samedi 17 juin 2023

Jean-Louis Murat


 

 

« Si je m'attendais ».. il était pourtant question de « Rester dans le monde »


Ce blog est parti d'une idée de partage avec comme parrain virtuel Dominique A. Je me disais il va longer ma motivation, me tenir par la menotte, me guider. Il fallait à tout prix que je divulgue et partage le monticule discographique. Toujours il me faut un point de fuite.


Plein d'autres ont déboulé.

Des artistes à tire-larigot.

Jamais trop, je me suis senti happé, tout s'est bâti autour d'eux.


Au fil des billets, le paysage en outil s'est installé, il a pris les commandes. Tout s'est lentement habillé d'horizon, de matinées nacrées en crépuscule vallonné. C'est un socle fertile d'être au service des beaux artistes. Le vertige labyrinthique d'ouvrir les vannes, de se laisser porter. Tout convergeait vers le motif.. j'écoute imbibé de nature quelque soit la saison. Une approche météorologique des écoutes est devenue une obsession, une sorte de phénologie musicale.


J'ai une confiance absolue en mes paysages irréversibles foudroyant notre anecdotique passage. Le globe n'est pas en danger, c'est juste le bipède dessus qui flippe sa race pataugeant dans ses glaires. Il croit tout maîtriser, et la patience des arbres devant la panique des ânes est la chose la plus rassurante que je connaisse.

Un jour, tout reprendra sa place, à son échelle, sans le nuisible bipède. L'équilibre biologique inébranlable perdu l'espace d’à peine quelques siècles, reviendra. Des molécules nouvelles et transformées subsisteront en nano stigmates, un poil de cul dans l’Amazonie, une vulgaire trace balayée d'une simple éruption. Nous, sur la planète, juste une petite gène.

L'infiniment petit préoccupe, une prise de conscience tardive. Il reste encore à se retourner, et prendre quelques minutes la considération du cosmos. On va encore rester quelques instants, puis on laisse tranquille. Désolé pour la gène occasionnée. L'être humain ne sera qu'une anecdote.

Un jour le paysage nous accueillera. Quelle idée rassurante que nos cellules éphémères aillent rejoindre tôt ou tard le moléculaire de la croûte. Un risible passage, une petite gène que notre déambulation énervée.


Dans tout ça, il reste l'amour et la poésie. Depuis quelques mois j'étais dans une très forte vague du gars qui nous parle de l'ancien monde réel. J'ai été cueilli par celui qui est allé rejoindre les cailloux. Je crois que c'est ça la principale différence entre Dominique et Jean-Louis, l'un peint les êtres humains, l'autre les paysages.


Un de mes récidivistes, un autre récurent, ils partent et sonnent le glas. Je me disais, Dominique A pourrait clore ce blog un jour, s'il arrêtait de me suivre, s'il venait à démissionner. Je marchais sur deux pattes, me voilà unijambiste. Ça va pas être facile de continuer à cloche-pieds


Une cime de poésie se fige. La foule s'ankylose de son plain gré.

Je suis tombé de vélo, abasourdi de gnons, brinquebalé et abattu. Je ressasse plein d'idées larmoyantes. Quel autre endroit ici pour causer de ça ? La disparition de Jean-Louis Murat. Je me suis bâti une vague idée d’idéale autour de son art, un refuge qui marie à merveille l'artiste et l'humain d'un même individu. J'ai beau me dire qu'il faut à tout pris rester dans ce coin de campagne qui jute toute les musiques que j'aime, mais les remontées inévitables à la surface médiatique me giflent l'âme, il faut voir tout ce qu'on nous donne à écouter.

Si je m'attendais. La marge de sa fraîche plaie à peine coagulée est à nouveau flanquée de dédain. Replongeons.


Voilà, c'est la fin du parcours pour lui, on n'imagine pas l'impact de certaines choses. L'architecture fragilisée d'un blog déjà anémié. Toujours quelque chose me laissait la foi, des albums à brandir comme on gravit un col. Il en reste combien des artistes fondamentaux . J'ai l'impression d'avoir fait le tour, que tout est dit, d'être devenu une momie mentalement. Quelles idées pour rester, quelle étincelle pour continuer, ne pas se laisser bouffer. Lutter.Comment le peuple a t-il pu passer à côté du "Grand lièvre", "de "Toboggan", de "Morituri".....


