Il y a des endroits qui ne trompent pas, quand on a faim et
soif, il suffit d’y aller pour se nourrir, des pages avec la cohérence humble
de transmettre ce qui est, de dévoiler la création avec ses mots, juste pour
donner envie. Pas l’ombre d’une aigreur, de la passion, des explications et
donc des démonstrations.
Impossible qu’il s’agisse là d’une histoire stérile, le blog
d’Alex est une vitrine, la face visible de ses ébullitions enfouies, car il crée, joue
et réalise.
Alex, voilà je suis très flatté d'innover et de tenter ma
première "interview" . J'ai une réelle fierté quand je reçois un commentaire
d'artiste que j'ai chroniqué, je m'auto-publie et du coup je me sens
investi d'une mission devant les artistes musicaux, transmettre l'envie et la faim donc. Je traine la savate
quant aux nouveautés modernes, aussi pour garder un minimum de crédibilité.. je
viens très souvent chez vous, toi et Bastien pour me sustenter .. j’ai très
souvent la dalle.
Merci mille fois pour ce privilège... C’est à toi :
Pour la présentation : j'ai 24 ans, je travaille dans la biologie. Pour la musique, je m'y suis intéressé au début de l'adolescence en tant qu'auditeur, vers 11-12 ans, avec du rock, soit du plus sombre, 90-2000, soit des gros classiques des années 60-70. Je tapais un peu de batterie, mon papa en a une, il m'a appris à jouer à l'oreille des trucs de base, je me mettais un disque, du rock à la rythmique simple et je jouais dessus, j'ai de bons souvenirs sur les Pixies par exemple. Et puis lorsque j'étais tout seul chez moi je passais un Stooges ou « House of The Jealous Lovers » de The Rapture à fond, et je tapais comme un bourrin en beuglant, c'était pas mal comme défouloir. Je ne sais pas pourquoi mais j'ai considéré que je n'avais pas de talent particulier pour la musique (je sais où est le La sur une partoche, ça m'aide pour composer en MIDI mais je suis pas du tout musicien), ça me faisait peur de jouer d'un truc, j'avais l'impression d'arriver trop tard, et j'aime pas trop me mettre en avant. Et puis c'était trop cher de faire du sport et de la musique. Du coup j'avais décidé que ma place était plutôt à farfouiller dans les rayons des médiathèques, à essayer de me faire une culture. J'avais décidé de commencer par le rock et la pop, puis de me mettre à l'électro, au hip-hop, au jazz. Et justement, en élargissant un peu mes horizons, je tombe sur « 3 Feet High And Rising » de De la Soul, je découvre le sampling, et pile à la même époque un pote me montre Audacity -un logiciel d'édition sonore- un peu par hasard, et là je me dis qu'en utilisant les sons des disques que j'aime, je peux essayer de construire des petites symphonies pop. Le premier morceau que j'ai fait c'était un truc piano/basse/batterie tout en couper coller, à partir de la première note de piano de « Lost Message » de Air, qui est très puissante, avec un son irréel. Là j'avais plutôt 14-15 ans, début lycée, et je m'intéressais à des trucs un peu French Touch, avec notamment Etienne -oui celui du blog- et son petit frère, qui lui est un génie dans le sens où tu lui files un synthé il te sort une démo qui sonne pro en deux secondes, avec une vraie oreille de mélodiste et d'arrangeur (il joue de tout aussi). Si ça t'intéresse il a sorti des morceaux sous le nom de Chrominance (https://soundcloud.com/chrominance-music) et Blazer (https://soundcloud.com/blazerofficial). Ensuite je fais du couper coller sur Audacity jusqu'à ce que ça sonne un peu plus naturel, je décide de ne plus sampler d'autres gens mais de générer mes propres sons, et tout ça débouche sur un cadeau « déclic ». Pour mes 18 ans, Etienne et des potes m'offrent un clavier et le logiciel Ableton version « lite », et là tout devient plus facile : je peux jouer une ligne mélodique, une basse, programmer des arpèges, une rythmique, ajouter des filtres, de façon moins laborieuse qu'avec Audacity. C'est de ces premières sessions qu'est né le projet « Mona Lizza », c'était vraiment une découverte de cet outil, un truc que je faisais le soir après la fac, après les révisions, pour me vider la tête avant de me coucher, sans penser forcément à le partager, et puis j'ai posté ça pour faire partager ça à mes potes surtout.
