« L'ambiant est la musique sans rythme, allant de Terry Riley aux interludes des disques de hip-hop ; une musique tribale où les tambours lointains se superposent aux bruits de la forêt, au sonore ambiant, où les cris d'animaux distordus se mélangent au grincement des insectes nocturnes ; c'est une trame qui s'inscrit, comme les chansons des tribus aborigènes, dans le paysage, avec la nature. Un circuit tracé comme un cri, qui se répète en boucle de sampler, déformée et granuleuse..... L'ambiant comme fourre-tout de la musique intelligente, provocante. Une musique anti-club à jouer dans les clubs, comme transition, comme épice, comme acte de résistance et de subversion, un défi. »
Une fois n'est pas coutume, je propose ici les mots de Raphaël VALENSI, un bout de sa préface pour « Ocean of Sound » de David TOOP. Ce recueil sur la musique ambiante est une fantastique épopée, une immersion totale dans le genre, un témoignage sur ce son qui a ondulé depuis plusieurs décennies, avec des creux, des hauts, des retours en force dans les années 2010 avec des couleurs et des lumières différentes. J'ai eu ma grosse période ambiante dans les années 2000, je flottait en haut de cette vague, TRAXX ou TSUGI sous le bras. Je louais tout, achetais les opus conseillés et je me laissé happer par tous ces field recordings, ces tableaux sonores allant de l'insecte à l'orage, les nappes sous les drones, les crépitements sur les claviers, ces tranches de vie dans les micros, les oiseaux dans la neige de Watson, le bruit moléculaire d'un matériau...
J'ai une caisse de galettes avec tout un univers chantant sans mélodie, je sors des trésors de rêves de tout horizon, le « Texture in glass tubes and reed organ » de Minoru Sato ; le « Seven year silence » de Ronnie Sundin ; le témoignage sonore de l'exploration polaire de Simon Turner Fischer « The great white silence »; l'intrusion forestière d'Aaron Martin « Worried about the fire », l'abrasif Thomas Köner sur Type « Nunatak – Teimo - Permafrost » ; Eno dans son aéroport ; « Musique pour statues-menhirs » chez les anciens Arbouse recordings ; les ouvres d'Eleh ; Fabio Orsi et tous ces confrères italiens ; ou encore le « travail sur la visualisation du son et l'oscillation des ondes sonores en relation avec les forces de la nature... le son et l'imagerie des phénomènes naturels tels que les mouvementz du soleil, des nuages, de lamer et du vent » de Ducan Nilsson-Pinhas et Per Svensson (sur Galerie Jeune Creation Edition en 40 exemplaires). A nouveau d'autres mots inscrits au dos de ce dernier opus :
« Le son d'une mer en furie couvre la totalité du spectre sonore : c'est le bruit blanc, addition de toutes fréquences. Cependant ce spectre semble changer constamment ; parfois les vibrations profondes dominent, puis ce sont les sifflements aigus. Lorsque la mer se fait inoffensive, le rythme remplace le chaos. Elle expire enfin à l'horizon dans un murmure, se mêlant au plus douces musiques ».
C'est un monde fantastique qui s'ouvre sur des mots, un mouvement inépuisable qui prend ses racines chez Debussy, infini. Allia édition aussi sait en témoigner : « L'art du bruit » de Luigi Russolo ; « Modulations, une histoire de la musique électronique » de Peter Shapiro ou encore « La révolution digitale dans la musique, une philosophie de lamusique » d'Harry Lehman. Des océan de mots sur des ondulations. De quoi s'armer pour passer l'hiver.
Il est question d'un livre à la base. « Ocean of sound », puis d'un monde discographique qui dégringole, étourdissant. De mes écoutes je me concentre sur Toop du coup et j'aurais pu vous parler de l'abyssal « The shell that speaks the sea », ou du musical « Apparition paintings », du parlé « Field recording and fox spirits », mais je suis resté ankylosé par le chamanique et planétaire « Sound body » enregistré en 2006 lors de son passage chez David Sylvian et Samadhisound. Instruments, voix et machines. Expérimentations, collages, flûtes et oscillations, textures et délicatesse. Hypnotique, contemplatif les yeux fermés, un voyage surdimensionné.
David Toop 2006 « Soud Body » sur Samadhisound
5 commentaires:
le titre "décomposition" me fait déjà presque peur, ..... sans moi aujourd'hui. Merci pour la trouvaille.
m'a l'air passionnant tt ça !
j'y vais
THX
Trop de "pas assez de repères" pour moi, j'arrive pas à plonger sous la surface opaque qui m'oppresse.
Bah les p'tits gars !!! Ohh les p'tits gars !! que pasa ? Sorg, Tont' ?!! allez zouhh, c'est pour palier à la lumière estivale éblouissante de dehors ;D Bon, en tout cas le bouquin est une mine. Et il suffit juste d'écouter le bruits alentour, même le ronronnement du frigo qui chante pour entrer dans ses mots :)
Y'a de tout dedans le livre, et sa musique Pax.. du beau monde, y'en a qui vont te plaire.
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