« Enfin démissionnaire » disait Dominique A, continuer à s'exprimer dans le vide, celui abyssal qui gangrène le quotidien, un déclic pour continuer à nager dans cette fausse à purin qu'est devenue la culture chez nous, je parle de musique, de poésie là où il n'y en a plus, dans un paysage qui se ride. Tiens donc... « Suicidez-vous le peuple est mort »..


Pour le moment, je laisse glisser et s'agiter les alentours, je me recueille dans un sirop carmin, juste s'engluer dans un sommeil mou, des rêves rouge .. sous la lampe. Je me recroqueville à écouter solennellement, rattraper toutes ces années bâclées.


Accueille-nous paysage


16 commentaires:

Echiré79 a dit…

Superbe billet mon Charlu et quel plaisir de te relire ( malgré le choc de la mort de Murat )

Ces derniers mois je t'ai envoyé pas mal de musique et message mais je ne sais pas si tu as pu les recevoir ??

Pap's

TonTonMusik a dit…

Beau travail d'écriture avec ce petit plus de douceur dans le texte. Bravo

charlu a dit…

Hi Pap's. Ma boite hotmail est HS.. je sais pas ce qu'il s'est passé, mise à jour.. google truc machin.. j'ai aussi un bug sur la version outlook.. dsl.
Je vais t'envoyé un mess d'une autre adresse, que tu connais déjà d'ailleurs ;D

Sinon comme tu dis, le choc..

charlu a dit…

Merci Tonton ;D

DevantF a dit…

Etrange ma sensation, je me retrouve comme celui qui se tourne vers les vivants accablés pour les consoler. Toi aussi, un peu comme ma compagne qui me le faisait écouter souvent, tu as été frappé par sa mort. La perte d'un membre - unijambiste - artiste dont les chansons tissent avec le temps ce lien qui s'assimile à un proche que l'on chéri. Le désenchantement de ton texte donne envie de te serrer dans les bras, ne rien dire un moment jusqu'à te proposer de croire encore. Les vers de "comme à Ostende" ont toujours déclenché chez moi l'envie de s'ébrouer, de s'ébattre de se battre pour y croire encore et ne pas se poser la question "...Et qu'on s'demande
Si c'est utile
Et puis surtout
Si ça vaut l'coup
Si ça vaut l'coup
D'vivre sa vie !"

charlu a dit…

C'est gentil mon Toine.. j'accepte ton accolade avec émotion, juste avant d'aller dans un estaminet attiré par l'odeur de bière, de frites et de moules marinières.. juste ça et quelques disques.
Le désenchantement m'habite depuis très très longtemps, c'est même un compagnon récurent, un refuge.. c'est pesant qd tu es gamin, mais adulte et même quinqua je trouve que ça à de la gueule :) Bref, l'effondrement pour moi est une chose inscrite, l'échelle du temps avec accélération est la seule incertitude. Là quand même ça fait beaucoup.. et sa parole bafouée, tout comme les textes du dernier Dominique A.
Allez viens, on va s'en jeter une petite..puis rentré éméché par le chemin des poneys

Everett W. Gilles a dit…

Il a raison Dev, il faut croire encore.
A quoi je sais pas, mais il le faut.
Tiens, si j'avais 5mn je te parlerais bien du dernier Ron Gallo, ou de mes récentes lubies à savoir m'enchaîner tous les Spiritualized et les faire glisser avec deux-trois Faust ou Neu !, je sais ça fait peur dit comme çà, d'ailleurs c'est ça, je me fais peur et où veux-tu que j'exorcise si c'est pas ici (ou là) ?
Et alors un truc encore plus dingue, j'ai chopé ça chez Marius, un truc que y a six mois je t'aurais écrit avec mon propre sang que jamais de la vie : un groupe Ukrainien ! DakhaBrakha qu'ils s'appellent, fonce les écouter et voir leurs tronches de branleurs, et surtout de branleuses. Z'ont la connerie sur eux, je te jure !
Voilà quoi, faut y croire.
Quant à tous ceux qui disparaissent, le pire c'est de savoir que ça s'arrêtera pas.
Depuis 3-4 ans ça tombe autour de moi, en cercles concentriques. Murat et les autres, il t'en restera la musique, elle non plus ne s'arrêtera pas.
Merde, pffff, j'ai fait trop long.
Putain, mais t'étais passé où Cha ?
La bise mon gars, et ne t'arrête pas.