Incontournable question..les réseaux, le streaming .. seuls moyens d'expression maintenant ? Le support physique c'est pas envisageable, ni concevable ?
J'ai gravé du physique pour mes potes, enfin surtout Etienne et son frère en fait justement. Personnellement j'adore le côté physique, je suis un gros acheteur de Cds, de vinyles, avec un côté collectionneur. Et puis j'aime les gros artwork, le côté « objet d'art ». Par contre, je n'ai pas d'argent à mettre là-dedans et d'ambition de vente ou quoi que ce soit, franchement c'est très, très amateur ce que je fais et je ne suis pas sûr que ça mérite une sortie physique dans le sens où personne n'aurait envie de les acheter je pense. En tous cas, pour ça, le streaming c'est super, ça permet à des débutants de poster leurs œuvres sans frais, d'avoir un retour, c'est un super support, complémentaire du physique
Tu vis dans une région bouillonnante culturellement, les artistes vivent maintenant de leurs prestations scéniques.. tu en es où avec ça ? DJ quelque part ?? live dans des petites salles locales ??
C'est vrai que Nantes c'est super cool pour ça j'ai pu assister à des tas de super concerts ces dernières années. Pour le moment, j'ai fait des DJ Sets avec Etienne, mais on n'a pas passé de musique à nous, le but c'était de faire découvrir des styles musicaux, des époques et des lieux moins mis en valeur (synthpop yougoslave, italo-disco, funk ouest-africain...), les setlists sont dispos sur le blog d'ailleurs. J'ai bien aimé l'exercice, c'était une super opportunité, mais je me sens un peu escroc, pas trop à ma place, je suis pas encore à l'aise. Pourquoi pas en refaire dans le futur, j'aimerais bien déconstruire mes morceaux et les remonter ensemble en live comme les Daft sur Alive 2007, en jouant quelques parties de synthé en plus, mais il me faudrait du meilleur matos (mon ordi est nul et super vieux) et du temps pour répéter avant d'être assez à l'aise pour vaincre ma timidité.
En parlant de Nantes et ses environs, je me souviens d'un label extra, il y a 10 / 20 ans, Collectif-Effervescence avec un catalogue extra dont Domotic ou Perceval music par exemple, ils ont marqués l'endroit et la scène.. tu connais ??
Je suis navré, pas du tout ! Je ne suis pas très connaisseur de la scène Nantaise en fait, j'ai des potes qui jouent dans des groupes très cool : Méga-Parade dont un a parlé sur le blog, mais ils ne sont plus sur Nantes, et W2G, pour qui on a ouvert avec un DJ Set également. J'ai découvert récemment le groupe Projet Marina, j'ai publié une chronique de leur album « Echos » de cette année, c'est une bombe, je me suis jeté sur le vinyle. En dehors de ça j'ai zéro connexions avec ce qui se fait à Nantes, et comme je te dis je connais peur l'histoire musicale de la ville.
A une époque je croisais Anthony Queyeux qui bossait chez Gibert.. lui c'est HYPO et j'adorais ces travaux, et sa collaboration avec Emmanuelle DeHericourt entre autre. Je me souviens de sa politique radicale quant aux groupes pop de surface, il haïssait Divine Comedy par exemple .. tu en penses quoi ??
Je n'ai jamais réussi à être snob ou puriste même dans ma période où j'écoutais que des trucs obscurs de rock psychédélique 60's, j'ai toujours aimé ABBA, Balavoine, Supertramp, les Daft Punk. Les gros trucs me font pas peur et je pense qu'on peut trouver de la beauté dans toutes les échelles, du blockbuster produit par 200 personnes au disque bricolé dans une chambre, tant que c'est bien fait, avec un certain amour de la musique. Je pense aussi que c'est un bon état d'esprit d'avoir des idées tranchées à l'adolescence par exemple, pour éviter de devenir un gros con égoïste plus tard, mais qu'en vieillissant on ajoute des couches de nuances là-dessus, qui ne viennent pas émousser cette radicalité mais la précisent au contraire. C'est un peu pareil pour la musique, j'en suis arrivé à un point où je n'ai aucune limite, si j'aime un truc hyper bruitiste en électro, un free jazz alambiqué, un Phil Collins ou un Beyoncé, je vais le dire et je vais essayer de dire pourquoi je trouve que c'est bien, quelles sont les bonnes idées là-dedans, pourquoi c'est bien exécuté. Par contre j'ai horreur de certains trucs ultra commerciaux comme tout le monde : Vianney et son polo BCBG qui vend des caisses de merde parce qu'il présente bien pour le grand public, Bruno Mars qui fait de la soupe en pillant des idées partout sans créditer personne... Y'a plein d'exemple de trucs mainstream qui me dégoûtent, mais c'est du cas par cas pas un rejet général.
