va chanter ma léthargie du jour. Tout ce que j'aime, à me balancer, auprès du chant du Bob P.Hinson.

Je découvre, au juste moment, je l’adopte et le garde.


Jake Xerxes Fussell 2024 « « When I'm Called »

mercredi 17 juillet 2024

Bob Dylan - 1979



 

Je suis resté sur le pont, quelques passages de nuages à guetter le TGV. J'ai toujours eu une affection particulière pour le train. Au fond du jardin de mon grand père cheminot les Paris-Le Mans passaient. À cet endroit ils commençaient à avoir un élan assez bruyant pour habiter mes nuits en vacances chez eux. Ma vie d'étudiant, mes décennies professionnelles, toujours le train pour y aller.

Mes vadrouilles sur deux roues de par ici, toujours je zigzague autour de la même ligne celle qui longe la vallée de l'Eure. Ce matin comme chaque fois que le vent est au sud, c'est la ligne TGV que je côtoie, celle qui longe l'autoroute A10 soulignée par une chaîne d'éoliennes. Sur un pont, non loin de Saint-Léger-des-Aubées, je fixe mon ravitaillement en haut et j'attends qu'une chenille métallique à grande vitesse me passe en dessous. Je rumine ma compote et je me souviens des descentes à grandes enjambées vers le fond du jardin de mes grand parent pour voir le train corail passer, celui que je prends encore très souvent pour gagner Montparnasse.

A pomper ma pomme en bouillie un seul pied à terre, je contemple la plaine, le panoramique des grandes largeurs qu'un printemps plus que maussade a laissé gorgé de vert plus qu'à son habitude. Les disques de mes freins font de petites mélodies d'harmonica quand je bouge doucement d'avant en arrière. Quelques faucons m’observent alors que les corbeaux ont fui ma présence. C'est un doux filet de musique qui grince sous ma pédale. Je tente une harmonie, une boucle histoire d'accompagner ce vent fort qui va me pousser dans quelques minutes. Je suis grisé par mon field-recordings diatonique, je joue un peu avec les freins histoire de travailler les tonalités, les rafales se succèdent alors qu'au loin, dans l'autre sens, je vois le museau pointu d'un nouveau bolide qui se dessine.

Rassasié et contenté, j'accroche ma deuxième pédale et repars arpenter mes chemins herbeux. Des marées de graminées n'arrivent plus à boire toutes ces pluies, saoules elles dansent jusqu'à plus soif. La terre grasse est amoureuse, je laboure un peu, je moissonne avec mes pneus, les bruits ont changé, je foule une marée d'herbes folles, des nuances de vert, le bleu ciel me toise, des grosses masses de coton dedans, tout est frais, venteux, je respire comme on s’enivre. Les alouettes dansent je vais rejoindre les hirondelles du centre bourg et m'éloigner de l'acier en rails.

Je vois au loin la flèche de mon bercail. Je vais la contourner encore un peu avant d'aller m’asseoir haletant et vidé pour écouter cet album que j'affectionne « Slow Train Coming », pas uniquement pour le train qui avance dans l'histoire d'un continent, mais aussi pour cette chanson qui gamin me fascinait, dans mes souvenirs mon entrée chez Bob ; « Man gaves name to all the animals ». Mark Knopfler est aux manettes, un album de haute tenue, des trains partout.


Bob Dylan 1979 « Slow Train Coming »


dimanche 14 juillet 2024

Paul McCartney & Wings - 2024


 

L'écho du studio mythique résonne dans mon l'habitacle. Dehors, les collines sont toutes coiffées de grands chênes. Le paysage plissé de l'Albret se prête à la contemplation, des balades vertes comme cet intérieur pochette. Des palombes chantent en chœur avec les cigales planquées dans les grands platanes des bords de route. Au fond de la Gélize des galets en vitrail se jouent des lumières.

Les châtaigniers lâchent ses chatons, le mellifère a fait son boulot, les pollens sont dans l'air, les houppiers verts dévoilent quelques plaques de clair cobalt comme pour faire respirer les pensées ankylosées par les saisons grises passées.

A petite vitesse sur les lacets, juste au dessus des grandes lignes droites des vallées, les chansons défilent, légères et déshabillées dans la résonance. Un blind test à défaut de faire sa propre sélection, ce live, ce moment 1974 dans l'Abbey Road. La pochette affiche ses teintes usées et vieillies comme si l'opus existait depuis toutes ces décennies.

50 ans après donc, comme un passe-muraille, les oreilles captent, et le blanc, le vert et le bleu une « Wild life » en quelque sorte. La caisse en studio, les doux virages se succèdent, noir de monde cette bagnole toute chargée d'histoire musicale, en chœur les fredonnements, les chansons de Paul.

Comme on va au musée, cette virée estivale au cœur vert est toute enjolivée par les grands classiques revisités.


Paul McCartney & Wings 2024 « One Hand Clapping »

Thomas Köner 1993

  La croûte gelée se ramollit, ventre flasque et tiède respiration. Le ciel se charge de l’halènes des Steppes, le silence gronde. Notre ...