Till a dit…

Yo Charlu ! Ça m'a fait un choc aussi et pourtant j'écoutais pas Murat. Je l'ai toujours trouvé trop brun ténébreux, comprendre un peu forcé, qui s'écoute faire le sombre. Et ouais je me comprends parfaitement. Je le classais quand même dans les bons auteurs/compositeurs français, mais dans le rayon "Qui ne m'intéresse pas". C'est pas très objectif mais ça me fait gagner un temps fou.
Moi je me suis toujours pas remis de la retraite de Bashung, Bowie et...merde j'arrête la liste c'est l'horreur. Mais ces gens-là sont immortels, c'est ça le plus important.

sorgual a dit…

On m'a dit un jour à un enterrement : bienvenue au club des attristés mélancoliques. Oui plus la vie avance et le monde autour s'étiole, plus on perçoit que l'on est des êtres d'émotions et de souvenirs, des briques faites de proches, de rencontres , de faits qui nous ont construit et façonnés, plus ou moins bancals, un chef-d'oeuvre en inéluctable péril. La vie se fissure et la résilience de chacun reste un moteur très personnel qui donne le ratio entre la peur de l'oubli et le bonheur de s'attacher aux racines, immortelles en musique.
Moi je me dis, il doit être bien au mont sans souci.

charlu a dit…

Eh voilà, qq saucisses sur les braises et ça déboule.. merde Ron Gallo, c'est plus de ton age, tu vas nous péter un sten. Bon, ce soir dans mon wagon, j'ai mis Dakhabrakha au casque, c'est ma veine ça.. 'adore le folklore folk, ça m'a rappelé Lhasa "Baby" en mode slave. C'est vachement bon comme truc.
Quant à croire, je crois croire, j'ajuste juste, je rectifie les priorités, pas joli à voir pour la collectivité :) J'me fous en mode touriste, intermittent de la visibilité. Faut tjrs quand même que j'aille racler la caillasse sur Paname et ça ça devient une douleur. Je prends souvent mon vélo et je me barre. Et toi tu tiens le choc ??
La bizete l'Evrett

charlu a dit…

Ouaih Till, le personnage peut faire dévier. C'est sa montagne de disques qui me botte. Y'a eu des moment difficile comme tu dis, Bashung.. tiens mon premier souvenir triste c'est Gainsbourg.. mais il en reste encore.. MacCa, Pagny, Hervé Villard..

charlu a dit…

Merci Sorg pour ton mess.. la résilience devient un outil indispensable au fil des années.

Everett W. Gilles a dit…

Hé bé oui, que veux-tu, l'odeur de la saucisse.
Arfff, je sais pas si ça va ou si j'ai réussi à m'en convaincre, disons que le bateau coule normalement quoi, et moi j'essaie de flotter.
Il a été inventé quand ce mot, résilience ? J'ai l'impression que c'est pas bien vieux.
Et nos copines de DhakaB faut aussi les voir en vidéo, je te dis, elles ont la connerie sur elles et au fond des yeux ...
La bise mon Cha

Charlu a dit…

Tu as réussi à t'en convaincre.. ta jeune résilience ;D
Ouaih, le principal est de flotter. On m'a toujours dit que si tu te débattais tu coulais plus vite. Faire la planche..ou monter dessus.

Tiens, je vais bouffer du polvo grillé et ramasser les olives mi octobre.. Tu sais qu'à la retraire, c'est pas impossible que j'aille me réchauffer la couenne là bas chez la belle doche.

Eh.. la connerie, il a ce qu'il faut le gars des Brakha.. il est foncedé :)))))

Everett W. Gilles a dit…

Arrfff, j'dois y aller aussi chez nos cousins lusos mais du 1er au 15 octobre.
Bord de mer évidemment, Peniche-Nazaré-Ericeira, peut-être Santa Cruz.
Pas mauvaise l'idée d'aller là-bas à demeure.

Ouais, la connerie c'est leur fond de commerce haha ...

Charlu a dit…

Oui sale temps pour la poésie. Je crois que ça vient d'ici. Je n'imaginais pas l'impact de sa disparition.. nin sa disparition tout court. Me suis rué sur le triple vinyl Lilith 😌😌

Thomas Köner 1993

  La croûte gelée se ramollit, ventre flasque et tiède respiration. Le ciel se charge de l’halènes des Steppes, le silence gronde. Notre ...