Peut-être que ça sort du périmètre de la question, mais j'ai beaucoup de mal à trouver des gens qui soient au carrefour de la pop et de l'électro. J'adore des groupes comme Metronomy, dont le leader disait qu'il aimerait bien que plus de gens vénèrent autant à la fois les Zombies et Aphex Twin que lui, je me retrouve pas mal là-dedans. Parfois, des gens plus branchés pop ou rock vont avoir du mal à sortir des structures de la chanson, ou à apprécier certains rythmes ou sons, alors que des puristes de l'électro vont bloquer sur des morceaux à mi-chemin car pas assez techniques, trop amateur, pas assez carré. C'est une caricature évidemment, mais c'est quelque chose qui arrive de temps en temps, et ça manque un peu des groupes comme MGMT, Homeshake ou autres, qui fassent le pont entre songwriting et sound design pour dire ça grossièrement.
Les mouvement musicaux vont et viennent, j'ai l'impression que l'electro pure n'a plus ses bacs opulents d’il y a une ou deux décennies, Monika, Karaoke Kalk, 12K, Morr, How to kill the DJ ?, Brocoli, K7 !, Ninja Tune, Lex, Go Beat..... Elle a été très incorporée un peu partout, la source se tarit-elle??
C'est intéressant ce que tu dis, y'a de l'électronique partout, mais elle est pas autant en avant qu'il y a quelques temps. Comme tu dis, non seulement dans les bacs des magasins de musique, mais même avec le pendant mainstream, on a moins de DJ « stars », même si il a a des exceptions (Marshmello, DJ Snake) c'est moins people, personnifié et glamourisé qu'avant je trouvé (David Guetta, Skrillex). Je ne parle pas de ces artistes pour leur contenu hein, ils font un truc assez différent de ce que toi et moi en gros geeks de la musique on va apprécier, c'est un artisanat à part de faire de la grosse musique pour bouger les foules. Mais je trouve que ça dit quelque chose sur le paysage musical, on a switché du DJ vers la popstar et le rappeur en somme. Et ça c'est sans remonter à l'époque où les Chemical Brothers ou Fatboy Slim étaient énormes. Ca se ressent dans ce qui est présenté à la radio, dans les supermarchés, et fatalement même chez les disquaires plus indés les rayons « électroniques » rapetissent peut-être un peu. En tous cas je l'ai observé vers chez moi. Par contre, tu ouvres Bandcamp et tu as une quantité absolument infinie de superbes sorties, dans des milliards de directions artistiques différentes, de groupes à peine connus. Donc non, je ne pense pas que la source soit tarie, c'est juste plus dur à trouver, mais ça c'est le cas pour beaucoup de ce qu'on considère comme de la « bonne » musique.
En parlant de 12K et Morr, le Japon et l'Allemagne sont les épicentres ?
Y'a pas mal de truc anglais aussi... Ah je t'avoue que je ne sais pas trop là, j'ai pas de vision globale sur qui fait quoi où, j'ai pas assez de recul. Et puis en électro je picore, je n'arrive pas à tout suivre.
Je dois t'avouer que j'ai un peu lâché prise sur l'electro.... Mr Oizo, Le Tone, Octet, Professeur Inlassable, Nôze, Tom Vek, c'est bien ça ou ça commence à dater ?
Il y a un nom là-dedans qui me parle beaucoup : Mr Oizo. Ce type est un génie, il me bluffe quasiment tout le temps, en musique ou en ciné. Pour le coup c'est une super grosse influence dans ce que je peux bricoler. Donc encore super cool.
