dimanche 18 octobre 2009

Hotel 2 tango


Que suintent les murs de l'hotel 2 tango pour habiter chaque artiste de passage dans ses couloirs avec une telle force? Quelle muse rode dans les étages pour que Lhasa et Vic chesnutt prennent une autre dimension, une autre hauteur.
Le visage ocre beau comme celui de Janis, enfin dévoilé en monochrome remplace le portrait fauve de "La Llorona". La confusion linguistique de "The living road" n'est plus, c'est un concept immaculé, une mise à plat pour une artiste happé par le mythe montréalais, ainsi que Vic Chesnutt qui lui aussi depuis deux album s'est laissé séduire par ce coin de terre constellé qui donne de l'espace au son, l'envergure des notes, la beauté mélancolique d'un art musical chanté dans sa plus belle maturité. C'est avec "1001 nights" de Lhasa; "north star deserter" et "at the cut" de Vic Chesnutt que l'on doit bien admettre que la croyance des pèlerins qui vont à Montréal offre la consécration artistique comme un miracle, un nord réchauffé par l'écriture sudiste, un sud aplani par les nuits froides et longues du Québec.
Quels sont les anges qui habitent ces murs, quels amis sincères, quelles âmes hospitalières peuvent ainsi révéler l'auteur compositeur ? Quelle piqure, quel sacrifice doit on subir avant de franchir le pas qu'il soit vagabond, curieux ou déterminé? Quelle est cette créature injectant le venin qui "mélancolise" l'inspiration ? Cette suceuse de futilité qui ne laisse à l'âme que la liberté et l'indispensable.
Une croisée des chemins, un point de rencontre inespéré entre une entité artistique et un univers. Accroc aux deux mondes depuis que les corbeaux habitent le rouge d'A silver Mt Zion et que le même crane dépité hantant le bas anguleux de la pochette de « at the cut » fut mis sous les projecteurs à l'olympia 95 (première partie de Dominique a), je vis ce mariage comme un miracle.
J'aime ces deux artistes, et j'aime ce mythe montréalais qui revendique sa politique artistique radical et pertinente depuis 1997. Toute l'hospitalité d'un collectif fidèle au service de songwriters à la géographie différente. Chaque artiste au bon endroit, chaque note exacte, pas une de plus, pas de fioriture alourdissante, pas d'artifice...les cordes minimales du piano de Nadia sur « Chain », les mêmes silences entrelardant les harmonies, les notes graves de Thierry pour tous les album, la même résonance acoustique à la croisée de tous les styles, les mêmes propos dénudés, disséqués, la même adéquation des mesures sur le timbre particulier de chacune des deux voix, Lhasa proche d'Elizabeth Anka Vajagic, voire Carla Bozulich, et Vic chesnutt fidèle à sa fragilité vocale douce et à la fois rugueuse. La chaloupe est toujours étoffée, les balancements sensuels nivelés par une mélancolie planante et omniprésente. Gravité monumentale et doucereuse, Montréal est fortement présent dans chacune des volutes sonores dans une harmonie la plus intègre. Les envolée électriques appelées par Vic sont épiques, le son est épure et le design toujours aussi fidèle et familier.
Lhasa et Vic viennent lier leur vision musicale dans les cordes et les toiles tendues de Constellation comme on fait un pèlerinage, des épousailles, quelque part sur la planète où règne l'amour des atmosphères et de l'art musical dans son plus simple habit. Vic Chesnutt confirme avec plus d'homogénéité, de maitrise et donne espoir pour que Lhasa retourne faire tanguer ses balades dans les grands espaces québécois.



Lhasa 2009 "1001 nights" label tot ou tard


Vic Chesnutt 2009 "at the cut" ; 2008 "north sea deserter" label constellation






vendredi 16 octobre 2009

Electric electric



Le son qui s'échappe du précieux label HERZFELD repose sur un socle en bois. Il suffit d'avoir dans ses mains, les rondins encore poisseux de sève de SPIDE avec l'épique album « rodent »; Renz et son diabolique « wowox », ou encore le premier lp de T, dans sa catégorie B, pour bien reconnaître que les branches qui se dressent et bourgeonnent proviennent bien du même tronc recouvert de lichens et de mousse. Herzfeld en ce temps là s'appelait encore Vergo.
Plus récemment, dérobant l'affiche au fidèle T et tout nouveau Lauter, quelques uns des rameaux ont lâché le bois et tendu vers un son 80's (Drey; Guisberg),histoire d'évoluer et prendre garde à ne pas rester englué dans un même style, une ouverture vers d'autres horizons. C'est finalement la branche la plus nouée, la moins fragile, la plus inattendue aussi et le son sauvage et brut de ELECTRIC ELECTRIC vient étoffer l'arbre strasbourgeois vieux de dix ans déjà.
Comme Battle percutant warp de ces biceps, ou Perceval/Chevreuil cinglant le collectif-effervescence, Herzfeld fait le plein de charbon avec ce duo tonique balançant un brulot d'instrumentaux incandescents. Véritable roche en fusion, "Sad cities handclappers"entre dans une syncope répétitive totalement tétanisante. Une prouesse sportive dans sa construction imparable et son interprétation sauvage. Des pilules d'uranium font tourner les turbines. Malgré la surdose de vitamines, le tout reste totalement maitrisé, dosé et limpide là où beaucoup de groupes similaires bavent dans l'indigeste. C'est urgent et pourtant le challenge dure une heure, dansant jusqu'à l'épilepsie synchrone, bon et jouissif, c'est en sueur et courbaturé que l'on termine ELECTRIC ELECTRIC, la récréation musclée du label Herzfeld. Deux cerveaux électriques pour un duo tonique à la manière d'Hangedup chez Constellation, Eric aux guitares et Vinc à la batterie.
ELECTRIC ELECTRIC 2008 "Sad cities handclappers" label: herzfeld
Quand on aime : Perceval/chevreuil, le sport, Battles, Hangedup.

Thomas Köner 1993

  La croûte gelée se ramollit, ventre flasque et tiède respiration. Le ciel se charge de l’halènes des Steppes, le silence gronde. Notre ...