Les labels de références se sont à une époque assouplis pour ne pas se cloisonner, et aussi s'ouvrir pour durer je pense.. Warp a eu Gravenshurt, Peacefrog a signé Findlay Brown … Il y a un clavier sur « Anxiogene » .. tu envisages un jour d'intégrer d'autres instruments, de l'acoustique, même en boucle ou pas, une gratte nylon, un banjo samplé ou une fond de flûte traversière ?
Alors c'est marrant ça parce qu'il y a pas mal de claviers joués justement, bon après ça reste des sons de synthé, mais je mélange pas mal le joué et le programmé, j'aime beaucoup les gros accords plaqués (ça c'est la French Touch), et les mélodies à un doigt, très amateur ça, façon new wave ou Baxter Dury (genre « La Loi de Murphy », un peu un hommage à LCD Soundsystem d'ailleurs, tout est joué à un ou deux doigts presque). Mais oui carrément, diversifié les sons c'est prévu. J'ai des trucs en cours avec des guitares folk, électriques, des basses, du piano solo, et tout ça est joué et pas samplé, et puis j'ai aussi joué au clavier des samples de cuivres, de cordes, de vents, d'orgue aussi... La suite va être plus pop, et ça va se ressentir dans les sons utilisés, donc yes, ça va venir ! Et puis j'ai fait un peu plus de travail sur des patches que j'ai créé moi-même plutôt que de juste bidouiller les réglages des sons du logiciel, ça sera plus bossé à l'avenir.
« Le Clown » semble plus travaillé sur les mélodies. Ce n'est pas une BO mais LA BO.. c'est quoi ce projet. « Le thème du Clown générique d'ouverture » me renvoie à Eric Sera. Ta musique est très cinématographique. Stephen King aurait pu te contacter pour « ça » ?
C'était voulu oui, c'est très cinématographique. « Steak » de Quentin Dupieux (Mr Oizo) est ma référence là-dessus. Ptet un peu de Morricone aussi, « Once Upon The Time In The West » même si c'est un peu cliché de dire qu'on adore cette BO, c'est vraiment mon cas, je me la mets souvent en
nocturne, tout seul, au casque. « Mona Lizza » c'était vraiment une découverte d'Ableton, et ça a donné un truc plus électronique, davantage dans les rythmes parce que c'étaient des morceaux que je bricolais 15 min par ci par là d'un soir à l'autre, et que j'étais dans cet esprit à l'époque aussi, avec des envies de beats qui tabassent et de bizarreries électro-pop. Du coup pour la suite, « Le Clown », je commence un peu mieux à prendre en main l'outil, à savoir ce que je veux faire, et je joue davantage de choses au clavier aussi, je programme moins. Et puis ça allait mieux avec le projet, c'est plus flippant si c'est un peu plus aérien, un peu moins chargé, ça laisse plus de place à l'imagination. Et enfin c'était une période pas toujours évidente d'un point de vue perso, et j'ai déchargé pas mal de choses dans ce disque, il y a beaucoup de rage et de mélancolie là-dedans, je l'entends du coup quand je m'y replonge, et ce projet aura toujours une signification particulière pour moi. Si j'avais eu le temps et le talent j'aurais bien dessiné tout un petit dessin animé autour de ce disque, avec cette histoire de Clown hanté qu'un père un peu loser offre à sa fille sans le vouloir. Et King est une grosse influence, j'ai lu beaucoup de choses de lui, l'ambiance de ses livres a dû jouer sur les choix que j'ai fait sur ce disque oui.
Et une voix ?? tu veux pas récupérer Beth Gibbons sur tes plages ? Ou un chant à la James Blake ?
James Blake : bel exemple de crossover électro/pop ! Alors si c'est prévu, en fait c'est pour ça que je traine un peu à sortir des trucs, j'aimerais bien une voix. En fait j'ai un projet qui était sensé sortir début 2017, sur lequel je bute depuis, à cause des voix. J'ai pas une bonne voix, je chante pas hyper bien mais ça me suffirait je pense, avec du temps je peux obtenir ce que j'en veux. Du coup je me suis acheté un bon micro très récemment, parce que j'en ai marre de galérer à essayer d'améliorer des prises de voix au son pourri avec plein de bruit blanc derrière. Ca me débloque pas mal. Et du coup j'ai une tonne de morceaux beaucoup plus pop qui sont quasiment prêts, j'ai juste les voix à finir, mais j'ai bien 3 projets finis là depuis ces deux ans. Pour l'anecdote, « Blood In The Washing Machine » est une réponse directe à la frustration d'avoir tous ces morceaux bloqués depuis un moment, un petit assortiment de beats rageux pour évacuer tout ça. Les voix ça vient, et des trucs plus frontaux que la voix sous vocodeur de « Danse sur le Rythme » ou « Tout est sous Contrôle ».
Je cherche des questions à te poser , je fouille avec en fond le son Alex De la Pampa... Aphex Twin, Autechre, je vais pas être original mais ce sont tes influences premières ?
J'ai écouté beaucoup d'Aphex Twin en effet, j'admire sa virtuosité sur plein de styles différents, et sa capacité à faire de la pop avec des éléments super étranges, inhabituels, qui sortent l'auditeur de sa zone de confort. Autechre aussi, même s'ils sont plus insaisissables. Mr Oizo beaucoup, le premier Daft Punk, de la house bien brute, des groupes comme Kraftwerk, Suicide, Soft Cell, LFO, MGMT, Flaming Lips, Pet Shop Boys, Metronomy, qui font le pont comme je disais entre pop et électro, du post-punk, du hip-hop pas mal aussi, un peu de dub, de l'indus...
La pochette de Mona Lizza est sublime, c'est une vitrine importante la pochette nan ? c'est qui d'ailleurs ce portrait ? je suis sûr que tu est dans le tout do it yourself ?
Je ne sais même plus qui c'est, j'ai découpé des trucs dans des magazines pour faire un collage absurde, je trouvais que c'était un bon reflet de ma musique à l'époque, un truc très très amateur, beaucoup dans le couper-coller, un reflet du côté sampling/programmation, mais en même temps avec un côté imparfait/fait à la main, et un certain sens de l'humour comme chez Oizo ou dans l'électro des années 90-2000 que j'aimais beaucoup. D'ailleurs j'ai fait plusieurs illustrations dans ce style pour les « singles » issus de ce projet sur Youtube, par exemple « Danse Sur Le Rythme » c'est un poulet robotisé parce que c'est vraiment comme ça que sonne le morceau, y'a un synthé qui ressemble à un poulet et un beat un peu Moroder version coldwave, ça se prend pas au sérieux, j'aime bien rester fun. Le nom du projet est venu de la pochette d'ailleurs, avec cette pose un peu Joconde de mon affreux collage. J'ai fait un clip en stop motion aussi pour « Influenzza » sur cet album, il est sur Youtube, c'est cool mais beaucoup trop chronophage pour réitérer l'expérience souvent. Et oui les visuels c'est important, j'aime bien la photo de « Blood In The Washing Machine » aussi, une des inspirations de
ce disque est que j'ai failli me faire casser la gueule devant cette laverie creepy en revenant de chez Etienne où on faisait du son. Du coup j'y suis retourné un autre soir, j'ai attendu une éternité que le feu passe au rouge pour la lumière, et j'avais ma pochette.
J'aime assez le drone de « La mort de Pablo », ce disque à l'air plus complexe et profond..
Je suis un grand consommateur d'ambiant, electro, drone et surtout field recording, le son de la nature et des souffles, tu envisages de créer en pleine nature comme le peintre qui met son chevalet au milieu d'une clairière entouré de peupliers avec le vent dedans ?
« La mort de Pablo » je l'ai jouée entièrement au synthé, en une prise. Je l'ai un peu répétée avant, je savais comment je voulais qu'elle évolue et puis je me suis lancé. J'ai laissé volontairement un petit côté bordélique, ça sature un peu, ça cafouille un peu mais ça vit. Je suis content que tu l'aies aimé parce que j'ai vraiment failli l'enlever plusieurs fois du projet. J'ai enregistré pas mal de sons dans la nature, en ville, etc... d'ailleurs j'en ai calé sur « Vigipirate », c'est quelque chose que je vais faire plus à l'avenir également, ça évoque tout de suite des images et une densité au son, et j'aime ce côté là. Par contre emporter PC et synthé dans la nature, ça va être compliqué, en plus comme je t'ai dit mon ordi est pourri, c'est un trèèèès vieux portable plein à craquer qui tient à peine min sans batterie, mais ce serait cool dans l'absolu !
« Satholic Cult » me rappelle un peu le son mathématique et sportif syncopé de groupes comme Battles ou Electric Electric. Bande son pour l'effort ?? c'est un dilemme l'électro, musique cérébrale et/ou pour le corps ?
C'est intéressant ça, d'ailleurs c'est pas forcément exclusif ça peut être les deux en même temps. J'aime courir avec de la musique, soit avec tout un album pour bien rentrer dedans, soit en aléatoire et là parfois on a des surprises, des trucs planants, doux ou lents parfois pendant l'effort ça fonctionne super bien. Y'a un peu de ces groupes là dans ce morceau en effet, je pensais plutôt à un truc absurde à la Oizo ou Boyz Noise plutôt en le faisant. Un peu comme Oizo, utiliser cette grosse basse bien grasse qui aurait pu être dans un gros banger, mais en l'isolant de ce contexte de « tube » elle devient absurde et c'est cool. Ce côté gras de la basse, et puis la syncope, c'est parce que ce morceau a un sous-texte sexuel, donc bien vu le côté « pour le corps ».
Les machines dans la musique, Sheller et « Lesmachines absurdes » et la batterie Simmons de grand Phil Collins, une révolution un peu comme Dylan branche sa guitare.. tu en es où avec Phil Collins et Sheller ??
Je connais peu Sheller, mais je respecte ce qu'il fait. Collins j'aime beaucoup ses singles, moins sur la durée d'un album, mais un truc comme « In The Air Tonight » c'est un grand bond en avant qui ouvre une nouvelle direction dans la pop. Et c'est comme l'électricité, les synthés, les machines, la programmation, l'IA, l'autotune : ça ne remplace pas ce qui était là avant, ça complète, ça ouvre des portes ça n'en ferme pas. Peu importe l'outil, il y en aura toujours pour en faire des merveilles et d'autres des bouses, c'est comme ça.
J’ai tenté la House un jour, je pense à Front 42 que j’ai mis du temps à appréhender, mais qui m’a ouvert à plein de sons comme la Jungle, la Synth-pop, et je suis arrivé sur le Downtempo et l’Ambient qui me reste aujourd’hui. L’électro d’aujourd’hui tire sa substance des pionniers comme Pierre Henry, Moroder, et puis plus loin encore, Luigi Russolo et sa conception révolutionnaire de la musique bien loin du solfège académique (Manifeste futuriste 1913). C’est devenu une arborescence complexe le son des machines, Pierre Shapiro a fait un gros boulot pour qu’on puisse s’y retrouver (“Modulations : une histoire de la musique électronique” chez Allia), il y aussi Tsugi et Traxx (que j’ai délaissé aussi) qui tiennent le coup contrairement à pas mal d’autres magazines. Finalement, l’électro ça tient la cap inébranlablement ?
Oui, il y aura toujours une communauté forte de passionnés, avec des labels, des disquaires, des magazines, des sites/blogs... J'achète Tsugi de temps en temps c'est un bon magazine. C'est un regroupement de styles tellement variés, qui ont une histoire maintenant assez vieille, comme le hip-
hop ou le rock, que tout le monde peut s'y retrouver. Il y a pas mal de gros festivals électro indés qui marchent super bien dans la région, il faudra que je m'en fasse un d'ailleurs, mais on sent que c'est un monde vivant, et c'est cool.
Tu écoutes quoi en ce moment ?? mais nan je déconne, tes pages blog sont assez importantes et fulgurantes pour se rendre compte..mais tes disques de prédilection, le truc qui te colle au bulbe ?? ..
En ce moment genre cette semaine : Daho – Pop Satori, Devo - The Residents - Tyler The Creator – Wolf, Projet Marina – Echos, Space Afrika – Somewhere Decent To Live. Ce qui me reste en permanence collé au fond du crâne ? C'est compliqué je vais en oublier plein, mais Brian Eno, les Talking Heads, les Zombies, « Fun House » des Stooges, le Velvet et Lou Reed, les Beatles, Marvin Gaye, un producteur californien d'électro psychédélique qui s'appelle Ras G, Aphex Twin, Mr Oizo, toute la synthpop anglaise depuis le post-punk à maintenant, le label DFA, Tyler The Creator et Frank Ocean, Kanye West, Blood Orange, Gainsbourg, Coltrane, Miles Davis, Kraftwerk, Tellier, Damso, Katerine, beaucoup de psyché 60's (Silver Apples, The USA, Fifty Foot Hose), de l'afrobeat, du funk (P-Funk +++), Dr Dre, Snoop, Kendrick Lamar, de la sunshine pop / baroque pop à fond, Sinatra, les Four Seasons, Richard Hawley, Soft Cell, les Beach Boys, XTC, ABBA, Joy Division/New Order, Nine Inch Nails, Depeche Mode, Todd Rundgren, la nu-soul de J Dilla, D'Angelo, Badu, Christophe, Manset, Sly Stone, du vieux dub (Scientist, Lee Perry, Blackbeard...).. J'en oublie des caisses c'est affreux !
Tes projets ? La suite c'est quoi ?
Deux projets qui devraient sortir dans pas trop longtemps, pour lesquels il faut que je finisse les voix : un plutôt synthpop/électro-rock, très exubérant, dans la lignée de ce que j'écoutais ado (Gorillaz, Franz Ferdinand période « Tonight », The Klaxons...) entre pop et électro déglinguée (Metronomy, M83, un peu de Prince, George Clinton, de Ariel Pink, de Connan Mockasin / LA Priest)... Un plutôt quelque part entre Depeche Mode, James Blake, ambient et Biolay. Dans ces deux projets là, pas mal de voix du coup. Là en gros toutes les prods sont prêtes, j'ai juste à finir les textes et poser les voix. Et vu que ça fait un moment que je suis dessus, j'ai un peu trop de morceaux, certains partent dans d'autres directions intéressantes (psyché, électro-pop à la Jamie xx...), je vais sans doute publier certains de ces morceaux. On avait une idée de single Face A / Face B électro-rock avec Etienne, on a fini la face B et on a le texte de la A, faut qu'on finisse ça. Et sinon je travaille avec un.e artiste américain.e basé.e au Japon. En gros c'est une mixtape dans un genre assez mixte, entre de la pop indé, du rock indé, des influences trap et des voix très stylisées, avec pas mal d'effets. J'ai toutes les pistes de chaque instrument de ses démos et je fais le « producteur », j'enlève un peu ici, je rajoute là, une ligne de synthé ici, un beat là, j'ajoute des filtres, des effets, je compose des petits interludes... On fait du ping-pong par mail et ça avance bien, le résultat sera chouette. Et puis faut que je m'inscrives sur Bandcamp.
« Suzane » : https://www.youtube.com/watch?v=agWXyUPlBto
Si ça t'intéresse, je vais publier pour toi le premier morceau avec une voix lead que j'ai faite, plutôt chanté-parlé, ça s'appelle « Suzane », c'est une époque où j'écoutais beaucoup de jazz, de Damaged Bug (projet parallèle de John Dwyer de Thee Oh Sees, entre Eno et les Silver Apples), du Gainsbourg, l'album « Drones Personnels » de BabX, avec cette chanson « Suzanne Aux Yeux Noirs », très Bashung. C'est un peu un trip psyché entre cette chanson et « Variations sur Marilou ». Et c'est une chanson un peu à part, un genre de single isolé quoi, avec encore une construction linéaire, un peu un entre deux entre ma période électro et ce qui va venir, et qui sera plus pop, mais en moins carré car ça remonte quand même à 2016. C'était avant que j'aie un bon micro aussi, ça s'entend !
Merci pour cette interview en tous cas c'était un plaisir
Facebook :
https://www.facebook.com/alexdelapampamusic/
Soundcloud :
https://soundcloud.com/user-687951996/albums
Blogspot :
http://alexdelapampa.blogspot.com/
3 commentaires:
Interview passionnante, merci pour ce moment partagé :)
Moi qui ai oublié mes lunettes à la maison, ça devient coton un post pareil ... autrement ne serais-ce pas la même fille que chez le Cabinet des Rugosités 😂
De rien Bastien.. y'a aucune raison pour que c travail reste caché ,D
Et encore Tonton, j'étais à 2 doigts de rebondir sur le réponses. C'est quoi la fille du cabinet ? :D jvais aller voir
Enregistrer un commentaire